Si la transition énergétique veut faire la part belle à l'économie circulaire, dans les faits, la crise économique et le faible prix des matières premières vierges rend l'objectif difficilement atteignable. A moins d'avoir une taxe carbone européenne forte.
« On est sur une conjoncture générale très difficile, qui s’applique également au recyclage, avertit Jean-Philippe Carpentier, Président de la Fédération des entreprises du recyclage (Federec). On a un prix du pétrole qui a été divisé par deux et demi, le prix du minerai de fer a été divisé par deux, le cuivre a chuté de 30 à 40 % ».
« Même si on parle de plus en plus d’économie circulaire, dans les faits, on a une économie linéaire qui prend le pas sur l’économie circulaire, pour des raisons tout simplement économiques », poursuit Jean-Philippe Carpentier. Car le faible prix des matières vierges les rend plus compétitives que les matières issues du recyclage. Un paradoxe, alors que la loi de transition énergétique pour la croissance verte vient d’être votée en France et à l’approche de la COP21 !
Le chiffre d’affaires du marché du recyclage tourne autour de 9 milliards d’euros en 2014, en baisse de 2 % par rapport à 2013. Pourtant, le volume des déchets recyclés a augmenté de 4 %, portant le total à plus de 74 millions de tonnes. Cela témoigne d’une perte de valeur sensible pour la profession, notamment due à la baisse des marges et des volumes traités de métaux ferreux.
Résister et réagir pour mieux régner
Malgré tout, la filière résiste. Elle a poursuivi ses investissements à hauteur de 455 millions d’euros, soit 5 % de son chiffre d’affaires global, le nombre d’employés a augmenté de 1,8 %. Pour continuer sur sa lancée, les futurs investissements porteront sur les systèmes de tri pour améliorer la qualité des matières premières recyclées, afin de mieux concurrencer les matières vierges.
« La raréfaction des matières est toujours là, même si le prix ne le montre pas, réagit Jean-Philippe Carpentier. On demande à travailler cette industrie du recyclage pour être prêt à substituer, petit à petit, durablement, les matières vierges par les matières issues du recyclage ».
Federec milite donc pour une taxe carbone élevée qui permettrait de contrecarrer le bas prix du charbon et du pétrole.
En plus, une étude de l’Ademe et de Federec, à paraître mi-octobre, va chiffrer l’évitement d’émissions de CO2 et les économies d’énergie grâce aux matières issues du recyclage. « On pourra dire au client combien de tonnes de CO2 ont été évitées grâce à la matière recyclée utilisée dans ses produits », prévient le Président de Federec. Les professionnels espèrent pouvoir ainsi valoriser cette valeur de leur produit pour concurrencer le prix des matières vierges.
« La spéculation sur les prix favorise à court terme l’utilisation des matières vierges au détriment de la protection de l’environnement à long terme. Il devient essentiel d’intervenir pour inciter les entreprises à privilégier les matières premières issues du recyclage et développer une économie circulaire, efficace en ressources », conclut Philippe Carpentier.
Par Matthieu Combe, journaliste scientifique
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