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Le réseau de transport d’électricité de demain

Posté le 19 septembre 2019
par Joël Spaes
dans Énergie

François Brottes, le président du directoire du gestionnaire du réseau de transport d’électricité français RTE, a présenté mardi 17 septembre les grandes orientations en termes d’investissements à l’horizon 2035.

Dénommé Schéma décennal de développement du réseau (SDDR), le document part de plusieurs constats réalisés sur les lignes très haute tension d’électricité en France (63 kilovolts à 400 kV). Comme l’a lui-même indiqué François Brottes, il y a à la fois la transition énergétique, qui implique des changements profonds, et l’enjeu de renouvellement d’un réseau dont la moyenne d’âge atteint les 50 ans. Ainsi, au total, cela conduit RTE à viser d’ici à 2035 (et non 2030, comme le laisse supposer le caractère décennal du SDDR) un investissement nécessaire de 33 milliards d’euros, ce qui correspond à environ  2 milliards d’euros par an, contre une moyenne de 1,3 md€ à 1,5 md€ ces dernières années… Ramené à l’horizon du SDDR, cela suppose 20 milliards d’euros d’ici à 2030, à comparer aux 61 md€ prévus en Allemagne, ou aux 5md€ en Belgique sur la même période. Le Royaume-Uni a misé sur 12,4 md€ sur 2021-2025 et l’Italie sur 6,2 md€ sur 2019-2023. Preuve selon RTE que le gestionnaire du réseau de transport a clairement misé sur une approche « au plus juste en intégrant les possibilités de flexibilité des énergies renouvelables. » A l’horizon 2035, le « coût » du réseau de transport d’électricité ne devrait ainsi pas être modifié proportionnellement, demeurant à 10% de la facture des consommateurs.

Il faut en effet rappeler que c’est la Commission de régulation de l’énergie (CRE) qui doit donner son accord à ce programme d’investissements, RTE étant une entreprise régulée.

Rénover un réseau âgé mais résilient

Côté rénovation, huit milliards d’euros sont prévus afin de renouveler les ouvrages les plus anciens, c’est-à-dire ceux qui atteignent les 85 ans… Mais, insiste RTE, si le réseau est plus âgé que celui des pays voisins, c’est le fruit d’arbitrages conscients, et non subis. Les lignes ont été conservées à un haut niveau de qualité grâce à une maintenance adaptée. En outre, la résilience du réseau a été renforcée après les tempêtes de 1999.

Après un premier renouvellement du réseau depuis sa création qui doit être entamé immédiatement, RTE estime être prêt, dès 2030, à augmenter significativement l’effort (de l’ordre de 30%) afin de maintenir la qualité de service d’aujourd’hui.

Côté adaptation, 13 milliards sont prévus afin de prendre en compte le nouveau mix électrique qui va être issu de la programmation pluriannuelle de l’énergie (PPE), soit en augmentant la capacité de lignes actuelles, la construction de nouveaux liens, voire l’enlèvement de lignes. RTE signale que cette adaptation du réseau permettra de réduire les émissions de CO2 du système électrique européen de l’ordre de 5 à 10 millions de tonnes équivalent carbone, soit autant que les émissions actuelles des centrales au charbon françaises.

Numériser, interconnecter, raccorder l’offshore

En outre, il convient « de poursuivre et d’adapter aux nouvelles technologies l’ossature numérique préexistante du réseau, en renforçant les exigences de cybersécurité et en permettant le développement des technologies nécessaires pour pousser plus loin l’utilisation de l’infrastructure actuelle et réduire le besoin de nouvelles lignes. » Cet aspect représente quelque 3 md€ d’investissements, estime RTE.

Par ailleurs, conformément aux engagements européens, RTE rappelle qu’« il faut doubler en 15 ans la capacité d’interconnexion de la France, en sélectionnant les projets les plus rentables, pour tirer le meilleur parti des différences de consommation et de production en Europe et parvenir à un mix équilibré et soutenable sur le plan économique, très majoritairement fondé sur les renouvelables et le nucléaire, à l’horizon 2035. » Cela pèse pour 2md€ dans la balance des dépenses à venir.

Enfin, RTE signale que c’est désormais au gestionnaire de réseau de transport de « construire un réseau de raccordement des énergies marines, c’est-à-dire un réseau marin planifié de manière cohérente et efficace avec les capacités d’accueil à terre et le potentiel de développement en mer, de manière à en limiter les coûts », insiste RTE. Reste que le poids dans l’investissement futur atteint les 7 milliards d’euros, avec 1 GW prévu par année par la PPE.

Les associations professionnelles des énergies renouvelables ne s’y sont pas trompées. Le Syndicat des énergies renouvelables (SER) s’est félicité de « la capacité des réseaux publics d’électricité à accueillir une part importante d’énergies renouvelables dans le mix électrique français à des coûts maîtrisés pour le consommateur et en maintenant la qualité de service actuelle. » Le SER ajoute que le « SDDR met en lumière le fait qu’aucune rupture technologique majeure n’est nécessaire pour intégrer 50% de production d’électricité renouvelable à l’horizon 2035 ». De même, la Fédération de l’énergie éolienne (FEE) a martelé : « Ses conclusions sont limpides : les énergies renouvelables – éolien en tête – sont le pilier du futur mix énergétique français. Aussi, les résultats montrent que leur intégration dans le réseau est loin d’être aussi coûteuse que certains intérêts voudraient le faire croire et, ne nécessite pas de soi-disant ’’back-up’’ thermiques. La filière éolienne accueille avec satisfaction ce rapport qui prouve une fois de plus la pertinence de l’éolien pour l’avenir énergétique de la France. »


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