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L’inquiétude des constructeurs automobiles européens face aux lourdes amendes de l’UE

Posté le 5 décembre 2024
par Nicolas LOUIS
dans Entreprises et marchés

À partir du 1er janvier 2025, le seuil moyen autorisé d'émission de CO2 des véhicules neufs vendus en Europe va diminuer de 15 %. Dans un contexte où ils sont confrontés à une érosion des ventes de leurs véhicules électriques, les constructeurs européens craignent de lourdes amendes de l'UE s'ils ne parviennent pas à respecter ce nouvel objectif.

Un acronyme fait en ce moment trembler les constructeurs automobiles européens : CAFE. Il signifie Corporate Average Fuel Economy et désigne une norme européenne portant sur les émissions de CO2 des véhicules. Elle n’est pas nouvelle, puisqu’elle est effective depuis 2020, sauf qu’à partir du 1er janvier 2025, le seuil moyen autorisé d’émission des véhicules neufs vendus va diminuer de 15 %. Si jusqu’ici, les constructeurs sont parvenus à globalement le respecter, ils craignent de ne plus y parvenir et de devoir payer de lourdes amendes.

Alors qu’actuellement, les véhicules neufs mis en circulation ne doivent pas émettre plus de 95 grammes de CO2 en moyenne par kilomètre, ce seuil va être abaissé à 81 grammes dès le début de l’année prochaine. En cas de dépassement, les constructeurs automobiles européens sont redevables d’une amende de 95 euros par gramme excédentaire pour chaque véhicule vendu. Et selon une estimation du cabinet Alix Partners, ils pourraient se voir infliger des amendes d’environ 50 milliards d’euros sur la période 2025 à 2029.

Face à ce risque, l’Association des constructeurs européens d’automobiles (ACEA) appelle à ce que l’article 122.1 – l’équivalent d’un « 49,3 » au niveau de l’Union européenne – soit utilisé afin que ce nouvel objectif de réduction des émissions de CO2 soit reporté en urgence, selon une information révélée par Le Monde. Antoine Armand, le ministre français de l’Économie, a également demandé ouvertement un décalage de la mise en œuvre des sanctions. Pour l’heure, la Commission européenne rejette cette demande, estimant qu’elle est prématurée et qu’un bilan sera effectué à la fin de l’année 2025, au moment de calculer quelles sont les émissions effectives des voitures vendues.

Il faut savoir que les véhicules thermiques les plus propres rejettent plus de 100 grammes de CO2 au km, tandis que les meilleurs moteurs hybrides descendent à environ 85 grammes par km. Pour respecter le nouveau seuil, cela signifie que les constructeurs vont devoir augmenter la part des véhicules électriques dans leurs ventes. Or, ils sont confrontés à une érosion des ventes de leurs voitures dans cette gamme, qui s’explique en partie par une baisse des aides publiques à l’achat. La part de marché des véhicules électriques représente actuellement environ 12 % du total des ventes en Europe, contre plus de 13 % l’année dernière.

Stellantis opposé à un assouplissement de la norme CAFE

Pour éviter les pénalités financières, les constructeurs européens ont la possibilité de racheter des crédits d’émissions auprès de constructeurs moins polluants, notamment auprès de Tesla, mais au risque de subventionner leurs concurrents non européens. Ils pourraient aussi être tentés de réduire leur production de véhicules thermiques, sauf que cela pourrait entraîner la fermeture d’usines en Europe, avec à la clé des destructions massives d’emplois.

Tous les constructeurs européens ne sont pas égaux face au durcissement de la norme CAFE. Si Renault et le groupe Volkswagen semblent particulièrement exposés, Stellantis a fait savoir que l’entreprise s’opposait à l’assouplissement de cette réglementation européenne. Carlos Tavares, le patron du groupe, a déclaré qu’il « serait surréaliste de changer maintenant les règles », ajoutant que « tout le monde connaît les règles depuis longtemps, tout le monde a eu le temps de se préparer, et donc maintenant on fait la course ».

Est-ce à dire que Stellantis sera capable de respecter le nouveau seuil l’année prochaine ? Le constructeur pourra en tout cas compter sur le renforcement en cours de sa gamme électrique, ainsi que la sortie prochaine de 30 modèles hybrides sous 15 marques différentes. L’augmentation des ventes de voitures propres est sans aucun doute la voie à suivre pour éviter les sanctions. Stéphane Séjourné, le prétendant au poste de commissaire européen à la stratégie industrielle, a déclaré qu’il avait un « plan pour pouvoir accélérer la demande de véhicules, notamment sur les véhicules électriques dans les prochains mois. Il faudra le mettre en place assez rapidement », prévient-il.


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