Le think tank français des biotechnologies Adebiotech a organisé une journée dédiée à la biodégradabilité des plastiques en février. Objectifs : comprendre ce qu'est un plastique biodégradable, l'intérêt d'y recourir et identifier les facteurs qui contribuent à la biodégradation. Lumière sur ces matériaux, grâce aux présentations de deux chimistes participant au colloque.
« Le problème d’accumulation de plastiques dans l’environnement est essentiellement lié au fait que les matières plastiques conventionnelles ont une durée d’utilisation extrêmement restreinte par rapport à leur biodégradation, analyse Emmanuelle Gastaldi, professeure associée à l’Université de Montpellier. Dans ce contexte, les plastiques biodégradables pourraient apparaître comme une option de fin de vie pertinente. »
Il existe pour l’instant quelques normes de biodégradabilité privées. Toutefois, Emmanuelle Gastaldi souligne qu’il faut considérer ces normes avec précaution. « On a besoin de normes qui fixent des seuils et des durées de biodégradation, mais les conditions accélérées ne sont pas les conditions réelles de l’environnement, rappelle-t-elle. Nous sommes incapables de prévoir la biodégradation d’un plastique dans l’environnement car on ne connaît pas assez les mécanismes de biodégradation dans tous les organismes, on ne connaît pas les interactions avec le milieu, donc il faut avancer dans la recherche pour mieux modéliser les choses. »
Qu’est-ce qu’un plastique biodégradable ?
« La propriété de biodégradable se réfère à un polymère ou un matériau qui peut être métabolisé par la microfaune et la microflore de l’environnement, ce qui veut dire que son carbone peut être utilisé dans des conditions précises, explique Emmanuelle Gastaldi. Il est important de préciser les conditions associées à cette biodégradation. »
Les polymères présentent différentes liaisons et fonctions chimiques suivant leur nature. On retrouve par exemple des liaisons carbone – carbone pour les polyoléfines, des liaisons esters pour les polyesters, ou encore des liaisons amides et osidiques pour d’autres types de plastiques. « Ces liaisons vont être ou non reconnues par certains enzymes excrétés par les microorganismes de l’environnement, détaille Emmanuelle Gastaldi. C’est cette capacité à être ou non reconnu et donc coupé ou non qui va être fondamentale pour différencier les matériaux qui seront facilement biodégradables dans des conditions naturelles ou pas. »
Comment un plastique se biodégrade-t-il ?
Anne-Marie Delort, directrice de recherche au CNRS à l’Institut de Chimie de Clermont-Ferrand, explique les mécanismes en jeu. Si la biodégradation est un mécanisme biologique, elle s’accompagne de mécanismes physiques et chimiques. Il y a d’abord la fragmentation, une dégradation assez superficielle suite à des phénomènes d’érosion, qui ne va pas changer la nature, la longueur et la taille des polymères. Ensuite, la dégradation va couper les chaînes polymères. « Il y a deux grands types de mécanismes : des mécanismes d’hydrolyse et d’oxydation qui vont arriver à des chaînes polymères de plus en plus courtes qui vont pouvoir éventuellement servir de substrat aux microorganismes », avance Anne-Marie Delort. Enfin, l’assimilation de ces polymères amène à la production de méthane en absence d’oxygène ou de CO2 en présence d’oxygène.
De nombreux paramètres du milieu et du matériau influencent la biodégradabilité d’un polymère. Citons la température, l’oxygène, les UV, la nature et la quantité des microorganismes, l’humidité, le pH… Ajoutons la turbulence, la composition chimique du matériau, les propriétés de surface, sa rugosité, sa cristallinité… Et enfin les propriétés thermiques, la surface spécifique du matériau, sa forme et son épaisseur. « Pour évaluer la biodégradabilité d’un plastique, on peut regarder comment le polymère se modifie, comment les caractéristiques de ce polymère évoluent, comment il est colonisé par les microorganismes, caractériser la formation et la dégradation des oligomères et regarder ce qu’il se passe à l’intérieur de la cellule pour évaluer la présence des métabolites microbiens afin de montrer la bio-assimilation », détaille Anne-Marie Delort.
Enfin, quelle est la différence entre un plastique biodégradable et compostable ? « Le mot compostable se réfère à un objet qui va être capable de se biodégrader dans des conditions de compostage normalisées et qui va répondre à d’autres exigences spécifiques en termes de désintégration, de composition et d’écotoxicité de ses produits de biodégradation », prévient Emmanuelle Gastaldi.
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