Durant presque tout le XXe siècle, l’innovation était un processus interne à l’entreprise. Cette logique se fondait sur la conviction que l’on ne peut réaliser des innovations à succès qu’en maîtrisant le processus en interne : l’entreprise génère ses propres idées ou inventions, les développe, aboutit à de nouveaux produits, les offre au marché, les distribue, les finance, développe également des services associés.
Il s’agit essentiellement d’une vision de grande entreprise, qui investit dans un laboratoire central de R&D interne auquel on demande de développer de nouvelles technologies et de les appliquer aux produits ou aux procédés de l’entreprise. Une façon de faire qui garantit de détenir la propriété intellectuelle afin que d’autres ne puissent exploiter ces idées ou inventions à leur profit.
Dans les dernières décennies du XXe siècle, il a fallu cependant se rendre à l’évidence que ce paradigme de l’innovation interne s’érodait et ne reflétait pas la réalité de laquelle émergeait une nouvelle forme que l’on qualifie d’« innovation ouverte ».
Le phénomène est d’abord apparu dans les industries de haute technologie, les technologies de l’information et de la communication, les biotechnologies en particulier. Centrés sur leur métier, les fabricants d’ordinateurs, les entreprises pharmaceutiques n’ont pas voulu ou cru au développement de nouvelles technologies en rupture avec leurs produits, quelquefois issues de travaux de leurs chercheurs qui ont quitté le laboratoire central pour fonder leur propre entreprise. Mais aussi d’idées venues d’ailleurs, notamment celles produites par l’émergence progressive d’écosystèmes d’innovation dans lesquels les échanges entre de jeunes entreprises et leur environnement (universités, mais aussi les clients, fournisseurs et plus généralement les parties prenantes) ont engendré des innovations dans un contexte ouvert, dépassant le seul périmètre de l’entreprise, la Silicon Valley en constitue l’exemple le plus célèbre.
L’innovation ouverte est une démarche consistant à interagir avec l’environnement économique, technologique, financier, juridique, normatif et réglementaire afin d’identifier et de mobiliser les ressources externes nécessaires pour mener à bien des projets d’innovation que l’entreprise ne pourrait ou ne voudrait conduire seule.
L’innovation ouverte peut également réduire le coût, ou accélérer le processus par l’apport de ressources externes. Pour les petites entreprises, il s’agit souvent d’un défi de première importance, le partenariat se révélant indispensable pour accéder à des compétences ou moyens qu’elles ne possèdent pas, tant sur les plans de la technologie, du marché, du juridique, de l’ingénierie financière ou du management de projet.
L’innovation ouverte peut permettre à une entreprise de se lancer dans une innovation de rupture et ainsi maintenir sa compétitivité.
Dans ce cas, l’innovation ouverte se révèle souvent indispensable car elle implique, au-delà des collaborations tissées pour mener les tâches qui vont conduire à un prototype, le concours de parties prenantes pour que celui-ci soit réalisable et acceptable. La mise en place d’une infrastructure par des entreprises qui ne sont pas au cœur du projet d’innovation est quelquefois nécessaire : le réseau d’antennes des téléphones mobiles par exemple qui a nécessité des fournisseurs et exploitants, celui de la voiture électrique qui nécessite des bornes de rechargement. D’autres acteurs de l’écosystème nouveau peuvent également être impliqués : l’installation d’une hydrolienne en mer implique, par exemple, d’échanger avec les communautés qui sont impactées (communes proches, syndicats de pêcheurs…).
De l’innovation interne à l’innovation ouverte
On peut distinguer schématiquement trois formes d’ouverture vers l’extérieur d’une organisation dans le cadre de son processus d’innovation :
- une première forme, que l’on qualifie d’innovation interne, qui consiste pour une organisation à définir et à conduire à bonnes fins ses projets d’innovation avec ses propres moyens. Lorsque l’organisation mobilise des ressources externes pour ses projets, elle le fait sur une base marchande. Ainsi, l’activité de veille, ou encore l’externalisation de travaux en sous-traitance pour un projet, font partie de l’innovation interne ;
- une forme, que l’on qualifie d’innovation collaborative, qui est une démarche consistant, pour plusieurs partenaires, à faire émerger, décider et/ou réaliser un ou plusieurs projets d’innovation de façon conjointe. L’innovation collaborative implique pour les organisations partenaires de trouver un accord concernant la propriété intellectuelle, le partage des risques, la mise en commun des ressources et la répartition des bénéfices du ou des projets d’innovation objet du partenariat. L’innovation collaborative nécessite la mise en place d’une gouvernance spécifique à ce contexte ;
- une forme que l’on qualifie d’innovation ouverte où l’organisation interagit avec des organisations extérieures pour identifier et mobiliser des ressources externes dans le but de mener des projets d’innovation. Ce niveau englobe l’innovation collaborative et se veut plus large, car il s’agit d’œuvrer dans le cadre d’un écosystème nouveau pour l’entreprise, sur des projets d’innovation qui impliquent la contribution d’une communauté d’organisations ou d’individus externes à l’entreprise.
L’innovation ouverte peut nécessiter une gouvernance qui obéit à des règles de co-construction spécifiques à ce contexte participatif qui ne peut se limiter à un simple contrat. Elle se pratique avec des formes et des outils déjà connus (partenariat, recherche sous contrat, transfert de technologies) mais aussi nouveaux (conception collaborative, test de concept de produits via Internet, simulation grâce à des avatars), avec un degré variable d’ouverture entre les partenaires. Cette forme d’innovation ne garantit pas pour autant le libre accès aux connaissances, résultats ou savoir-faire créés, ainsi elle peut donner lieu à différents types d’accord formel entre les partenaires.
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Enjeux de l’innovation ouverte, un article de Pierre DEVALAN
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