Une des modifications majeures concerne l’accès à des dizaines de milliers de termes précédemment interdits et réservés : des expressions correspondant à des crimes, des infractions, des organismes internationaux, des pays, des professions réglementées, des protocoles Internet, des mots de la santé, des structures, des valeurs, des termes étatiques, tout comme les 36 682 noms de communes.
Or, tous ces termes peuvent se révéler fort intéressants. Dior pourrait déposer poison.fr, Longchamp acquérir longchamp.fr (un village des Vosges), La Poste faire main basse sur cheminot.fr (une commune en Moselle). Une concurrence exacerbée pourrait même voir le jour sur les noms communs comme bar.fr, bouteille.fr…
Un décret pour définir l’intérêt légitime
Mais attention, l’accès à ces .fr débloqués ne se fera pas à la hussarde. L’Association française pour le Nommage Internet en Coopération (Afnic) attend la parution d’un décret passé devant le Conseil d’Etat le 21 juin, dont la publication doit intervenir avant le 30 juin 2011.
Ce décret donnera la définition de deux notions clés : l’intérêt légitime et la mauvaise foi. Ces éléments seront étudiés pour chaque attribution. Dans un forum organisé à ce sujet, l’Afnic a précisé « qu’un intérêt légitime peut être un droit (raison sociale, marque, nom patronymique) mais également un intérêt plus personnel (site, services, etc.) »
Techniquement, les demandes pour ces .fr particuliers se feront auprès des bureaux d’enregistrement (registrar) qui demanderont un code d’autorisation auprès de l’Afnic via un formulaire en ligne dans leur extranet. D’après l’Afnic, « ce formulaire sera assez simple mais suffisamment étayé par des informations susceptibles de permettre l’attribution sans demander de pièces complémentaires, ni signature. Le bureau d’enregistrement disposera d’un délai pour fournir les pièces complémentaires nécessaires. Le site de l’Afnic proposera un tableau avec l’état des demandes. Une fois le code d’autorisation obtenu par le bureau d’enregistrement, ce dernier devra l’utiliser dans les quinze jours ; à défaut, la demande sera abandonnée et l’Afnic étudiera la demande suivante en attente sur le même terme. » L’attribution du code d’autorisation se fera sur la base du premier arrivé, premier servi.
Halte à la spéculation
Par ailleurs, l’Afnic met en garde contre une éventuelle spéculation autour de ces noms. S’il y a une revente (opération de transmission volontaire), l’Afnic devra « l’autoriser dans les mêmes conditions que la création d’origine compte tenu du statut réservé du nom ; le nouveau demandeur devra justifier des mêmes critères ».
Les communes ont jusqu’au 30 juin 2011 pour déposer leurs noms réservés dont certains ont une valeur économique forte. La définition de l’intérêt légitime par le décret sera étudiée avec attention.
Par Jean-François Poussard
Depuis 2004, Jean-François Poussard est un spécialiste du marché des noms de domaine. Il en maîtrise l’ensemble des enjeux transversaux : juridique, marketing, communication, référencement, technique et administratif. Il conseille les plus grandes sociétés françaises et européennes dans leur stratégie mondiale de dénomination.
Au printemps 2010, il rejoint l’agence internet Systonic pour y diriger le nouveau département sur les noms de domaine, baptisé Prodomaines.
Il promeut également la plate-forme Keep Alert de Systonic, qui surveille les noms de domaine, les réseaux sociaux, les régies publicitaires (Google Adwords), le plagiat de contenu, etc. afin d’aider les marques contre des agissements frauduleux (cybersquatting, détournement de trafic et de notoriété…).
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