Que ce soit dans les supports technologiques (atomes, photons, ions) ou dans les applications (développement d'algorithmes dédiés, plateforme de requête), l'informatique quantique est passée de quête du Graal à futur proche... Enfin, quelques années tout de même et pas pour votre salon !
Lundi 6 mars, IBM annonçait sa volonté de commercialiser un ordinateur quantique de 50qubits dans les prochaines années… En quelques heures l’annonce avait fait le tour du monde. En réalité, la firme américaine ne commercialiserait pas un ordinateur quantique, mais seulement les services de cet ordinateur, l’IBM Q, via une plateforme en ligne. L’offre n’en est pas moins intéressante. En attendant, IBM a déjà lancé l’année dernière sa plateforme « Quantum experience » dédiée aux développeurs et programmeurs qui peuvent tester des requêtes ou des algorithmes quantiques sur une base de 5qubit. Un beau succès puisque IBM évalue à 40 000 le nombre d’utilisateurs qui auraient soumis 275000 requêtes. Et l’Américain annonce pour cette année le passage à une nouvelle interface et un kit de simulation de 20qubits. Une offre que le Français ATOS a lui aussi annoncé pour 2017 avec notamment l’ouverture d’une plateforme de simulation de 40qubits. Le Français d’ailleurs espère lui aussi pouvoir commercialiser un ordinateur quantique dans les années qui viennent. Mais, attention, pour IBM, comme pour ATOS, il ne s’agit pas d’intervenir sur le marché de la cellule quantique (équivalent de la puce de nos ordinateurs), mais vers l’intégration, le développement de logiciels, de systèmes de réseaux etc. Pour ce qui est de la partie physique, il faut se tourner pour l’instant vers les acteurs de la recherche, encore très fondamentale, mais dont les publications viennent régulièrement alimenter le fantasme de l’avènement d’un réel ordinateur quantique universel…
Le premier ordinateur (hangar) quantique dans deux ans ?
Dans un article paru dans Science Advances de février, des chercheurs de Ion Quantum Technology de l’université du Sussex (Royaume-Uni) détaillent les plans de construction d’un ordinateur quantique universel à grande échelle. Ils espèrent avoir construit leur prototype d’ici deux ans (à condition de trouver les fonds, de l’ordre de 120 millions d’euros). Leur ordinateur ferait la modeste taille d’un bâtiment (100 fois 100 m2) mais serait capable de décrypter le chiffrement 1024 bits en une dizaine de jours et du 2048 bits en 110 jours abaissable à 10 jours si le taux d’erreur était encore diminué. Les technologies et les matériaux proposés pour construire cet ordinateur sont aujourd’hui disponibles. L’originalité du travail de cette équipe réside dans l’utilisation de l’électricité et d’un champ de micro-ondes constituant un “piège ionique” pour manipuler les ions en lieu et place des lasers couramment utilisés actuellement. Sachant qu’il faut autant de lasers que d’opérations à faire, le passage à une puce de quelques millimètres carrées activables par des tensions électriques est un grand pas en avant. Cette nouvelle technologie, mise au point par des chercheurs britanniques en collaboration avec des chercheurs israéliens avait été décrite en détail dans un article de Physical Rewiew Letters en novembre 2016, et disponible sur ArXiv.
Les avancées des calculateurs quantiques
Plusieurs solutions de calculs ont vu le jour ces dernières années, utilisant en partie des phénomènes quantiques. Le plus célèbre est l’ordinateur canadien D-Wawe dont la troisième version vient de sortir. Le D-Wawe 2000Q (pour 2000qubits), vendu pour 15 millions de dollars à Temporal Defense Systems, une entreprise de cybersécurité, est annoncé comme étant 1000 fois plus rapide que son prédécesseur le D-Wawe2X sorti en 2015. Mais les performances de ces ordinateurs sont sujettes à débat et surtout la technologie utilisée ne constitue pas un réel ordinateur quantique universel, c’est-à-dire capable de résoudre n’importe quel problème. Ce sont en fait des supercalculateurs dédiés à un type de tâche, généralement des algorithmes d’optimisation. Sur ce créneau, deux équipes, l’une japonaise et l’autre américaine avaient présenté dans le numéro de Science du 20 octobre 2016 des machines capables de résoudre des problèmes de physique statistique basés sur le modèle d’Ising. Leurs machines sont des hybrides alliant une partie quantique appliquée à des photons et une partie microprocesseurs classiques.
Par Sophie Hoguin
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