Epuisement professionnel. C’est la définition du burn-out, une maladie liée à un fort stress professionnel, se caractérisant par de la fatigue, de la frustration, une dépression, un sentiment d’impuissance et de désespoir, pouvant malheureusement mener au suicide. Les catégories professionnelles les plus touchées par cette « mort par surcharge de travail » sont celles dont le métier implique un engagement relationnel fort. Les travailleurs sociaux, enseignants et professions médicales comptent le plus de victimes. Les chercheurs du CNRS ne font pas a priori partie des personnes les plus exposées.
Pourtant, le mois de janvier a été marqué par le suicide de trois personnes. Toutes travaillaient au CNRS, dans des laboratoires ou dans l’administration à Rennes, Annecy et Meudon. Les personnes qui ont décidé de mettre fin à leur vie ont agi en dehors de leur lieu de travail, le lien avec leur quotidien professionnel n’étant pas du tout prouvé. Néanmoins, le Syndicat national des travailleurs de la recherche scientifique s’en inquiète, redoutant les prémices d’une vague de suicides à venir. Daniel Steimetz, responsable du syndicat, bien qu’ayant précisé qu’un des suicides relevait très probablement de motifs privés, rappelle que ces drames surviennent dans un contexte où les conditions de travail se dégradent : « cela fait plusieurs années que nous signalons à la direction du CNRS des cas de souffrance au travail et cela nous a semblé un signal suffisamment fort ».
La pression de devoir publier un maximum, les heures d’enseignements à assurer qui ne sont pas prises en compte dans l’évaluation du chercheur, la complexité administrative des demandes de subventions chronophages et démotivantes du fait d’un fort taux de refus…Le travail au cœur des laboratoires serait de plus en plus stressant, et la passion des scientifiques ne suffirait plus à compenser.
Alors, les chercheurs sont-ils en danger ? Ces drames sont-ils une triste coïncidence ou l’illustration d’un profond malaise ?
Le CNRS dispose de différents indicateurs pour mesurer le stress de ses employés. Parmi eux, le taux de suicide ainsi que le nombre de jours de congés maladies. Or, l’analyse de ces outils ne permet pas de conclure à une aggravation du stress. La Direction du CNRS a ainsi rappelé que le taux de suicide dans ses effectifs est inférieur à la moyenne nationale, ajoutant que le nombre d’arrêts maladies n’a pas augmenté non plus. Mieux, le nombre de congés maladies est en baisse constante depuis maintenant quatre ans.
En 2011, une thèse a débuté, intitulée « Etude qualitative des relations entre souffrance, plaisir et organisation du travail de la recherche ». Celle-ci vient de s’achever. Elle a été remise au comité national mais n’a pas encore été exploitée. Nul doute qu’elle sera lue avec une grande attention.
Par Audrey Loubens, journaliste scientifique
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