Certes, il faut améliorer l’efficacité énergétique des bâtiments, car un tiers de la facture énergétique mondiale s’y raccroche. Mais quels sont les principaux réservoirs d’économie d’énergie ?
« Un des premiers axes de travail concerne l’isolation des bâtiments. C’est une des voies privilégiées », explique Didier Roux, directeur recherche et développement chez Saint Gobain.
Cependant, il est indispensable de garder à l’esprit qu’adopter des techniques d’isolation a un coût. En effet, les travaux sont en général conséquents pour refaire l’isolation d’un bâtiment, « mais les économies postérieures en termes de chauffage sont souvent si importantes que l’équilibre financier est assez rapidement atteint », insiste le directeur recherche et développement de Saint-Gobain.
Le futur passe par l’utilisation d’isolants minces
Le bois est un matériau intéressant. Mais les solutions d’isolation pour la rénovation se révèlent insuffisantes, au regard des contraintes imposées lorsqu’on travaille sur un bâtiment ancien. Les solutions actuelles, comme la laine de verre par exemple, font en effet appel à des épaisseurs importantes, afin de créer une couche d’air suffisante pour être efficace. Or, diminuer cette épaisseur est très difficile. C’est pourquoi, les chercheurs travaillent aujourd’hui sur de nouveaux matériaux. Ces solutions mettent la plupart du temps en œuvre des isolants minces dont les performances sont similaires aux matériaux d’isolation plus conventionnels.
Mais isoler les murs ne suffit pas. Il faut également isoler les vitrages et pour cela, plusieurs techniques existent. Ainsi, il est possible d’apposer une série de fines (quelques nanomètres) couches d’argent, qui empêche les radiations émises par la chaleur de s’échapper du bâtiment. Un double vitrage couplé à de fines couches d’argent (souvent 17 ou 18 couches sont apposées les unes sur les autres, sans altérer la transparence de la vitre), permet déjà d’avoir des performances d’isolation intéressantes.
La meilleure solution reste néanmoins le triple vitrage (toujours avec des couches d’argent), qui permet également de chauffer l’habitat, et dont les performances isolantes sont supérieures à celles d’un mur.
Inventer des systèmes d’isolation nouveaux
Mais inventer des matériaux nouveaux ne suffit pas toujours. Il faut également inventer de nouveaux systèmes. En effet, il est très difficile de rénover l’isolation de certains bâtiments. C’est le cas, par exemple, des immeubles d’habitations. « On ne peut pas demander aux habitants de refaire totalement l’ensemble de leur intérieur, rappelle Didier Roux. Des nouvelles technologies, venues des pays nordiques, permettent d’isoler les bâtiments par l’extérieur, sans rien modifier de l’intérieur. »
C’est la solution qui a été adoptée pour rénover la gare de Strasbourg (photo ci-dessous). Une coque de verre, entoure désormais l’édifice et améliore fortement l’efficacité énergétique du bâtiment, tout en en augmentant la capacité au sol.
Les matériaux plastiques permettent aussi de recouvrir des surfaces importantes. Cette technique a été notamment utilisée pour recouvrir la piscine olympique des JO de Pékin avec des polymères fluorés :
Enfin, les murs végétaux, même si leur utilisation est et restera exceptionnelle, constituent également une méthode d’isolation pertinente et efficace, même si elle est plus complexe à mettre en œuvre et donc à généraliser.
Passer de l’isolation statique à l’isolation dynamique
Côté recherche, la période est charnière, puisque d’une isolation statique, nous sommes en train de passer à une isolation dynamique. Dans le détail, les scientifiques n’essaient plus de protéger un système en l’isolant, mais privilégient plutôt « des systèmes dits réactifs, jouant un rôle actif dans l’isolation du bâtiment », précise Didier Roux.
Deux évolutions vont dans ce sens. La première intègre l’utilisation des matériaux à transition de phase. L’eau, par exemple est un matériau à transition de phase, car elle peut passer d’un état liquide à un état solide ou gazeux. Les changements de phase s’accompagnent d’un stockage d’énergie. La phase inverse restituera cette énergie. Les matériaux à transition de phase sont donc utilisés pour stocker de l’énergie.
Un système mis en place à Vienne permet de cette manière d’isoler des murs de façon dynamique. Concrètement, il s’agit d’un mur constitué d’une plaque de verre, avec un système optique qui filtre les rayons du soleil selon leur angle d’impact sur la plaque de verre.
Derrière ce dispositif, côté intérieur, se trouve une couche constituée de matériaux à transition de phase. En été, les rayons du soleil ne pénètrent pas jusqu’à la couche de matériau en transition de phase (à cause de leur angle d’impact). En revanche, l’hiver, en raison d’une inclinaison différente de ces mêmes rayons, c’est le contraire qui se produit. Les matériaux en transitions de phase sont alors chauffés par les rayons du soleil, passent de l’état solide à l’état liquide, et diffusent cette chaleur accumulée pendant la nuit, dès que la température baisse. Ce système, complètement naturel, est tout à fait innovant.
Deuxième évolution, remarquable d’ingéniosité, le verre électrochrome (voir exemple sur la photo ci-dessous), qui change de teinte selon le courant électrique qui le traverse, grâce à des capteurs. Ainsi, en fonction de l’intensité lumineuse, on peut doser la teinte du verre et ainsi la quantité de lumière qui traverse la vitre.
Ces deux exemples ne constituent pas une liste exhaustive des solutions innovantes en matière d’isolation, mais elles montrent que l’alternative à la consommation d’énergies fossiles existe. L’isolation est un enjeu majeur pour l’habitat du futur, et même si les contraintes sont multiples, notamment en ce qui concerne la rénovation des anciens bâtiments, aujourd’hui les réponses existent.
L’éclairage, un secteur à réviser dans son ensemble
Dans une moindre mesure, l’éclairage est un domaine où les économies d’énergies sont réalisables en masse et qui aujourd’hui est en pleine transformation. « Historiquement, l’éclairage est une technique peut économe au niveau énergétique : en effet, 98 % de l’énergie produite par une ampoule à incandescence l’est sous forme de chaleur, seulement 2 % de l’énergie produite sert à l’éclairage à proprement parler. Cet état de fait devient problématique aujourd’hui, devant l’augmentation continue des besoins en électricité », glisse Didier Roux.
De fait, un nouveau type d’éclairage est apparu : l’éclairage électronique. Le principe reprend à l’inverse celui du photovoltaïque. L’électricité, en traversant un matériau luminophore, va produire de la lumière. On trouve deux types d’éclairage électronique : les LED, de plus en plus répandues, qui équipe entre autres les éclairages automobiles, produisent de la lumière grâce à des cristaux.
Le deuxième, qui n’existe pas encore dans le commerce, est l’OLED. Au lieu des cristaux, c’est de la peinture qui va permettre de produire de la lumière. Grâce à l’application de couches de peintures luminophores entre deux couches d’un matériau permettant de faire la jonction électronique, on obtient des surfaces éclairantes.
Bien sûr, les applications pour l’habitat sont légions. On peut tout à fait imaginer des sols, ou des murs éclairants. La possibilité d’intégrer l’éclairage aux matériaux de construction, et celle de choisir les couleurs voulues, à volonté, offrent des perspectives esthétiques novatrices.
Par Pierre Thouverez
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