En 2021, le marché mondial du polyuréthane s’élevait à 24,7 millions de tonnes et devrait atteindre 29 millions de tonnes d’ici 2029. Ce polymère sert dans de nombreuses applications : mousses isolantes, matelas, colles, peintures, éoliennes, chaussures… Il est synthétisé à partir de polyols et d’isocyanates, très toxiques, issus de la pétrochimie. Du fait de sa structure réticulée, il ne se dégrade pas en présence de chaleur. Chaque année, ce sont environ 220 000 tonnes de mousses polyuréthanes (PU) qui sont jetées en décharge. Pour rendre ce matériau indispensable plus durable, les chercheurs se penchent sur deux aspects : la recherche de matières premières plus « vertes » et le recyclage.
Des matières premières plus durables
En novembre 2022, une équipe de chercheurs de l’Université de Liège en Belgique a mis au point un nouveau procédé qui synthétise du polyuréthane recyclable et sans isocyanates. Les isocyanates ont été remplacés par des carbonates cycliques. La technologie utilise de l’eau et un catalyseur pour convertir une partie des carbonates en dioxyde de carbone (CO2) afin de gonfler la matrice. Un ajout d’amine, qui réagit avec le reste du CO2, durcit la mousse. Cette synthèse, encore au stade du laboratoire, nécessite des matières peu coûteuses, accessibles et moins toxiques que l’isocyanate.
Un autre projet, porté par plusieurs industriels dans le cadre du programme européen de recherche Horizon 2020, Carbon4Pur, s’est attelé à réduire l’empreinte carbone des intermédiaires de polyuréthane et de diminuer la consommation d’énergie du procédé. Carbon4Pur utilise le monoxyde de carbone (CO) et le CO2 contenus dans des effluents gazeux industriels pour les transformer en polyols grâce au procédé de conversion catalytique du chimiste Covestro. Ce procédé en est toutefois encore au stade du laboratoire. À la fin du projet, l’empreinte carbone des intermédiaires de polyuréthane a été réduite de 10 %.
Pour aller plus loin dans la durabilité, des chercheurs de l’Université de Cordoue ont réussi à utiliser des déchets de blé, qui, une fois liquéfiés, produisent des polyols. Jusqu’à présent, l’huile de ricin a été l’un des principaux candidats dans la course à l’obtention d’une mousse de polyuréthane sans pétrole. Cependant, cette huile ne permet pas de retrouver toutes les propriétés nécessaires à la formation de mousse. Les chercheurs ont donc remplacé la moitié de cette huile dans le procédé par de la paille de blé, avec des résultats qui offrent des caractéristiques très similaires à celles générées par les processus de fabrication traditionnels.
Recycler le polyuréthane
Le polyuréthane ne se dégrade pas en présence de chaleur, il est donc impossible de le recycler en le faisant fondre, comme c’est le cas pour d’autres plastiques tel que le PET contenu dans les bouteilles. Auparavant, l’une des seules possibilités de fin de vie était de broyer la mousse pour l’incorporer dans des murs ou du bitume. Mais depuis quelques années, de nouvelles méthodes se sont développées.
Le polyuréthane peut être recyclé par des voies chimiques comme l’acidolyse, la glycolyse ou l’aminolyse. L’acidolyse consiste à placer le polyuréthane broyé dans une cuve en présence d’acide carboxylique et de polyols. Le processus permet de récupérer des polyols qui peuvent ensuite être réutilisés pour la production d’autres polymères. La glycolyse présente le même principe que l’acidolyse, mais l’acide est remplacé par du diéthylène glycol, tout comme l’aminolyse qui utilise de l’ammoniac, des amines ou des alcanolamines. Dans l’ensemble de ces procédés, la chaîne de polymères est cassée pour revenir au monomère de base.
Mais d’autres chercheurs se sont lancés dans le développement de procédés innovants comme la dégradation enzymatique contrôlée. Cette technique s’appuie sur des enzymes, appelées estérases, qui hydrolysent, c’est-à-dire cassent les fonctions esters, et qui laissent intacte la fonction uréthane. À partir des produits obtenus, il est donc possible de faire de nouveaux polyuréthanes sans ajouter d’isocyanates, ou même d’autres polymères. Les enzymes sont très sélectives et permettent de cibler des groupements particuliers.
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