Le premier signalement d’iode 131 s’est déroulé dans l’extrême nord de la Norvège. Puis, d’autres détections ont été relevées en Finlande, Pologne, République Tchèque, Allemagne, France et Espagne jusqu’à la fin du mois de janvier. Ces données proviennent d’un réseau d’échange européen informel, dénommé « Ring of Five », entre organismes en charge de la surveillance radiologique de l’atmosphère. Ils disposent d’une centaine de sites de mesure répartis sur l’ensemble du continent.
L’Europe contaminée ?
En France, les niveaux détectés sont situés entre 0,10 et 0,31 microbecquerels par mètre cube d’air (µBq/m3). Ces analyses ne portent cependant que sur la fraction particulaire qui se fixe sur les aérosols. Celle-ci est captée par les filtres des appareils de mesure. La concentration dans la fraction gazeuse est « généralement 3 à 5 fois plus concentrée », explique l’Institut de radioprotection et de sûreté nucléaire (IRSN). Le niveau en iode 131 total (gaz et aérosol) n’a donc pas dépassé 1,5 µBq/m3 en France. La teneur la plus élevée a été décelée en Pologne, à 5,92 µBq/m3 dans la fraction particulaire.
« Ces niveaux sont sans aucune conséquence sanitaire », assure l’IRSN. La Commission de Recherche et d’Information Indépendantes sur la Radioactivité (Criirad) précise que dans la Vallée du Rhône, les retombées de Fukushima étaient environ 10.000 fois supérieures à celles mesurées en janvier 2017 sur la France. En mars et avril 2011, la Criirad avait mesuré à Valence, des valeurs de plusieurs millibecquerels par m3. Et le niveau des retombées du nuage de Tchernobyl qui avait traversé la France en 1986 étaient des dizaines de millions de fois supérieurs.
Un pic de pollution à l’iode ?
La radioactivité de l’iode 131 baisse de moitié tous les 8 jours, ce qui suppose que le rejet est relativement récent. Alors, qui est responsable de ce la présence de ce radionucléide ? L’IRSN déclare que l’on n’en connait pas la source. Simplement, l’IRSN tient à préciser que « les conditions météorologiques défavorables liées notamment à des inversions de température ont vraisemblablement participé au niveau de concentration de ce radionucléide ».
En somme, alors que l’on observait les épisodes de pollution par les particules fines en début d’année en Europe, les poussières stagnantes dans les basses couches de l’atmosphère accumulaient l’iode 131. En Europe et dans ses pays voisins, de nombreuses installations sont autorisées à rejeter de l’iode 131 en faibles quantités dans l’atmosphère. Il s’agit notamment des installations liées à la production d’électricité d’origine nucléaire et des usines de production de radioéléments à usage radiopharmaceutique ou radiothérapeutique. Il n’y aurait donc pas eu de rejets supplémentaires. Simplement, la concentration aurait augmenté en absence de dilution atmosphérique.
Pas d’accident nucléaire ?
Néanmoins, la blogosphère n’a pas attendu pour relier ces taux à l’accident sur le réacteur de recherche atomique de Halden, en Norvège, en octobre dernier (voir par exemple ici). La Criirad souhaite rassurer. « Il n’y a pas à notre connaissance d’incident ou accident nucléaire actuellement en Norvège et les stations de mesure […] ne montrent pas actuellement de radioactivité anormale en Norvège ou sur les pays proches », affirme-t-elle dans un communiqué. L’accident d’octobre 2016 a bien rejeté 150 millions de becquerels pour l’iode 131, selon les autorités norvégiennes. Pour autant, « les stations de mesure de l’iode 131 sous forme particulaire situées à Osteras, à une centaine de kilomètres au nord-ouest de Halden et à Arland, à 500 kilomètres au nord, n’avaient pas mis en évidence d’impact mesurable », assure l’organisme indépendant.
Si la Criirad affirme que « rien ne permet de faire le lien » entre ces deux événements, elle préconise la réalisation d’analyses indépendantes au voisinage du réacteur de Halden afin d’évaluer les niveaux d’exposition des riverains. « L’hypothèse des mauvaises conditions météorologiques est la plus probable, estime la Criirad Toutefois, le faible nombre de points de mesure ne permet pas d’exclure l’existence de rejets anormalement élevés d’une ou plusieurs installations ».
Par Matthieu Combe, journaliste scientifique
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