Depuis quelques mois c’est une course effrénée à coup d’annonces de futurs contrats, de délais ultra-courts, de concours de vitesse avec toujours plus de concurrents et de clients qui se manifestent. Dernier en date : la Chine qui prend officiellement le train en marche. Le 30 août 2017, la CASIC (China Aerospace Science and Industry Corp), l’un des principaux industriels du secteur spatial chinois a en effet annoncé avoir lancé la R&D pour le développement d’un système de transport ultra-rapide de type hyperloop pouvant atteindre à terme les 4000 km/h grâce à un vide total dans les tunnels. Baptisé HyperFlight, les capsules voyageraient dans des tunnels aériens ou souterrains et le réseau serait hiérarchisé en trois niveaux : un réseau régional utilisant des vitesses de 1000 km/h, un réseau national à 2000 km/h et un troisième, international à 4000 km/h. La CASIC aurait déjà déposé plus de 200 brevets sur ses recherches en cours.
Si vous avez loupé le début
L’idée d’un train ou d’une capsule propulsée dans un tunnel avec un vide partiel est développée de manière plus ou moins élaborée depuis le XVIIIe siècle (par exemple les trains atmosphériques dont la seule application efficace a été les tubes pneumatiques). Mais cette fois semble être la bonne. Elon Musk, le patron milliardaire de SpaceX et Tesla, propose l’idée de propulser des capsules dans des tubes à basse pression qui pourraient atteindre les 1200 km/h à l’été 2012. Un an plus tard, un livre blanc de près de 60 pages détaille le fonctionnement possible de l’Hyperloop et les options technologiques étudiées par les ingénieurs de Tesla et SpaceX. Le document est en libre accès à tout entrepreneur intéressé pour développer cette technologie et la commercialiser, mais le nom Hyperloop reste propriété de SpaceX. Depuis, plusieurs entreprises se sont lancées dans l’aventure.
HTT : des Américains qui parcourent le monde
Dès 2013, Dirk Ahlborn crée Hyperloop Transportation Technologies (HTT), une entreprise américaine qui va résolument se tourner vers l’Europe et le reste du monde. Si les travaux pour un tube à pleine échelle débute dès janvier 2016 à Quay West (Californie), HTT développe rapidement des partenariats et des accords pour des études de faisabilité un peu partout dans le monde. Sont ainsi prévus : un centre de recherche à Toulouse (pour profiter du savoir-faire aérospatial de la région), plusieurs études pour le développement de l’Hyperloop en Europe de l’Est à partir de la Slovaquie, une liaison entre Abou Dhabi et Al Ain (Emirats Arabes Unis), une liaison entre les villes de Amaravati et Vijaywada (Etat d’Andra Pradesh en Inde), des études à Jakarta (Indonésie) ou encore un accord avec la Corée du Sud et le KICT (Korea Institute of Civil Engineering and Building Technology) pour l’installation d’un tube à pleine échelle permettant d’étudier notamment le management de la sécurité. Relançant ainsi le plan de la Corée qui travaille sur son HyperTube Express qui relierait Séoul à Busan en 20 mn depuis 2011. Au niveau démonstration de faisabilité, HTT a pour le moment seulement présenté son projet de capsule. La construction, confiée au spécialiste de l’aéronautique espagnol Carbures, doit en être achevée pour 2018.
Hyperloop One : celui qui veut être le premier
Créé en 2014, Hyperloop Technologies qui deviendra Hyperloop One ne cesse de le clamer : nous serons les premiers. En 2016, l’entreprise américaine construit son site de démonstration dans le désert du Nevada, près de Las Vegas : le DevLoop. Deux essais s’y sont tenus cet été 2017 avec à la clé la démonstration de la faisabilité du concept sur de petits tronçons mais permettant de tester toutes les composantes : propulsion, freins, vide partiel et lévitation magnétique. La phase 2 s’est achevée avec une vitesse de 309 km/h sur 435 m avec le prototype de la capsule. Les trois dirigeants, Rob Lloyd, Shervin Pishevar et Josh Giegel estiment que cela va leur permettre d’accélérer les opérations de commercialisation. Spécialistes du buzz médiatique, Hyperloop One a déjà signé plusieurs accords de partenariats aux Emirats Arabes Unis, en Inde ou en Russie et fait parler d’elle à travers une opération originale : le « Global Challenge ». Les potentiels clients ont été invités à présenter les avantages économiques, sociaux et stratégiques de l’installation d’un hyperloop dans leur ville, région, pays et un jury se charge de choisir les meilleurs projets parmi les 2600 proposés. Trente-cinq projets ont été retenus début 2017 et les gagnants qui travailleront de manière privilégiée au développement de l’Hyperloop seront connus avant la fin de l’année.
