L’adoption de la « petite loi » sur l’énergie la semaine dernière a remis sur le tapis la question de l’accès régulé à l’énergie nucléaire historique, ou Arenh. La loi porte en effet à 150 TWh, contre 100 TWh auparavant, cet accès à prix fixé pour les concurrents d’EDF.
Depuis la loi Nome (Nouvelle organisation du marché de l’électricité) de 2010, le dispositif, transitoire il est important de la rappeler, permet aux concurrents d’EDF de se procurer du courant nucléaire à un prix supposé ne pas léser EDF tout en leur donnant, à efficacité égale, la possibilité de concurrencer l’opérateur historique ; prix fixé à 42 euros/MWh depuis plusieurs années. A l’époque, il s’agissait clairement de s’écarter des règles habituelles de concurrence afin d’aider l’apparition et le développement des nouveaux fournisseurs d’électricité et complaire à l’ouverture du marché européen de l’énergie.
L’Arenh a également un lien direct avec les tarifs réglementés de vente (TRV), qui viennent d’augmenter. Le calcul de ce TRV doit répondre à la fois au principe de couvrir les différents coûts relatifs à la fourniture d’électricité, sans vente à perte et avec un bénéfice (autour de 2%). En outre, le calcul prévoit la « contestabilité » de ces coûts, c’est-à-dire que les TRV doivent être calculés afin que les autres fournisseurs aussi efficaces qu’EDF puissent les pratiquer et concurrencer l’opérateur historique.
Dans son dossier de presse rendu public à l’issue du vote en première lecture de la loi énergie-climat à l’Assemblée nationale, la semaine dernière, le gouvernement peut ainsi signaler que le mécanisme de l’Arenh « permet (aux consommateurs) d’être en partie protégés des variations de prix de marché de gros européens en bénéficiant d’une énergie à un prix régulé et stable. »
Les TRV sont en revanche aujourd’hui uniquement proposés par EDF et les entreprises locales de distribution (ELD, ou régies locales) aux clients particuliers ou petits professionnels (compteurs de puissance inférieure à 36 kVA). Des TRV dont le volume représente environ 150 TWh (oui, le même chiffre que le nouveau niveau d’Arenh fixé par la loi actuellement au Parlement).
Depuis 2010, les fournisseurs alternatifs (à l’opérateur historique) peuvent ainsi bénéficier de l’Arenh. Une électricité (dont le volume avait été fixé à l’origine à 100 TWh par an, c’est-à-dire environ un quart de la production nucléaire) livrée dans des conditions de coûts équivalentes à celles de l’opérateur historique EDF, et devant permettre à l’ensemble des consommateurs, quel que soit leur fournisseur, de continuer à bénéficier de la compétitivité du parc nucléaire historique. L’Arenh est donc une option pour les fournisseurs alternatifs, qui peuvent également choisir de s’approvisionner sur le marché de gros.
Néanmoins, lors de la mise en œuvre de l’Arenh, l’Autorité de la concurrence avait souligné que le dispositif devait favoriser la concurrence sur le marché de la production d’électricité. Le gendarme de la concurrence ajoutait, face au caractère transitoire du dispositif, qu’il « est important [de prévoir] une sortie progressive du mécanisme… L’objectif est d’obliger les fournisseurs à se préparer à l’échéance du 31 décembre 2025 », date de fin prévue dudit mécanisme. Une sortie qui devait se fonder sur la construction de capacités de production.
Las, après des années de fonctionnement « satisfaisant » pour les fournisseurs, les prix de marchés étant inférieurs à ceux de l’Arenh (mais pas trop au cas où il faudrait s’approvisionner ailleurs que sur le marché), depuis l’an dernier, ces prix de marché ont rebondi sur un marché désormais européen. En outre, depuis début 2018, les prix du carbone sur le marché européen des échanges de CO2 sont remontés, en même temps que le coût des combustibles fossiles utilisés dans les centrales thermiques (il en reste beaucoup en Europe). Le tout a créé un afflux de demandes d’Arenh… D’où les voix qui ont été entendues par le gouvernement puisque ce dernier a décidé d’en augmenter le volume accessible à la concurrence.
Mais alors, où sont les capacités nouvelles de production ? Force est de constater que s’il y a bien eu augmentation des capacités de production depuis le lancement de l’Arenh, elles se sont concentrées sur les énergies renouvelables, totalement hors marché de l’électricité, bénéficiant de tarifs d’achats fixés. Sans oublier une baisse substantielle des capacités fossiles retirées du marché pour cause d’engagements climatiques. Au final, les investissements dans la production n’ont pas eu le rôle voulu lors de la loi Nome, et la concurrence à la production est quasi inexistante (quelques centrales au gaz). Ainsi, pas vraiment d’effet prix pour les consommateurs.
Les concurrents les plus sérieux de l’opérateur historique sur le marché sont désormais Total, Engie et le finlandais Fortum (qui a racheté les centrales au gaz d’Uniper), plus une trentaine de « petits » fournisseurs souvent sur des offres vertes. EDF a de son côté objecté que relever le plafond de l’Arenh devrait s’accompagner d’une hausse du tarif de vente pratiqué, dans la mesure où l’entreprise doit couvrir ses coûts.
Ainsi, l’article 8 de la « petite » loi porte sur le relèvement du plafond Arenh à 150 TWh mais aussi sur la possibilité, pour le gouvernement, d’en revoir le prix. Le ministère de la Transition écologique et solidaire (MTES) a estimé, à l’issue du vote de la loi à l’Assemblée nationale, qu’un plafond à 150 TWh devrait être suffisant pour couvrir les besoins de la concurrence en 2020 et 2021. Sur le prix, il a indiqué ne viser « qu’une légère progression ». Mais attention, cette évolution ne pourra se faire que dans le cadre d’un accord avec la Commission européenne, avec laquelle des « échanges techniques » sont déjà en cours « notamment dans le cadre d’une réforme à plus long terme de l’Arenh ».
Totalement d’accord avec studer.
La loi Nome est un fiasco car les concurrents d’EDF n’ont construit aucun moyen de production comme la loi le prévoyait. Au lieu d’en tirer les conclusions et de mettre fin à ce dispositif, De Rugy sous la pression de Total et d’Engie l’a aggravé. On ne parle même pas de revoir son prix fixé en 2012 à 42 €/MWh alors qu’aujourd’hui, les travaux post Fukushima pèsent lourds sur les coûts du nucléaire. Cela donne l’impression qu’EDF est une truie allaitante mais que ce ne sont pas des porcelets qu’elle nourrit mais de gros porcs qui viennent la tuer.
Très bon article qui montre l’hypocrisie et l’absurdité d’un système impulsé par Bruxelles qui exigeait de la France l’émergence de concurrents à EDF et à son nucléaire bon marché.
Du coup,les législateurs hostiles à cette énergie pourtant décarbonée et sûre, ont forcé EDF à céder à prix coûtant (ARENH) 25 puis 37,5 % de sa production. Et à des « concurrents » comme Total ou Engie (Suez-GdF) qui s’enrichissent sur son dos et qui se gardent de construire des centrales.
Ceux, de Sarkozy qui a instauré ce système avec la loi NOME à Macron qui le confirme, seront responsable devant la nation et l’histoire, quand EDF disparaîtra et que l’énergie coûtera 2 à 3 fois plus cher.
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