Dans les écoles, le problème est identique. Dans le même esprit de se persuader que tout va bien dans le meilleur des mondes, on continue de fonctionner comme si de rien n’était. Par exemple, on demande aux enfants de nettoyer une piscine contaminée sans protection, ou on leur demande d’aller ramasser les feuilles d’automne sans précaution particulière alors que l’on sait parfaitement qu’elles sont contaminées au césium. Pire encore, on force les enfants à boire du lait contaminé. Et gare à celui qui ne veut pas. Le 29 septembre 2011, Akira Matsu du New Komeito (parti politique japonais NKP) est intervenue sur ce sujet devant les responsables gouvernementaux japonais et notamment Yoshihiko Noda, 1er Ministre, Osam Fujumina, chef de Cabinet du secrétariat et Yukio Edo, Ministre de l’industrie et de l’économie. Elle a dénoncé le cynisme et la barbarie du gouvernement envers les populations contaminées de la région de Fukushima.
Un autre grave problème qui se pose d’ores et déjà dans la région de Fukushima est la fuite du personnel médical depuis la catastrophe. C’est ainsi, les personnes les mieux informées des dangers sanitaires et qui ont les moyens de déménager s’en vont. Les autres restent, alors que de toute évidence il faudrait au moins évacuer les enfants, plus fragiles aux effets de la radioactivité. Le problème est immense mais il semble que l’on veuille à tout prix l’ignorer. 8 mois après la catastrophe, on ne pourra plus dire qu’on ne savait pas, ou qu’on n’a pas eu le temps de trouver des solutions pour évacuer la population.
La contamination est massive, le gouvernement le sait depuis les premiers jours de la catastrophe. Les premiers touchés ont été les sauveteurs qui ont opéré dans les régions dévastées par le tsunami, comme le relate ce témoignage : l’un d’entre eux qui était intervenu dans les zones sinistrées d’Iwate et Fukushima est décédé le 26 octobre 2011 d’une défaillance de la fonction rénale, trois mois après avoir appris que lui et les membres de son équipe avaient subi une contamination interne par les radionucléides. La personne qui témoigne assistait à une conférence de de Taro Yamada lors du »Forum National des cantines scolaires » qui s’est tenu le 6 novembre 2011 dans la ville de Sapporo. Sa déclaration a été enregistrée dans la vidéo ci-dessous (sous-titrages en français). Mais pour une personne qui parle, combien se taisent ? Quel est l’état de santé des autres membres de son équipe ?
Les personnes les plus touchées sont évidemment les « liquidateurs », ces ouvriers de la centrale de Fukushima Daiichi qui reçoivent des doses « héroïques ». Malgré l’assurance de Tepco qui affirme qu’il n’y a pas de décès liés aux travaux de décontamination et de maintenance de ce qui reste de la centrale, on constate un fort taux de mortalité pour les ouvriers de la centrale, ce qui est en contradiction avec l’espérance de vie des Japonais qui est la plus élevée au monde. En l’espace de 5 mois, 4 employés sont morts de façon anormale et rapide : le 12 mai 2011, un sexagénaire employé par la sous-traitance s’est senti mal et est décédé 2 jours plus tard. Le 16 août 2011, un employé de la centrale nucléaire est mort d’une leucémie foudroyante. Il avait travaillé pour Tepco durant une semaine, affecté à la surveillance de points chauds. Le 6 octobre 2011, un autre travailleur employé à la centrale est décédé subitement. Enfin, dernier en date, le 11 octobre 2011, un employé d’une cinquantaine d’années est mort brusquement alors qu’il se rendait à son lieu de travail, la centrale de Fukushima Daiichi.
A ces décès, il faut ajouter tous ceux dont on ne parle pas : de nombreuses personnes, employées par la sous-traitance, ont disparu ainsi des décomptes de Tepco. L’agence de sûreté nucléaire, on se souvient, avait épinglé l’entreprise en juin car celle-ci avait « égaré » des listes d’employés vacataires qui étaient intervenus sur le site, empêchant tout suivi médical de 69 personnes contaminées.
