Alors que nous vous parlions mardi de la fuite continue d’eau très radioactive provoquée par une fissure d’une vingtaine de centimètres au niveau d’un puits appartenant à la fosse de maintenance en béton du réacteur 2 de la centrale de Fukushima Daiichi, la TEPCO, administrateur du site, a annoncé mercredi matin avoir réussi à combler la brèche.
Pour ce faire, ils avaient décidé mardi de procéder à des forages en amont pour suivre les flux d’eau contaminée, notamment à l’aide d’un colorant de couleur blanche. Une fois le flux repéré, les liquidateurs décidèrent d’injecter du « verre liquide », du silicate de sodium (Na2SiO3 ), qui est un composé chimique ayant la particularité de solidifier le sol.
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Le silicate de sodium est stable dans des solutions neutres ou alcalines, mais les ions silicates réagissent avec les ions hydrogènes dans des solutions acides, formant un acide faible appelé l’acide silicique (Si(OH)4 ). Une fois chauffé et « grillé », l’acide silicique se polymérise sous forme de gel de silice, une matière très solide et ayant l’apparence du verre. C’est ce gel de silice solidifié qui a ainsi permis d’arrêter les fuites. On se souvient que de précédentes tentatives de colmatage, à l’aide de ciment ou encore d’un autre polymère mêlé à de la sciure et à du papier journal n’avaient pas connu le succès escompté.
Les rejets d’eau radioactive continuent
Dans le même temps, la centrale de Fukushima continue les rejets d’eau « faiblement radioactive » dans le Pacifique, prévus pour durer cinq jours, et ainsi se débarrasser de 11 500 tonnes d’eau contaminée. Il ne pourrait s’agir que d’un premier délestage, car la centrale contiendrait plus de 60 000 tonnes d’eau contaminée, dont le stockage ne pourra être assuré que peu de temps, les autorités étant désireuses de faire de la place pour de l’eau beaucoup plus radioactive.
Les dernières mesures du taux de radioactivité prises dans de l’eau de mer non loin des réacteurs faisaient état de niveaux jusqu’à 7,5 millions de fois supérieurs à la limite admise. On ne peut qu’écouter d’une oreille sceptique les déclarations de la TEPCO, assurant que « cette contamination n’aurait pas un impact immédiat sur l’environnement. »
La peur d’une nouvelle explosion
La situation dans trois des six réacteurs de la centrale est très inquiétante, au point que de nouvelles mesures sont en passe d’être prises. De la fumée s’échappe continuellement de ces réacteurs, notamment du réacteur 1. De l’azote va être injecté dans ce réacteur par les liquidateurs, espérant éviter une explosion et l’aggravation de la situation de la centrale.
Il est encore et toujours question de l’hydrogène qui s’échapperait des réacteurs, focalisant une partie des craintes des autorités. Lorsque les crayons de combustible se sont échauffés, ils firent fondre et fuir leur gaine de zirconium soumises à une température bien trop élevée, réagissant avec le combustible et le peu d’eau restante dégageant des gaz radioactifs et de l’hydrogène. C’est cet hydrogène (rôle de carburant), en contact avec de l’oxygène ambiant (rôle du comburant) et à haute température (comme dans les moteurs de fusée, car la liaison H-H est très faible, et que la molécule d‘eau formée est très stable) qui a été responsable des premières explosions sur le site, soufflant les toits des bâtiments de confinement des réacteurs.
L’azote injectée dans le réacteur 1, où de l’hydrogène s’accumule toujours de manière très importante, doit empêcher les explosions de se produire, grâce à une réaction d’inertage. En effet, l’azote, inerte, permet de faire chuter drastiquement le taux d’oxygène dans l’air, limitant ainsi les possibilités d’explosion car l’oxygène en est indispensable. L’azote sert d’ailleurs souvent dans les zones de stockage sensibles pour ces raisons. La TEPCO envisagerait d’en injecter 6 000 m3 sur 6 jours, et d’infliger bientôt le même sort aux réacteurs 2 et 3 de la centrale.
Moonzur Rahman
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