Décryptage

Les dix commandements du management de la sécurité

Posté le 28 novembre 2011
par La rédaction
dans Environnement

Erika, Mont Sainte-Odile, AZF, Concorde et le Tunnel du Mont-Blanc, autant de noms d'événements dramatiques aux conséquences économiques, politiques et humaines importantes. De l'étude de ces divers accidents et de beaucoup d'autres, il est possible de dégager dix commandements, dix piliers sur lesquels devrait reposer toute politique de prévention si elle se veut efficace et dynamisante.

1. Avoir une pensée systémique

Ténériffe, Flaujac, Piper Alpha, Flixborough, le tunnel du Mont-Blanc nous montrent clairement que, face à l’accroissement de la complexité de nos systèmes et réseaux industriels et du fait de leur impact sur la société et l’environnement, qui se traduit par un potentiel de risques accrus, tous les acteurs qui œuvrent en leur sein, du président à l’opérateur, doivent avoir une vision systémique permanente.

Chacun au poste qu’il occupe doit comprendre que tout composant, qu’il soit matériel, informationnel, procédural, humain, financier, est en relation plus ou moins directe avec nombre d’autres. C’est ainsi que la priorité donnée à la production peut avoir, en mode dégradé, un impact sur la sécurité de fonctionnement de l’installation ou sur le comportement de certains acteurs. Une exigence en tant que telle n’a de sens que si elle est confrontée aux autres. Pousser la production tant que toutes les exigences de sécurité sont respectées ne pose pas de problème. Par contre, nous avons vu les conséquences de la décision prise par la tour de contrôle de Ténériffe, privée ce jour là de son taxiway et des feux de balisage des pistes, de faire décoller des avions gros porteurs avec une visibilité inférieure à 500 mètres.

Ceci a un corollaire : les exigences de sécurité doivent toujours prendre le pas sur les exigences de production, les exigences sociales, les exigences financières. Cela est d’autant plus vrai que le système considéré fonctionne en mode dégradé.

On comprend mieux l’importance des différentes relations reliant les éléments composant les trois sous-systèmes (technologique, informationnel, humain).

Porter un regard systémique sur les systèmes qui nous entourent constitue le premier pilier sur lequel doit porter toute politique préventive de sécurité.

2. Réaliser des installations fiables, robustes et stables

Tous les systèmes socio-techniques que nous exploitons sont généralement le résultat, le fruit de projets ayant nécessité des investissements lourds, qu’il s’agisse d’un gros porteur, d’un réseau ferré, d’un complexe chimique, d’une plate-forme offshore… Tous ces projets ont demandé plusieurs années entre le premier coup de crayon et la mise en service de l’installation. De très nombreux acteurs y ont participé : concepteurs, engineering, équipementiers, génie-civilistes, tuyauteurs, mécaniciens, fondeurs, électriciens, électroniciens, informaticiens, monteurs, financiers, sociétés de contrôle, banques, etc.

Tout au long du projet, de très nombreuses modifications ont dû être instruites, rejetées, acceptées. C’est durant cette phase de conception que l’inventaire des risques, contrepartie des performances attendues du nouveau système, doit être fait. Chaque risque doit être identifié, caractérisé. Quelle est sa nature ? Quelle est sa probabilités d’occurrence ? Quelle est la gravité de ses conséquences potentielles ?

Ce travail fait, il s’agit d’identifier les fonctions et les éléments importants pour la sécurité puis de préciser les exigences de conception, d’exploitation et de maintenance associées à chacune d’elles et chacun d’eux.

Il est clair que si le risque de rupture d’une tuyauterie de raccordement entre deux réacteurs successifs avait été appréhendé à sa juste valeur, l’accident de Flixborough ne se serait pas produit. Mais, il aurait fallu, au préalable, identifier les soufflets comme des éléments importants pour la sécurité et fixer comme exigence de conception un fonctionnement en traction-compression et non en cisaillement. De même à Three Miles Island, si la reprise de l’alimentation des générateurs de vapeur avait été considérée comme une fonction importante pour la sécurité, il est probable que les concepteurs auraient mis en place une instrumentation sûre permettant aux opérateurs de suivre leur réalimentation, par exemple en installant un débitmètre en aval de la pompe.

3. Élaborer des installations sûres, claires et responsabilisantes

L’incendie sous le tunnel du Mont-Blanc illustre bien comment la transformation lente, progressive et volontaire d’une organisation initialement sûre et responsabilisante vers deux organisations indépendantes, non communicantes pour ne pas dire conflictuelles, a conduit, dans un premier temps, à l’installation de deux tronçons de tunnel présentant des différences notables et, dans un deuxième temps, au drame.

La mise en place d’organisations sûres, claires et responsabilisantes passe par :

4. Constituer des équipes fiables et motivées

5. Maîtriser les modifications décidées

6. Conduire les installations conformément aux règles établies

7. Maintenir les équipements pour qu’ils assurent toujours leurs fonctions

8. Mettre en place des instances de contrôle internes et externes indépendantes

9. Tirer à tout moment les leçons de l’expérience

10. Se préparer à gérer la crise

 

Pour aller plus loin :

Découvrez la base documentaire Techniques de l’Ingénieur : Management de la sécurité

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