Un bon béton nécessite du sable, des granulats, de l’eau et du ciment pour lier les constituants entre eux. Pour économiser les ressources naturelles non renouvelables, Ciments Calcia et Alkern ont substitué les granulats par une version renouvelable à base de miscanthus. Ce nouveau matériau de construction est constitué en moyenne à 60% de broyats de miscanthus en substitution des granulats traditionnels. Ils ont ainsi obtenu un prototype de bloc de béton de 20x50x20 cm pesant 17 kg, un poids comparable au bloc classique. Le béton de miscanthus aura bientôt toute sa gamme : bloc standard, bloc poteau, planelle isolée et éléments de chaînage horizontal.
De nombreux essais de caractérisation du bloc en béton de miscanthus ont été validés ou sont toujours en cours, avec une étape clé à venir : le dépôt de la demande d’ATEx auprès du CSTB à l’automne. Pour une obtention prévue fin 2017. Cette procédure rapide d’évaluation technique est nécessaire pour son utilisation expérimentale en février 2018. Le béton de miscanthus sera alors déployé sur les 1.700 m2 de façade de 46 logements sociaux à Chanteloup-en-Brie (77). Ce permier chantier nécessitera 50 tonnes de miscanthus.
Structurer une nouvelle filière
Ce nouveau bloc en béton s’inscrit dans le projet de constitution d’une filière complète autour du miscanthus en tant que matériau biosourcé en Île-de-France. Un projet piloté par l’association Biomis G3 qui oeuvre depuis 4 ans à réunir partenaires institutionnels, coopératives agricoles, acteurs de la recherche et industriels. Avec pour objectif de produire et transformer localement la plante de miscanthus. A l’instar de ce qui a été fait dans la région châlonnaise où 450 hectares sont déjà cultivés.
Après transformation, le miscanthus peut être utilisé comme bioénergie, mais surtout dans le cas échéant comme biomatériau. « La culture du miscanthus sera possible si tous les acteurs des filières naissantes de production de matériaux agro-sourcés s’entendent pour construire une chaîne de valeur permettant une rentabilité partagée, au bénéfice d’une économie locale nouvelle », prévient Jérôme Mat, vice-président de Châlons-en-Champagne Agglo, délégué au développement économique.
Vous avez dit « miscanthus »?
Le miscanthus est une plante idéale, à l’instar du chanvre. Il pousse sans pesticides et sans irrigation sur tous les sols. « Le fait que sa culture s’adapte idéalement aux terres polluées, dégradées ou délaissées, s’avère un atout phare, note Ciments Calcia. Elle n’entre pas ainsi en concurrence avec l’agriculture alimentaire ; la production de miscanthus s’inscrit au contraire en complément de ressources et débouchés économiques pour les agriculteurs ».
La production s’échelonne sur une durée de 15 à 20 ans sans ressemer ni engrais. Par ailleurs, elle est stérile, à rhizome et non invasive. Chaque hectare cultivé produit jusqu’à 10 tonnes de miscanthus par an. En développant sa culture sur chaque territoire, il réduirait l’empreinte carbone du bâtiment en économisant le transport de granulats sur de longues distances.
Un matériau performant ?
La résistance thermique du bloc en béton de miscanthus s’élève à 0,7 mètres carrés-kelvins par watt (m2.K/W) contre 0,2 pour les blocs traditionnels. Le matériau obtenu est donc trois fois plus isolant que le béton classique. Il répond ainsi aux spécificités de la RT 2012 et de la future réglementation environnementale RE 2018. Un avantage certain, alors que le surcoût ne serait que de 2%.
Ce biomatériau a aussi démontré son efficacité en matière de confort acoustique avec une atténuation des bruits de 54 décibels lorsqu’un mur est enduit sur une face. Sa tenue au feu est également exceptionnelle : 4 heures.
Par Matthieu Combe, journaliste scientifique
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