Treize des plus grandes groupes énergétiques européens veulent que le prix du carbone sur le marché augmente. La Commission européenne reconnaît le problème et agira avant les vacances d'été.
En 2005, l’Europe s’est dotée d’un marché du carbone qui oblige certaines entreprises de payer pour leurs émissions de gaz à effet de serre. Mais depuis son établissement les prix ont chuté, et le système s’avère ainsi peu efficace.
Il est estimé que pour stimuler les investissements dans des technologies faibles en carbone, le niveau des quotas doit se situer à au moins 25-30 euros par tonne.
Or, cette année, le cours a chuté à un niveau record proche des 6 euros à cause d’un surplus de crédits, de la récession et de l’incertitude liée aux investissements pour le climat à long terme. Aujourd’hui, la courbe se situe atour de 8 euros par tonne. Dans une lettre adressée à la Commission européenne, 13 entreprises énergetiques ont appelé l’exécutif européen à rémedier à ce problème.
1,4 milliard de crédits
Les signataires de la lettre (dont Shell, E.On, Statoil, Alstom, Dong Energy et General Electric) estiment qu’un marché du carbone performant pourrait constituer la « principale politique » pour atteindre l’objectif européen ambitieux de réduire de 80-95 % les émissions de dioxyde de carbone d’ici 2050.
Les entreprises avancent que les revenus de la vente aux enchères des crédits carbone devraient jouer un rôle important dans le financement de techniques innovantes faibles en carbone, dans lesquelles bon nombre d’entre elles ont investi.
« Nous vous invitons donc à présenter incessamment une proposition pour décaler les dates de ventes des crédits carbone européens », ont affirmé les intéressés. « Votre proposition devrait refléter la position de la commission Environnement du Parlement européen, qui souhaite que 1,4 milliard de ces crédits soient mis de côté. »
Troisième phase de l’ETS
Ce « décalage » est une mesure à court terme visant à répartir dans le temps le volume de crédits carbone à vendre, sans en modifier le nombre total prévu, de façon à porter le prix du carbone à un niveau auquel il pourrait stimuler les investissements pour une économie faible en carbone.
Les fonctionnaires du cabinet de Connie Hedegaard, commissaire européenne à l’action pour le climat, considèrent le décalage comme une bonne méthode, à condition qu’elle soit coordonnée avec le Comité européen des changements climatiques, en prenant en compte l’évolution macro-économique et les conditions de marché.
Isaac Valero Ladron, le porte-parole de la commissaire, s’est félicité de l’initiative des entreprises.
« Les organisations professionnelles (…) misent sur l’innovation et la compétitivité. C’est la bonne voie à suivre pour encourager la croissance et l’emploi en Europe », a-t-il déclaré à EurActiv. « C’est pourquoi la Commission présentera avant les vacances d’été un calendrier révisé des ventes aux enchères des crédits carbone dans le cadre de la troisième phase de l’ETS. Nous présenterons à cette occasion les options structurelles envisageables à long terme pour renforcer le marché du carbone. »
Lors d’une réunion du Conseil au Danemark en avril dernier, les ministres européens de l’énergie et de l’environnement se sont mis d’accord pour réviser les mesures en vigueur, afin de faire remonter le prix du carbone avant l’été.
Industries énergivores
Le secteur industriel consommateur en énergie a eu une réaction très négative face à cette lettre.
Contrairement aux 13 entreprises signataires, les acteurs du secteur estiment qu’un prix du carbone plus élevé les rendrait moins compétitifs et augmenterait les risques de « fuite de carbone », ou de délocalisation des activités dans des zones moins réglementées en dehors de l’UE.
« Nous ne pensons pas qu’il faille réviser partiellement ces normes aujourd’hui et nous souhaitons que [l’ETS] demeure un moyen rentable de réduire les émissions de carbone », a expliqué Robert Jan Jeekel, directeur des politiques pour l’énergie et le changement climatique chez Eurometaux, la fédération européenne des métaux non ferreux.
L’ETS n’avait pas pour objectif d’augmenter le prix du carbone, a-t-il déclaré à EurActiv. Ce n’est pourtant pas l’avis de la Commission, ni des 13 géants énergétiques.
Source : EurActiv.fr
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