Au cours des précédentes décennies, les pays européens ont fermé des réacteurs nucléaires, ce qui les a obligés à se tourner vers d’autres sources d’énergie comme le gaz russe. Pendant la crise, la Bulgarie a commencé à faire pression pour un retour au nucléaire tandis que l’opinion allemande, inquiète de son approvisionnement en gaz, a déjà fait marche arrière en changeant sa position sur la suppression progressive du nucléaire.
L’Italie a décidé elle aussi que cette attitude était la plus prudente et après une interdiction de 20 ans, la France aide l’Italie à renouer avec le nucléaire. (lire l’article sur CSMonitor.com)
Voici ce que relate le CSMonitor.com : « Vingt ans après avoir interdit de nouvelles centrales nucléaires, l’Italie se tourne vers la France pour relancer son programme. Le 24 février, le Premier ministre italien Silvio Berlusconi a signé un accord de coopération avec le Président Nicolas Sarkozy pour la construction de quatre centrales nucléaires en Italie. Ce pays avait fermé ses quatre centrales nucléaires à la suite d’un référendum national en 1987 alors que la fusion du réacteur russe à Tchernobyl avait entraîné une vague de peur et de protestations. Aujourd’hui, elle rejoint un nombre croissant de pays européens incluant l’Allemagne, la Slovaquie et la Bulgarie qui, préoccupés des émissions de CO2 et de la fiabilité de l’approvisionnement énergétique en provenance de Russie, se tournent à nouveau vers l’énergie nucléaire ».
Ceci était inévitable, même sans la crise du gaz, car la situation n’est pas à long-terme favorable à l’Europe. Il est inévitable que le Royaume-Uni se tourne à nouveau avec force vers le nucléaire (à moins que ses citoyens ne meurent de froid au fur et à mesure que les ressources en énergie fossile s’épuisent), de même que les Etats-Unis développent massivement le nucléaire dans les décennies à venir.
Les lecteurs fidèles savent que je suis vivement favorable au développement des énergies renouvelables, mais l’électricité renouvelable n’en est qu’à ses balbutiements. L’électricité produite par les énergies renouvelables (moins l’hydraulique) compte pour moins de 3% de la production totale d’électricité américaine, et même la prévision d’une croissance agressive ne changerait pas radicalement la donne. Pourquoi ? La production totale d’électricité renouvelable en 2007 a atteint son plus haut niveau de tous les temps avec une production de 105,3 millions de megawatt-heure. La croissance en 2006 a été impressionnante : presque 10 millions de megawatt-heure. (Les données pour 2008 ne sont pas encore complètes mais la croissance semble être de l’ordre de 10 millions de megawatt-heure de plus qu’en 2007). Cependant, la hausse moyenne de la demande en électricité sur les 10 dernières années est de 66 millions de megawatt-heure. À ce rythme, la production d’électricité renouvelable pourrait quadrupler dans les 5 prochaines années et presque couvrir la hausse de la demande.
Si nous voulons sérieusement tourner la page du charbon, nous allons devoir développer l’énergie nucléaire. Il nous faudrait développer les énergies renouvelables six fois plus vite qu’au rythme actuel pour suivre simplement la hausse de la demande. Supplanter le charbon est hors de question, à moins que la demande ne soit réduite. Je ne suis en aucun cas opposé au nucléaire. Certes, des questions environnementales ne sont pas encore complètement résolues, mais la même chose est valable pour n’importe quelle source d’énergie.Je sais toutefois une chose sur la nature humaine. Lorsque l’énergie devient suffisamment chère comme ce fut le cas pour le gaz l’été dernier, les préoccupations environnementales s’effacent devant les préoccupations économiques. Il suffit de voir la popularité de la campagne « Forer, ici et maintenant » (‘drill here, drill now’). C’est l’un des sujets sur lesquels John McCain a marqué des points pendant la campagne présidentielle. Si le gaz coûte 1,50 dollars le gallon, les gens s’inquiètent de l’impact des forages sur l’environnement. À 4 dollars le gallon, ils sont prêts à vous laisser forer dans leur jardin.La même chose sera vraie du nucléaire. L’opposition sera inversement proportionnelle au coût de l’électricité.
Robert Rapier est directeur ingénierie chez Accsys Technologies PLC et anime le blog R-Squared Energy Blog
Cet article se trouve dans le dossier :
Hydrogène décarboné : où en est la France ?
- France relance : pleins phares sur l’hydrogène
- Hydrogène : une filière de l’électrolyse en construction
- L’hydrogène, un vecteur énergétique alternatif à l’électricité pour la mobilité lourde
- Comment rendre l’hydrogène vraiment écolo?