Il n’en a pas fallu plus pour que des rumeurs circulent sur internet sur le décès effectif de ces ouvriers intérimaires, information impossible à vérifier à ce jour bien qu’un journaliste du Shukan Asahi, M. Imanishi, ait entendu que des ambulances arrivaient 10 fois par jour à la centrale. A qui étaient destinées ces ambulances, et pourquoi ni les employés de Tepco, ni les ouvriers hospitalisés, ni les médecins n’ont-ils le droit de parler ? Il est évident que si un jour un journaliste arrivait à prouver ce genre d’information, l’image du nucléaire serait ternie à jamais et anéantirait tous les efforts du lobby nucléaire pour cacher la vérité. Il est incroyable que la catastrophe de Tchernobyl n’ait d’ailleurs pas eu plus d’impact sur l’énergie nucléaire dans le monde. La raison en est que l’OMS, qui était la plus à même de prendre des mesures de protection des populations, s’est tue. Condamnée au silence par un vieil accord avec l’AIEA, elle est devenue une institution criminelle, laissant tomber malade les gens vivant dans les territoires contaminés, et niant les effets des faibles doses sur la santé humaine.
Il faut en effet savoir que Tchernobyl a généré un million de victimes, comme le rappelle Janette Sherman, biologiste américaine et spécialiste en toxicologie. Dans la vidéo ci-dessous, elle présente le livre déjà cité « Chernobyl. Consequences of the catastrophe for people and environnement » d’A. Yablokov et de V. et A. Nesterenko, édité en 2009 par l’Académie des Sciences de New York avec plus de 5000 références scientifiques (et bientôt édité en français).
Les auteurs de ce livre estiment à 985 000 le nombre de décès survenus à cause de Tchernobyl dans le monde entier entre 1986 et 2004, chiffre qui a encore augmenté depuis cette date. Janette Sherman dénonce également l’accord entre l’OMS et l’AIEA, signé en 1959. L’OMS est théoriquement garante de la santé des populations dans le monde et fait autorité auprès des États membres. Elle devrait, conformément à sa Constitution, être indépendante de tout intérêt commercial. Pourtant le 28 mai 1959, elle a signé avec l’AIEA (Agence Internationale de l’Energie Atomique) un accord par lequel aucune de ces deux agences de l’ONU ne peut prendre de position publique qui puisse nuire aux intérêts de l’autre (accord référencé WHA 12-40). Or, l’AIEA a été constituée en 1957 pour faire la promotion du nucléaire civil…
Cet interview a été réalisé le 6 mars 2011 soit 5 jours avant la catastrophe de Fukushima. (Sous-titrage en français)
Il faut aussi voir pour être complet la conférence de presse donnée par le Dr. Helen Caldicott, physicienne australienne, auteure et avocate anti-nucléaire qui a fondé plusieurs associations qui luttent contre l’utilisation de l’énergie nucléaire, de l’uranium appauvri pour des munitions, et des armes nucléaires en général. La conférence s’est tenue à Montréal, au Canada, le 18 mars, une semaine seulement après la catastrophe nucléaire.
Fukushima est bien pire que Tchernobyl.
Il est certain que la situation ne va pas s’améliorer au Japon, l’expérience de Tchernobyl le démontre. Le fait de laisser vivre des millions de personnes dans un environnement contaminé apportera son lot de problèmes et de souffrances. Une grande sagesse a fait fuir de cette zone dangereuse beaucoup de femmes enceintes, protégeant leurs futurs enfants des radiations. Mais qu’en est-il de celles qui sont restées ? Que doit-on déduire du non-dit du milieu médical, relevé par Keiko Ichikawa ? Si les médecins japonais cachent les malformations et les enfants mort-nés, comment de réelles statistiques pourront-elles être établies ? On connaît déjà les dégâts épouvantables causés par l’uranium appauvri dus aux bombardements lors de la guerre en Irak, et on imagine avec effroi l’avenir des populations japonaises soumises à de fortes contaminations. La santé est un sujet difficile à aborder, le lobby nucléaire est très puissant dans le monde entier et cherchera à minimiser toutes les mauvaises nouvelles. Mais la santé n’a pas de prix et chacun doit se battre pour la conserver. Amis lecteurs, ce sujet est très grave, soyez vigilants et dénoncez toute désinformation, partout où vous le pouvez !
Par Pierre Fetet
Source : http://fukushima.over-blog.fr/
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