Lorsque, après mes 13 premières années de vie active, j’ai repris mes études à Centrale Lyon, je me suis trouvé dans la position singulière de doyen des élèves de ma promotion (j’étais même plus âgé que certains des professeurs). Je me souviens que, découvrant notre grande différence d’âge, certains de mes camarades se mettaient soudainement à me vouvoyer. J’interprétais alors ce comportement comme une difficulté à développer une relation d’égal à égal. Au fil du temps et de mes diverses expériences de consultant en développement organisationnel, j’ai du me rendre à l’évidence que le manque de savoir en matière de communication empêche mes frères d’armes de développer ou d’exprimer pleinement toutes leurs possibilités. Il serait pourtant très facile d’amoindrir cette difficulté et d’accroître en même temps l’impact et la position de la fonction ingénieur dans l’espace professionnel. C’est ce que je veux montrer ci après.
Dino Ragazzo
Dino Ragazzo a plus de 25 années d’expérience opérationnelle en milieu industriel notamment chez CEGELEC, Groupe ATANTIC, FRAMATOME (mise en service d’installations nucléaires).Il a été successivement Technicien commercial, Ingénieur d’essais, Directeur Technique, chef d’entreprise (PME d’ingénierie électrique et maintenance nucléaire) et Conseiller de la Direction Générale d’un grand groupe Industriel. Dino Ragazzo est également l’auteur de l’ouvrage :
MANAGER D’ELITE – Gestalt guide du leadership dans les organisations du XXIe siècle
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La réputation de l’ingénieur vient de son extraordinaire capacité à construire ou à inventer des « engins ». C’est, dit-on [1], de là qu’il tient son nom : engigneor. L’engigneor, est capable de concevoir des systèmes qui font rêver le monde entier comme des navires solaires, des systèmes de vision nocturne, des ouvrages d’art gigantesques ou des dispositifs de récupération de l’énergie de la nature… Hélas, sa passion pour la résolution des problèmes posés par les sciences physiques le conduit trop souvent à négliger l’étude des sciences humaines. Cette impasse sur les compétences humaines lui joue souvent de bien mauvais tours en lui faisant, par exemple, perdre toute crédibilité lorsqu’il ne parvient pas à mobiliser les collaborateurs autour de ses extraordinaires projets. Pourtant, la maîtrise de bonnes compétences humaines conduit au développement de cette qualité dont tout entrepreneur a besoin pour attirer et multiplier les énergies autour de ses projets : le leadership.
Il est peut être temps de revisiter cette citation de Francis Bacon, philosophe et homme d’Etat anglais du XVIIe siècle : «La connaissance c’est le pouvoir ». Reconnaissons que, telle qu’elle se compose aujourd’hui, la connaissance de nos ingénieurs n’est plus suffisante pour leur procurer le leadership dont ils ont besoin pour accomplir leurs projets. De surcroit, l’organisation des cursus focalisés sur le développement de prodigieuses compétences techniques, contribue, par la faiblesse des enseignements en sciences humaines, à l’atrophie des compétences relationnelles des futurs ingénieurs. Selon Kouzes et Posner [2] chercheurs et auteurs à succès autour du thème du leadership: « le leadership ne procède pas de la tête. Le leadership, c’est une affaire de cœur ». Développer son leadership, c’est donc avant tout une démarche de développement personnel. C’est une démarche de développement de ses compétences relationnelles et de sa capacité à entrer en contact avec les autres. Capacité, hélas, insuffisamment développée chez bon nombre de nos camarades.
A l’inverse d’une quantité croissante d’universités américaines, qui accompagnent le développement personnel de leurs étudiants de haut niveau au travers de séances de coaching relationnel, l’absence de prise en considération de ce développement personnel fait gravement défaut dans nos enseignements et produit de terribles dégâts sur l’efficacité de nos entreprises.
Osborne [3] a montré de manière synthétique, avec sa fameuse formule « E = Q x A », que l’efficacité d’une décision (E) est le résultat combiné de sa qualité (Q) et du niveau d’acceptation (A) qu’elle suscite.
Ainsi un responsable qui sait développer de bonnes qualités relationnelles au sein de ses équipes saura plus facilement traverser les embûches causées par d’immanquables erreurs de conception ou par une planification inévitablement défaillante des projets. La force collective, mise en œuvre par des collaborateurs impliqués, prend le relais d’une ingénierie qui ne peut pas être infaillible.
En revanche, un manager qui mise essentiellement sur les vertus du raisonnement logique ne pourra pas compter sur ses compétences rationnelles pour traverser un problème de relations entre ses membres. En effet, le recours à une communication exagérément rationnelle ne sera pas d’un grand secours pour démêler, à elle seule, le litige dévastateur d’un groupe de collaborateurs excités.
Si la connaissance technique de nos ingénieurs est un gage de la qualité de leurs décisions, leur capacité à mobiliser les gens est également une compétence fondamentale à développer car elle détermine le niveau d’implication que chaque collaborateur sera disposé à engager dans la mise en œuvre et la réussite des décisions.
Par Dino Ragazzo
[1] Encyclopédie Larousse
[2] Kouzes et Posner (2007) Leadership Challenge. Jossey Bass
[3] Richard Osborne est « Professor for the Practice of Marketing and Policy Studies » à la Case Western Reserve University
Dino Ragazzo est l’auteur de l’ouvrage « Manager d’Elite, gestalt guide du leadership dans les organisations du XXIe siècle« . Bénéficiez de 20% de réduction immédiate sur l’achat de cet ouvrage grâce à Instantanés Techniques en cliquant ici (code réduction : 1IT11).
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