Du 20 au 23 janvier 2016, la petite station de ski suisse de Davos, désormais mondialement célèbre, accueillait une fois de plus, le forum économique mondial (WEF pour l’acronyme anglais). Les représentants des 10% de la population qui détiennent 90% des richesses et des pouvoirs de la planète, sont là pour réfléchir à l’état du monde et aux perspectives économiques. Pour cette édition, les quelques 2500 participants ont planché sur la « 4ème révolution industrielle ».
C’est quoi la « 4ème révolution industrielle « ?
Klaus Schwab, ingénieur et économiste allemand et surtout, président et fondateur du WEF, a posé la définition et les contours de ce qu’il appelle la 4ème révolution industrielle dans une présentation publiée le 14 janvier 2016 sur le site du WEF. Elle reprend les grandes lignes de son propos développé dans le livre éponyme (The fourth industrial revolution). Pour lui, elle est caractérisée par « la fusion de technologies qui brouillent les lignes entre les mondes physiques, numériques et biologiques ». Et, affirme-t-il, si cette 4eme révolution s’appuie sur la troisième, qui était celle de l’automatisation, de l’informatique et de l’électronique, elle s’en démarque par sa vitesse exponentielle, son ampleur (elle touche presque toutes les activités) et l’impact qu’elle a sur les systèmes de production, de management et de gouvernance. Elle prend la forme de multiples nouvelles technologies ou innovations : des objets connectés à l’impression 3D, de l’intelligence artificielle au Big Data en passant par les nanotechnologies ou l’informatique biologique.
Vers l’inconnu et au-delà ?
Face à la montée de toutes ces nouvelles technologies, on peut vite être pris de tournis. Et Euronews de citer par exemple, ce chef d’entreprise indien : « J’ai peur, je me demande si cela ne va pas trop vite ? » Car tous ces progrès techniques ouvrent des possibles capables de redéfinir l’humain et son rapport au monde de manière profonde : quid du contrôle des robots intelligents, des puces greffées directement dans le corps, des nanomatériaux, des données. Ce cyber-monde qui se dessine est porteur de plusieurs déséquilibres majeurs dans les modèles de sociétés actuelles.
Chômage de masse, menace sur la classe moyenne
Même si les économistes ne parlent pas tous d’une seule voix, nombre d’entre eux sont pessimistes quant à l’évolution de l’emploi face à la robotisation et à la numérisation de la production et des marchés. Des disparitions d’emplois massifs (de plusieurs millions à 40% dès 2030 selon les estimations) affecteraient non seulement les postes de production classiques de la robotisation mais aussi des métiers plus qualifiés de fonctionnaires, chauffeurs, du médical etc. D’autant que la numérisation du marché du travail rend encore plus fragile les travailleurs peu qualifiés soumis à une compétition accrue et à une dislocation des collectifs de travail. Dès lors, c’est tout un pan des classes moyennes qui est menacé de paupérisation. A la clé des conflits sociaux majeurs pourraient voir le jour.
Dans l’attente de décisions politiques ?
Si les puissants tremblent face aux nouvelles technologies, c’est surtout qu’elles rendent impossible de prévoir avec certitude le monde de demain, et donc impossible de s’assurer d’en avoir encore le contrôle pour préserver pouvoirs et privilèges. Même si jusqu’à présent, les riches ne cessent de s’enrichir quand les pauvres s’appauvrissent (voir le rapport de l’Oxfam sur ce sujet.
Kemal Dervis, ancien directeur du Programme des Nations Unies pour le Développement estime que le politique doit jouer son rôle de régulateur et ne pas laisser les marchés gérer seuls ces bouleversements. Mais les solutions socio-politiques ont été abordées plutôt timidement à Davos que ce soit pour évoquer la mise en place de revenus permanents de base, d’investissements dans les biens publics ou de coopération multilatérale. Et à ce jour, le monde politique semble, lui, trembler bien plus réellement devant cette 4ème révolution. Alors, sera-t-on capables d’inventer un nouveau contrat social sans passer par la case de l’autoritarisme et du repli identitaire ?
Par Sophie Hoguin
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