« Nous n’avons pas fait un rapport idéologique ou à charge, défend Nicolas Imbert, directeur de Green Cross France & Territoires. Nous avons travaillé de façon à nous demander quelles mesures pouvaient avoir un vrai levier pour le climat et l’environnement et qui pouvaient aussi générer de l’emploi et une nouvelle forme de prospérité pour une filière mise à mal qui a besoin de se réinventer. »
Il apparaît que les 10 propositions construites avec l’ensemble des acteurs socio-économiques (qui restent anonymes) ne constituent pas une feuille de route idéale ou idéologique de ce qu’il faudrait faire. Au menu, pas d’objectifs contraignants de réduction des émissions de gaz à effet de serre ou d’interdiction de distribution des dividendes des actionnaires, comme le prône Greenpeace. Ces propositions constituent plutôt « une première étape opérationnelle », reconnaît Nicolas Imbert. « Nous avons mis en avant 4 piliers : le renouvellement de la flotte, l’efficacité opérationnelle, une fiscalité ciblée et l’implication de l’ensemble de la filière du transport aérien, depuis le constructeur jusqu’au voyagiste », résume Nicolas Imbert.
Renouveler la flotte et améliorer l’efficacité opérationnelle
Des avions modernes volent en même temps que des avions plus énergivores. La première proposition vise à travailler sur la fiscalité pour rendre incontournable le démantèlement des avions de la flotte consommant plus de 30 % de carburant de plus par km/passage que le leader de leur catégorie. La deuxième permet de travailler sur le post carbone en obligeant les compagnies aériennes à remettre en service les avions les moins émetteurs après la crise sanitaire. « Il est essentiel que la fiscalité rende incontournable le démantèlement des avions et empêche leur vente à l’exportation, prévient Nicolas Imbert. Nous avons déjà observé avec le transport automobile l’effet désastreux qui consistait à exporter en Afrique des véhicules dont on ne voulait plus en Europe pour des questions d’émissions. »
Les propositions font une place à l’efficacité opérationnelle. L’objectif est de développer l’éco-pilotage en vol et au sol, ainsi que l’efficacité énergétique. Green Cross France & Territoires propose de rendre obligatoire la certification Airport Carbon Accreditation (ACA) niveau 3 ou supérieur de tous les aéroports français avant le 1er janvier 2022.
Une nouvelle fiscalité plus égalitaire
Le secteur aérien bénéficie d’exemptions fiscales historiques sur la TVA et sur le carburant JET-A1. Ces exemptions fiscales confèrent un avantage compétitif à l’aérien par rapport au train ou aux transports en commun routiers. Green Cross propose donc l’instauration d’une taxe carburant qui fonctionnerait comme une TIPP flottante, évoluant suivant le prix du baril. « Il est temps de rétablir l’égalité des prix », insiste Nicolas Imbert. Cette nouvelle taxe s’élèverait à 40 % lorsque le pétrole se trouve sous la barre des 50 euros, 20 % jusqu’à 80 euros et 8 % au-delà. En parallèle, les carburants alternatifs plus durables seraient défiscalisés.
En plus, l’association souhaite rendre obligatoire la compensation carbone pour tous les trajets intérieurs, notamment entre la métropole et les outremers. Elle s’établirait à 24 euros la tonne de CO2 émise en 2021, jusqu’à atteindre 100 euros la tonne en 2035.
Un meilleur aménagement du territoire
« En matière d’aménagement du territoire, nous insistons beaucoup sur le fait que pour tous les trajets de moins de 3 heures où le rail existe, il n’y a aucun intérêt à prendre l’avion si ce n’est un effet d’aubaine dû à une illusion des prix bas, explique Nicolas Imbert. En arrêtant la distorsion de concurrence qui met l’avion en avant, le rail devient naturellement l’outil d’aménagement du territoire et de transport pour tous. »
Là où Green Cross France & Territoires met en avant l’avantage de l’avion sur le train pour tous les trajets de moins de 3 heures, Greenpeace recommande de retenir un seuil de 6 heures. « L’urgence est de s’entendre sur un horizon de 3 heures de train dans un premier temps pour avoir une reconstruction responsable du secteur aérien, car on saurait le faire en France et en Europe à l’horizon de 6 mois à un an, défend Nicolas Imbert. Une ambition de 6 heures suppose un plan d’investissement pour le transport ferroviaire important que nous pourrions soutenir dans une deuxième étape, d’ici 2022. »
Impliquer l’ensemble de la filière
Le social doit prendre en compte l’ensemble de la filière. Green Cross demande à ce que l’ensemble des voyagistes consacrent 10 % de leurs commissions à des projets de compensation à haute valeur écologique et sociale. L’association appelle les opérateurs à se doter d’une vraie politique de transformation autour de la sortie du pastique, de l’économie circulaire, de la diversité et du handicap d’ici juin 2021. Enfin, elle appelle à une approche sanitaire et de santé irréprochable, sur l’ensemble de la chaîne pour garantir des conditions sanitaires irréprochables.
Face aux nombreux témoignages de consommateurs, Green Cross France & Territoires propose d’installer avant juin une mission d’enquête parlementaire sur les annulations, surfacturations et reports de vols dans le cadre de la crise sanitaire. Elle s’intéresserait en particulier aux surfacturations de vols opérés dans le contexte du rapatriement par les compagnies aériennes françaises ou ayant opéré à la demande d’opérateurs français.
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