62% des Français soupçonnent les chercheurs de se laisser influencer par les lobbies industriels, 68% estiment qu’ils nous cachent la vérité sur les OGM et ils ne sont que 53% à leur faire confiance «pour dire la vérité si jamais certaines de leurs recherches pouvaient avoir des répercussions sur la santé ». Quelle image désastreuse des scientifiques. D’autant que paradoxalement, les Français sont 63% à considérer que la science et la technologie sont bénéfiques.
La science, oui, les scientifiques, non ! Voilà en résumé ce qui ressort de ce sondage réalisé mi-avril par Ipsos/CGI pour Le Monde, le magazine La Recherche et le ministère de l’enseignement supérieur et de la recherche. La bonne nouvelle reste que la science est considérée comme un progrès puisque 78% estiment qu’elle apporte des solutions aux problèmes d’aujourd’hui et 62% pensent qu’elle permettra aux générations futures de vivre mieux.
Mais pourquoi les scientifiques, ceux-là même qui font avancer la science, sont-ils aussi mal vus ? Tout simplement car ils ne seraient pas indépendants. A la botte des industriels qui les financent, partiaux, insuffisamment contrôlés par les autorités de sûreté, les chercheurs sont coupables de connivence avec les méchants financiers.
On remarquera que le défaut des chercheurs n’est donc pas l’incompétence mais la malhonnêteté. Doit-on s’en réjouir ? Pas vraiment. Mais les nombreux scandales sanitaires quotidiennement rapportés alimentent cette méfiance : amiante, prothèses PIP, tabac, OGM, pesticides… A cela s’ajoute des controverses entre scientifiques eux-mêmes, à l’image du conflit qui oppose le GIEC aux climato-sceptiques. On comprend que les citoyens, étrangers du monde scientifique, aient du mal à s’y retrouver.
Un sentiment qui correspond aussi à une tendance actuelle du « Tous pourris » qui n’épargne plus personne, des politiques aux patrons, en passant maintenant par les chercheurs. Espérons que cette défiance s’estompera, et que les scientifiques sauront affirmer avec force leur indépendance. Dans l’intérêt des chercheurs, dans l’intérêt de la science, dans l’intérêt des citoyens.
Par Audrey Loubens, journaliste scientifique