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Le streaming vidéo, une usine à CO2

Posté le 22 juillet 2019
par Frédéric Monflier
dans Environnement

L'association The Shift Project a fait ses calculs, rendus publics la semaine dernière : l'usage des Netflix et autres Youtube a produit 306 millions de tonnes de CO2 en 2018. Autant que l'Espagne.

Très populaires, les services de streaming video ont un aspect pratique indéniable, mais leur impact écologique l’est tout autant. Dans une étude publiée le 11 juillet dernier, le groupe de réflexion The Shift Project, qui milite pour décarboner l’économie, estime que le streaming vidéo a injecté 306 millions de tonnes de CO2 dans l’atmosphère en 2018. C’est une production de gaz à effet de serre comparable à celle d’un pays comme l’Espagne, soit l’équivalent de 1% des émissions mondiales. De façon plus générale, les technologies du numérique sont responsables de 4% des gaz à effet de serre dans le monde et leur consommation énergétique progresse de 9% par an, concluait un autre rapport de la même association sorti en octobre dernier.

Dans le détail, la consommation de vidéos dites « online », hébergées sur un serveur et transmises sur un terminal (smartphone, TV…) distant via un réseau, est à l’origine de 60% du trafic de données numériques dans le monde l’an dernier. Inclus dans cette catégorie, les services à la Netflix et à la Amazon Prime comptent pour 34% de ce total, suivis par les portails pornographiques (27%), les plateformes telles que Youtube et Dailymotion (21%) et enfin les vidéos partagées sur les réseaux sociaux (18%).

Choisir entre l’utile et le moins utile

En tenant compte des impératifs climatiques et des contraintes sur les ressources naturelles et énergétiques, ce type d’usage est « insoutenable », s’inquiète The Shift Project. L’auto-régulation des fournisseurs de services et le volontarisme des usagers ne suffiront pas : l’association plaide pour la mise en œuvre d’une régulation, à l’issue d’un débat sociétal, qui permet d’arbitrer entre ce qui est utile et ce qui l’est moins. « Il ne s’agit pas d’être pour ou contre la pornographie, la télémédecine, Netflix ou les mails : il s’agit d’éviter qu’un usage précieux ne pâtisse de la surconsommation d’un autre jugé moins essentiel » expliquent les auteurs de l’étude. Cette démarche n’irait pas à l’encontre du principe de neutralité du net, pour lequel la nature des contenus prime sur leur volume.

Le vœu de The Shift Project serait d’autant plus urgent à réaliser que le streaming vidéo ne prend pas du tout le chemin de la sobriété énergétique. La définition 4K se démocratisant et la 8K commençant à poindre, les besoins en stockage grossissent. La 5G se profile également et son très haut débit devrait encore plus inciter à la connexion aux services de streaming, en situation de mobilité ou non. D’autre part, appâtés par le succès de Netflix, Apple et Disney prévoient de lancer leur plateforme dans quelques mois, ce qui aura pour effet de multiplier l’offre. Enfin, les services de « cloud gaming », dans la lignée de Google Stadia lancé en novembre prochain, risquent d’alourdir l’addition pour la planète : en partant d’une définition Full HD à 60 images par seconde, il est question de quelque 10 Go de données par heure…


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