Une étude parue dans la revue PNAS contredit la croyance selon laquelle les microfissures générées quand un matériau fragile rompt ralentissent la fracture.
En effet, les efforts conjoints de chercheurs du CEA-IRAMIS et des laboratoires SVI (CNRS/Saint-Gobain) et LTDS (CNRS/Ecole Centrale de Lyon/Ecole Nationale d’Ingénieurs de Saint-Etienne) ont permis de mesurer la vitesse de propagation des microfissures générées par une rupture rapide dans du plexiglas®. Alors que la théorie prévoit une vitesse de Rayleigh d’environ 900m/s, les fronts de fissure se déplacent à seulement 200m/s, soit quatre fois moins que prévu. De plus, toutes les microfissures évoluent à la même vitesse, indépendamment de la force appliquée pour ouvrir la fissure.
Pour obtenir ce résultat, ces scientifiques ont imposé une force dans du plexiglas® de façon à rompre ces échantillons. Ils ont ensuite analysé par microscopie optique la surface de rupture et plus particulièrement les empreintes laissées par les microfissures. À partir de la géométrie du réseau d’empreintes, un nouvel algorithme développé et utilisé spécifiquement pour cette étude a permis de déterminer le point origine de chacune des microfissures, la chronologie de leurs naissances, et enfin la vitesse à laquelle chacune s’est développée. L’enjeu étant de déterminer à quelle vitesse va grandir la fissure pour un jeu de contrainte donné.
« Nous savions déjà que le formalisme existant était faux. En effet, plusieurs études ont déjà mis à mal sa prédiction en mesurant que la fissure macroscopique, c’est-à-dire celle visible à l’œil nu, n’évoluait qu’à 500 m/s, soit près de deux fois moins vite que prévu » rappelle Daniel Bonamy, ingénieur chercheur au CEA Saclay.
« Cette fois, nous allons plus loin en observant que la vitesse d’un front isolé d’une fissure va quatre fois moins vite que ce que prévoit la théorie. » s’enthousiasme-t-il. Ainsi, alors que la communauté scientifique croyait que les microfissures ralentissaient la fissure par dissipation d’énergie, il apparait que ces dernières l’accélèrent, soit tout le contraire ! « Nous pensons qu’en fait, la vitesse de fissuration apparente est liée à la coalescence des microfissures avec la fissure principale. » explique Daniel Bonamy.