Les Etats envisagent plus sérieusement de développer les technologies de captage et de stockage du dioxyde de carbone (CSC), afin de limiter la pollution liée à la consommation d’énergie et à l’activité industrielle. Le projet européen GeoCapacity prévoit la possibilité d’enfouir 300 milliards de tonnes de CO2 sous le sol européen, dans des puits de pétrole, des réservoirs à gaz ou des cavités géologiques. Cependant, l’objectif de monter 12 centrales pilotes à cet effet d’ici 2015, est « irréaliste », en l’état actuel, selon les Etats, qui sont chargés de porter des projets de CSC au niveau européen. Le projet de communication, consulté par Euractiv Bruxelles, envisage de faire évoluer la législation actuelle. S’il est approuvé, il obligerait la Commission à préparer une analyse d’impact et des propositions législatives avant 2014. Une consultation publique serait également lancée.
Pas assez d’incitations financières
Les projets de stockage et de captage sur le territoire européen devaient être financés par la vente de bons d’émissions de CO2 (programme NER300), et appuyés par la BEI. Ce dispositif devait attirer les investissements privés. Mais le prix de la tonne de carbone, aujourd’hui à 6, 4 €, est trop bas. Sans un prix de 40 à 75 € la tonne, « il n’y a aucune raison rationnelle pour les opérateurs économiques d’investir dans le CSC », précise le document de l’UE. Certains projets ont été annulés en Europe, notamment aux Pays-Bas, en Finlande et en France. Le porte-parole de Shell, Wim van de Wiel, souligne que le programme NER 300, auquel le géant néerlandais de l’énergie est favorable, souffre d’un manque de volonté des Etats membres de contribuer à 50% des investissements. « Il est opportun pour les décideurs politiques et le secteur de débattre de la nécessité de mesures supplémentaires limitées dans le temps afin de faire avancer le CSC en Europe », ajoute-t-il.
Plafonds obligatoires
Pour les Etats, « il est irréaliste d’assumer que le secteur dégagera les investissements adéquats pour les projets de CSC ». Il faut notamment adapter le système d’échange de quotas d’émissions de CO2 européen. Par exemple en fixant des limites d’émissions de carbone aux entreprises énergétiques et éventuellement aux industries à forte consommation d’énergie. Dans l’Etat américain de l’Illinois, les entreprises énergétiques devront par exemple tirer 5% de leur électricité d’une source d’énergie sans charbon d’ici 2015 et 25% d’ici 2025. Le document européen suggère également un système de certificat obligatoire de CSC, qui serait « parfaitement aligné sur le système ETS » et le principe du « pollueur payeur ». En Norvège, un pays non membre de l’UE, ce système est déjà en place, et le pays accueille actuellement deux des 20 projets pilotes mondiaux de CSC.
Oppositions
La Commission européenne discute du projet de l’UE, mais des fonctionnaires de la direction générale du climat s’y opposent. Ils affirment, contrairement aux Etats membres, que le système d’échange de quotas d’émissions (ETS) devrait être le moteur principal des investissements dans le CSC. La capture du carbone pose problème aux défenseurs de l’environnement, car favoriser son développement équivaudrait à soutenir en réalité une exploitation accrue des réserves en ressources fossiles, notamment par la récupération assistée du pétrole (RAP) ou le pompage de carbone liquéfié dans des puits de pétrole ou des gisements de gaz. Une tendance que des entreprises de CSC ont confirmée à EurActiv Bruxelles. Le document de l’UE indique pourtant explicitement que le « RAP ne peut jamais être le moteur principal de l’utilisation de CSC ». La capture de carbone rencontre par ailleurs l’opposition de certaines opinions publiques. En Allemagne et en Pologne des manifestations ont eu lieu contre la transposition de la directive, prévue pour 2011.
Nécessité
Si la combustion des carburants fossiles se poursuit au même niveau, sans le CSC, l’UE sera incapable d’atteindre son objectif de décarbonisation d’ici 2050. Pour Sanjeev Kumar, l’associé principal d’E3G, un cabinet de conseil sur l’environnement, la récupération assistée du pétrole « est un enjeu à court terme ». « Nous voulons utiliser le CSC pour réduire notre impact sur le climat. Nous examinons [des méthodes] de stockage du CO2 en toute sécurité et prouvons que la technologie fonctionne. Nous pouvons ensuite la vendre aux principaux pays en développement comme la Chine et l’Inde. » Aujourd’hui, beaucoup de chemin reste à parcourir pour relever le défi des émissions de carbone. « La réalisation d’un plus petit nombre de projets sera un défi encore plus grand », peut-on lire dans le document. La communication sera rendue publique courant 2013, ainsi qu’un rapport de la Commission sur la transposition de la directive actuellement en vigueur.
Source : www.euractiv.fr/energie-environnement
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