Arrivo : arrivent ceux qui sont partis
Parmi les entreprises qui s’attaquent à l’Hyperloop, une petite nouvelle est née début 2017 : Arrivo. Fondée par Brogan BamBrogan, ex-cofondateur d’Hyperloop One, et trois autres transfuges après une série de plaintes pour harcèlement et népotisme contre Hyperloop One suivi d’une plainte de ces derniers pour violation des clauses de non-concurrence et non-dénigrement. Le règlement amiable du conflit a été gardé secret mais a abouti à la naissance d’Arrivo dont le siège est désormais basé à Los Angeles. Pour le reste, il faut maintenant qu’ils fassent leurs preuves.
Transpod : les canadiens pragmatiques des grands espaces
Transpod est une startup canadienne lancée fin 2015 qui développe son outil en Italie et au Canada principalement. Elle se prépare à effectuer ses premiers tests à Calgary et prévoit la construction d’une ligne de 4km pour achever la conception de son Hyperloop. Elle annonce une ligne entre Edmonton et Calgary pour 2019-2020 et envisage à terme de créer des tunnels avec vide total pour atteindre des vitesses de 3 à 5000 km/h. Leur force : les services proposés seraient 30 à 40% moins chers que leurs concurrents grâce à des coûts d’infrastructures inférieurs et une absence de communication à gros budget.
Concours d’étudiants : la foire aux technologies
L’Hyperloop Pod competition est un concours de conception de capsule pour l’Hyperloop lancé par SpaceX en 2015. Principalement ouverte à des équipes d’étudiants, cette compétition est l’occasion de voir s’affronter de nombreux essais de technologies différentes (par lévitation magnétique, par coussins d’air etc.) et parfois de transformer l’essai comme pour les gagnants de la deuxième étape, les Néerlandais de l’université de Delft qui ont depuis lancé leur propre entreprise Hardt Global Mobility avec des fonds de Uniiq et des chemins de fer néerlandais à hauteur de 600 000 euros. La deuxième phase du concours qui s’est tenue les 24 et 25 août 2017 sur le site de SpaceX consistait en un concours de vitesse où les Allemands de l’université de Munich avec leur WARR Hyperloop l’ont emporté avec une vitesse de 324 km/h. Record aussitôt battu par le pod pousseur de la compétition (les capsules des étudiants étaient propulsées à l’aide d’un pod pousseur) conçu par Tesla et SpaceX. Elon Musk a annoncé pouvoir dépasser les 500km/h dès le mois prochain.
Quand Elon Musk revient dans la course
Un essai pas complètement innocent. Si jusque là Elon Musk avait délaissé l’Hyperloop, Bloomberg écrivait le 4 août dernier que des proches affirment qu’il travaille finalement à développer son propre Hyperloop. Ses projets en la matière ne sont pas encore très clairs. Ce qui est sûr c’est qu’il compte bien creuser les souterrains pouvant accueillir des Hyperloop via son entreprise la Boring Company avec déjà l’annonce d’une liaison Washington/New York.
C’est l’ébullition tout autour du monde
C’est ainsi que la bouteille Hyperloop jetée à la mer en 2013 a relancé tous les projets similaires autour du monde. Aujourd’hui, tous les pays suffisamment développés se penchent sur la question de soutenir ou installer des réseaux de type Hyperloop. Cependant, il reste encore à cette technologie à faire la preuve de sa complète faisabilité, de sa fiabilité et de sa sécurité. C’est pourquoi d’aucuns doutent qu’un Hyperloop sera vraiment à votre porte en 2020.
Sophie Hoguin
Cet article se trouve dans le dossier :
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