Cap Canaveral, 3h50, heure locale. 2 mars 2015. Le seizième lanceur Falcon 9 décolle avec à son bord deux satellites, Eutelsat 115 West B et ABS-3A, les premiers d’une nouvelle famille. Car ces satellites mis au point par Boeing possèdent une particularité qui pourrait bien révolutionner une partie du secteur spatial : leur système de propulsion est 100 % électrique ! Sur le même principe que la propulsion chimique, des produits sont éjectés pour obtenir la poussée. Les satellites Eutelsat utilisent chacun quatre propulseurs ioniques à grille Xips 25 grâce auxquels ils pourront passer de l’orbite d’injection à leur orbite opérationnelle. Cette nouvelle génération « tout électrique » présente l’avantage d’abaisser les coûts. En effet, la nouvelle plateforme de Boeing à propulsion entièrement électrique a permis de réduire de près de 2 tonnes la masse des satellites. Or, chaque kilo en moins, c’est potentiellement 20 000 € d’économiser. Mais c’est aussi la possibilité de lancer les satellites deux par deux, soit une diminution des coûts de lancement d’environ 20 %.
Le gain de poids peut donc être directement converti en gain financier, mais il peut aussi permettre d’augmenter la charge utile. Deux avantages qui ont poussé Boeing à se lancer dans l’aventure du 100 % électrique. Un choix loin d’être évident car malgré les économies réalisées, la propulsion électrique présente l’inconvénient d’une faible poussée, et donc des manœuvres de mise à poste bien plus longues qu’avec une propulsion chimique. Ainsi, les deux satellites Eutelsat et ABS mettront entre 6 et 8 mois à se positionner sur leur orbite géostationnaire, une étape qui n’aurait duré qu’une semaine en utilisant du carburant. De plus, leurs propulseurs ne seront pas mis sous tension immédiatement, il faudra attendre quelques jours que les satellites aient totalement dégazés. Une étape là encore plus longue puisqu’elle survient en quelques heures pour les satellites classiques. Mais ces délais rallongés n’effraient ni ABS ni Eutelsat qui prévoient d’envoyer d’autres satellites à propulsion électrique dont l’un, construit par Airbus, aura une durée de mise à poste déjà divisée de moitié puisqu’il atteindra son orbite en seulement 4 mois.
Par Audrey Loubens