Suite à la catastrophe d’AZF en 2001, le gouvernement a décidé la mise en place du Plan de Prévention des Risques Technologiques (PPRT). Ainsi, la mise en application de la loi n° 2003-699 du 30 juillet 2003 prévoit la mise en place de ces PPRT, au nombre de 421 en France (670 établissements industriels sont concernés).
C’est autour de ce thème qu’était axé le dernier Jeudi du CNRI, qui s’est tenu le 7 avril à Bourges. La première table ronde a permis aux intervenants, devant un public de professionnels et d’étudiants venus nombreux, d’expliciter les fondements des PPRT et leurs justifications sur le terrain.
Au final, l’objectif est de résoudre des situations délicates en matière d’urbanisme et de sécurité des personnes et des habitations. Sont concernés par les PPRT uniquement les établissements industriels SEVESO à hauts risques. Comme on a pu le constater lors de cette première table ronde, les PPRT sont à l’origine de conflits locaux, et le dialogue entre les partis est plus que jamais nécessaire.
C’est Laurent Levent, chef du BRTICP (bureau des risques technologiques et des industries chimiques et pétrolières), rattaché au Ministère de l’Ecologie, du développement durable, des transports et du logement, qui a rappelé l’importance de la mise en place des PPRT, et leur prégnance sur les autres formes de normes, précisant que « le PPRT s’impose sur les documents d’urbanisme, l’objectif unique étant la sécurité des personnes ».
Tout en évoquant les réflexions toujours en cours au Ministère et l’avancée des PPRT, Mr Levent a rappelé qu’au moins 50 % des PPRT ne feront pas l’objet de mesures foncières, et que malgré les efforts déployés par le Ministère, des moyens restent à déployer, notamment en termes de financement.
A la suite du Ministère, ce sont les voix des acteurs concernés directement par les PPRT que l’on a pu entendre. Du côté des industriels d’abord. Pierre Vialtel est Responsable HSE au sein du groupe Rubis Terminal, qui stocke 120 000 m3 d’hydrocarbures (25 % des besoins de la région) sur un site près de Brest. Pour lui, l’identification des scénarios les plus problématiques est à mettre au crédit des PPRT : « il s’agit d’une avancée importante ». Cependant, Pierre Vialtel critique la démarche, selon lui trop probabiliste, et qui a le défaut d’exclure certains phénomènes dangereux, la rendant incohérente avec les études de danger sur certains points particuliers. Mr Vialtel a également insisté sur les problèmes induits par la mise en place des PPRT : « l’entrée en vigueur des PPRT a incontestablement été un frein au traitement des demandes de modifications déjà en cours. Aussi, l’impossibilité de faire évoluer les sites à l’avenir induite par les PPRT est inacceptable, tout comme la désorganisation des sites industriels, trop sollicités par le processus, et sans compensation de la part des services de l’état ».
Mr Vialtel, en conclusion, a appelé à agir avec concertation et sans empressement : « A mon avis, il est urgent de ne pas se presser. L’état a des délais à tenir, mais cela ne doit pas le pousser à agir dans la précipitation ». Philippe Pradere, Directeur Industriel de la STCM (Société de Traitements Chimiques des Métaux), mettait quant à lui en avant les latences persistantes entre les décisions foncières liées aux PPRT et les financements induits : « La convention de financement doit être signée à priori un an après le PPRT… cela reste pour le moment très théorique ».
Gérard Perrotin, administrateur de l’association AMARIS, est intervenu pour mettre en exergue les difficultés rencontrées par les citoyens concernés par les PPRT. En effet, les habitations proches de sites SEVESO sont directement concernées, pour des raisons de sécurité. Les habitants sont alors contraints de rénover leurs logements pour les mettre aux normes. Ces travaux, lourds, peuvent par exemple consister à installer des fenêtres résistantes aux explosions. Ces aménagements sont variables, et sont logiquement de plus en plus onéreux à mesure que l’habitation concernée est proche du site SEVESO.
Sans remettre en cause le bien fondé ces nouvelles obligations, Gérard Perrotin a mis en avant la difficulté, pour les habitants, de faire effectuer les travaux nécessaires, souvent très onéreux, alors que les conventions de financement n’étaient pas finalisées. En effet, depuis la mise en route des PPRT, seules trois conventions tripartites ont été signées. Tout en concédant ces difficultés et un certain retard à ce niveau, Laurent Levent a tenu à réaffirmer les engagements pris et la nécessité de continuer à avancer sur tous les PPRT, malgré les difficultés.
Quoi qu’il en soit, les discussions entre les différents acteurs ont permis au public présent de mieux comprendre les éléments de blocage dans l’avancée des PPRT, et la nécessité de maintenir le dialogue entre les différentes parties prenantes.
P.T
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