Galitt est spécialisée dans les conseils et les services en systèmes de paiement et de transactions électroniques sécurisées. Cette entreprise fournit des logiciels de test de renommée mondiale et développe des solutions de paiement spécialisées. CEO de Galitt depuis novembre 2019, Pierre Lahbabi connait bien les problématiques de paiement et de sécurité. Diplômé de l’École Polytechnique et de L’École des Mines, il a acquis une solide expérience dans la stratégie et l’innovation dans les domaines du paiement et la sécurité numérique, au sein du groupe BNP Paribas puis comme directeur de la stratégie chez MORPHO, une ancienne filiale de sécurité et d’identité du groupe Safran.
Techniques de l’Ingénieur : pourquoi les Banques centrales se lancent-elles (ou y réfléchissent) dans des projets de monnaies numériques ?
Visa a également déposé fin 2019 une demande de brevet auprès de l’Office américain des brevets et des marques (USTPO) pour une « monnaie fiduciaire numérique » (« Digital fiat currency »). Quel est son objectif ?
Visa mais aussi MasterCard se positionnent sur tous les projets disruptifs qui pourraient remettre en cause leur business model. À long terme, la monnaie numérique sera peut-être une menace pour eux. Mais pour l’instant, leur principale crainte concerne l’usage des API et l’open banking, avec des paiements qui se passent de cartes bancaires. Une « Application Programming Interface » (interface de programmation applicative) agit comme un ensemble de fonctions informatiques par lesquelles deux logiciels vont interagir. Elles peuvent permettre de se connecter directement à son compte bancaire via une application et réaliser une transaction, sans passer par l’utilisation d’une carte.
Sur quelles technologies les Banques centrales peuvent-elles s’appuyer ?
Toutes les initiatives s’appuient sur une blockchain qui est une technologie de registre distribué. Elle permet d’avoir une trace de toutes les transactions enregistrées dans une blockchain. Mais concernant les paiements, cette blockchain devra avoir des caractéristiques précises pour être en temps réel et accepter un nombre très élevé de transactions.
L’Euro digital pourrait-il être utilisé par le grand public ?
Oui. Le recours à une blockchain sera transparent. L’objectif est de permettre des achats sur des sites de e-commerce ou de transférer de l’argent à un membre de sa famille. Comme pour l’Euro classique, ce seront les banques centrales qui définiront les règles pour l’Euro digital. Mais on ne sait pas encore si des acteurs privés (outre Facebook, on peut penser à Amazon et à Alibaba, son équivalent chinois, NDLR) lanceront eux aussi de telles monnaies. Leur présence pourrait être problématique sauf si leurs monnaies virtuelles sont limitées à un écosystème précis. Par exemple pour le Libra, son usage pourrait être restreint à des achats sur Facebook, ses filiales (Instagram, Whatsapp) et quelques partenaires.
Lorsqu’on évoque les transactions électroniques, on pense immédiatement à leur sécurité. Les fraudes ne seront-elles pas plus importantes ?
Les fraudes existent déjà avec les moyens de paiement actuels, surtout sur Internet. L’objectif d’un projet comme l’Euro digital serait de mettre en place une approche capable de limiter la fraude. Il s’agirait de concevoir, dès le départ, un instrument présentant toutes les garanties de sécurité et pour la protection des données. À titre d’exemple, l’environnement des paiements par carte en magasin est bien maîtrisé : on utilise un terminal de paiement très sécurisé et le consommateur doit taper un code. Pour revenir aux monnaies numériques, il s’agirait aussi de mettre en place un écosystème maîtrisé. La blockchain est au final une technologie assez fiable. Toutes les affaires de fraudes aux bitcoins étaient dues soit à des plateformes peu scrupuleuses ou pas assez professionnelles pour assurer les transactions. Autre maillon faible : des portefeuilles de Bitcoin qui étaient mal sécurisés. Avec l’Euro digital, il y aura des plateformes agréées.
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