L’Europe sera-t-elle le premier continent neutre en carbone en 2050 ? Après l’adoption de cet objectif par les chefs d’État et de gouvernement de l’Union européenne, à l’exception de la Pologne, cela pourrait être le cas. C’est en tout cas l’ambition de la Commission européenne à travers son Pacte vert pour l’Europe défendu par sa présidente Ursula von der Leyen. «Il décrit comment transformer notre mode de vie et notre façon de travailler, de produire et de consommer afin de vivre en meilleure santé et de rendre nos entreprises innovantes», défend-elle. «Notre plan établit la marche à suivre pour réduire les émissions, rétablir la santé de notre environnement naturel, protéger notre flore et notre faune sauvages, créer de nouvelles opportunités économiques et améliorer la qualité de vie des citoyens», renchérit le vice-président exécutif Frans Timmermans.
Un Pacte Vert global pour toute l’économie
La promesse : ce Pacte vert pour l’Europe transformera tous les domaines de l’économie. Au programme, une série de mesures par secteur en vue d’atteindre la neutralité carbone en 2050. Sont concernés les transports, l’énergie, l’agriculture et l’alimentation, les bâtiments et l’industrie. Des mesures concernent aussi une meilleure protection du capital naturel et de la biodiversité, ainsi que la diminution des pollutions.
Toutes ces évolutions à venir se dotent d’une stratégie spécifique. En premier lieu, la Commission présentera d’ici mars prochain une loi sur le climat pour inscrire en droit l’ambition de neutralité carbone en 2050. Elle sera complétée d’un plan visant à porter l’objectif de réduction intermédiaire en 2030 à au moins 50 % d’ici l’été 2020. Dès janvier, la Commission proposera la mise en place d’un mécanisme de «transition juste» de 100 milliards d’euros. Il accompagnera et soutiendra les régions les plus exposées aux politiques de conversion, notamment les régions charbonnières.
Des feuilles de routes dans tous les domaines de l’UE
Viendront également une stratégie en faveur de la biodiversité à l’horizon 2030, une nouvelle stratégie industrielle, un nouveau plan d’actions en faveur de l’économie circulaire, une stratégie «de la ferme à la table», des propositions pour un Europe sans pollution et une stratégie de financement vert au troisième trimestre 2020. La Commission installera aussi une «commission géopolitique» visant à inclure les questions climatiques et environnementales dans les accords commerciaux et la coopération bilatérale. Un mécanisme d’ajustement aux frontières européennes est par ailleurs sur la table pour surenchérir le coût des produits importés.
Côté mobilité, la Commission souhaite étendre le système communautaire d’échange de quotas d’émission (SCEQE) au secteur maritime et réduire les quotas gratuits pour les compagnies aériennes. Elle souhaite aussi réviser les normes d’émissions de CO2 pour les voitures et les camionnettes d’ici 2021.
Pour atteindre ces objectifs, la Commission présentera début 2020 un plan d’investissements spécifique. Elle devrait consacrer au moins 25 % de son budget à long terme à l’action pour le climat. La Banque européenne d’investissement (BEI) et le secteur privé viendront en soutien.
Les ONG attendent le détail et veulent aller encore plus loin
Le WWF salue l’accord, mais attend des engagements concrets au Conseil européen de juin prochain. Pour le Réseau Action Climat, «si beaucoup de paramètres restent à définir, le Green Deal identifie les bons chantiers à ouvrir». En particulier, l’ONG demande de mobiliser l’ensemble du budget européen – 1 300 milliards d’euros entre 2021 et 2027 – pour soutenir la transition juste. «Le respect des objectifs climatiques devrait être un critère aussi contraignant que les règles sur la dette et le déficit publics» propose le réseau associatif.
Les ONG s’accordent toutefois sur le fait que l’ambition actuelle pour 2030, à savoir une réduction de 40% des émissions de gaz à effet de serre, est insuffisante. Le Pacte Vert propose de relever cette ambition entre 50 % et 55 %, mais cela resterait insuffisant. En effet, afin de limiter le réchauffement climatique à 1,5°C d’ici 2100, l’objectif de réduction devrait être de -65% en 2030. Les ONG appellent donc l’UE à relever cet objectif d’ici mars 2020, comme le prévoit l’Accord de Paris, pour être leader de la lutte mondiale contre le changement climatique.
«Les objectifs retenus sont incompatibles avec les dernières recommandations scientifiques, estime Clément Sénéchal, chargé de campagne Climat à Greenpeace France. L’Union européenne doit réduire ses émissions de gaz à effet de serre d’au moins 65% d’ici 2030 soit bien plus que la réduction de -50% à -55% proposée. Elle doit atteindre la neutralité carbone en 2040 au plus tard – et non pas en 2050».
Cet article se trouve dans le dossier :
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