L’examen du projet de loi sur la transition énergétique commence aujourd’hui à l’Assemblée Nationale. Il comprend un amendement voté en commission spéciale de l’Assemblée en fin de semaine dernière pour anticiper l’interdiction des pesticides de 4 ans.
L’anticipation de l’interdiction « est techniquement réalisable car elle ne porte que sur les espaces verts et les promenades ouvertes au public, surfaces pour lesquelles il existe des solutions alternatives à l’emploi des pesticides chimiques« , explique le Gouvernement. Ces produits alternatifs sont les produits autorisés en agriculture biologique, les produits de bio-contrôle et les produits à faible risque. Les pesticides resteront toutefois autorisés en cas d’urgence sanitaire. La loi ne concerne pas les espaces verts le long de la voirie, des voies ferrées, des pistes d’aéroport ou encore dans les cimetières qui pourront encore être traitées par des pesticides.
Les fabricants d’intrants réagissent vivement
Face à cette anticipation, l’Union des entreprises pour la protection des jardins et des espaces publics (UPJ) n’a pas attendu longtemps pour faire entendre sa voix. Cette entité regroupe aujourd’hui 34 fabricants de produits destinés aux jardiniers amateurs ou aux professionnels des espaces publics. On y retrouve les géants de l’agrochimie Bayer SAS, Dow Agrosciences et Syngenta. Pas étonnant donc qu’ils essayent de faire jouer de leur influence pour expliquer que cet amendement est un non sens.
Dans un long communiqué, l’UPJ explique que « l’amendement du Gouvernement qui vise à interdire les produits phytopharmaceutiques aux collectivités locales en décembre 2016 n’a pas fait l’objet de concertation avec les professionnels du secteur« . Selon cette union de professionnels, le secteur risquerait de ne pas avoir le temps de s’adapter et près de 2 000 emplois seraient menacés. Si les pesticides sont interdits, des « milliers d’emplois directs sur tout le territoire » seraient menacés et les budgets des municipalités pour l’entretien des espaces verts se trouveraient multipliés par près de cinq. De plus, selon l’UPJ, « cet amendement n’a rien à voir avec la transition énergétique, les solutions de remplacement (désherbage thermique, vapeur) présentant un bilan énergétique négatif dans toutes les études« .
L’UPJ défend sa bonne foi. En effet, les PME du secteur ont déjà fait des efforts pour diminuer les intrants. Pour répondre au plan Ecophyto 2018 du ministère de l’Agriculture, la filière a déjà diminué le recours aux pesticides, en passant de 1 200 à 700 tonnes de produits en quelques années. Mais faut-il réellement s’arrêter là ? Ne peut-on pas imaginer avoir des espaces verts plus sauvages et laisser plus de « mauvaises herbes »? Car un espace vert public ne doit pas forcément être un massif constitué de fleurs et arbres poussés en pots; plusieurs communes l’ont déjà compris.
Par Matthieu Combe, journaliste scientifique
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