Le Grand Prix National de l’Ingénierie récompense chaque année une équipe qui a concouru à la conception d’un produit ou projet remarquable dans le domaine de l’industrie ou de la construction. Cette année, le thème du concours coorganisé par Syntec-Ingénierie[1] avait pour thème « Efficacité énergétique : Cap sur la neutralité carbone ! ».
Un changement de paradigme total dans l’acte de concevoir les villages olympiques
Tous les deux ans, une ville du monde se voit attribuer l’honneur d’organiser les Jeux olympiques (mais aussi Paralympiques). Si ces événements sont inoubliables, ils sont pourtant très courts. Par le passé, trop de sites olympiques ont ainsi été abandonnés, ce qui représente un immense gaspillage, tant économique qu’environnemental. Le village olympique de Rio 2016, qui devait par la suite accueillir des appartements de luxe, est ainsi en majorité vide d’occupants et parfois qualifié de « ville fantôme ».
Le projet Paris 2024 devrait fort heureusement être aux antipodes du contre-exemple Rio 2016.
Dans un communiqué de presse, Simon Dumoulin, directeur du pôle Urbain et Environnement chez Ingérop, explique que l’organisation des JO 2024 représente un changement de paradigme :
« Avant, on faisait un village olympique qui, à terme, devenait un quartier. Aujourd’hui, le village est conçu comme un quartier qui se trouve accueillir un événement planétaire. On a retourné la problématique. »
Une friche industrielle transformée en vitrine de l’excellence environnementale
Le projet retenu pour Paris 2024 est unique en son genre. Situé sur une ancienne friche industrielle, le village des Athlètes, dont la construction est en cours, est pensé comme un démonstrateur de la ville durable à la française.
Le Maître d’Ouvrage, la Société de Livraison des Ouvrages olympiques (SOLIDEO), a ainsi confié à Ingérop la mise en œuvre de cet immense chantier de 52 hectares. Immédiatement après l’accueil des JO, le futur quartier devrait ainsi accueillir 6 000 habitants et autant d’employés, dès 2025.
Une fois le chantier achevé, ce quartier bas-carbone, comprendra :
- 165 900 m² de logements et commerces ;
- 104 500 m² de bureaux ;
- Des équipements et espaces publics : écoles primaires, lycée, gymnase… ;
- 7 hectares d’espaces verts.
Dans une vidéo publiée par Syntec-Ingénierie, Stéphanie Vallerent, cheffe de projet innovation chez Ingérop, affirme que ce projet est « Innovant sur les ambitions environnementales qui sont poussées au maximum de tout ce qu’on peut faire, et sur tous les critères, là ou habituellement on va juste pousser un ou deux critères. »
En quoi ce projet est-il plus « écologique » que d’autres ?
Premièrement, le projet est implanté sur une ancienne friche industrielle, qu’il a fallu dépolluer. Il faut ainsi rappeler que l’absence de toute artificialisation nette des sols en 2050 est un objectif inscrit dans la loi Climat et Résilience promulguée le 22 août 2021. La réhabilitation des friches est donc indispensable et leur dépollution répond à des enjeux majeurs.
Deuxièmement, le projet fait la part belle au réemploi :
- 20 000m³ de déblais ont été utilisés en remblais.
- 50 % des matériaux pour les revêtements sont issus du réemploi ou du recyclage.
- Presque 100 % des bétons issus de la déconstruction des bâtiments en place auparavant ont été réemployés dans la structure des chaussées.
Par ailleurs, de nombreux autres critères ambitieux ont été pris en compte :
- 75% de la terre végétale utilisée produite à partir du site ;
- gestion des eaux pluviales à ciel ouvert pour permettre un retour de l’eau à la nature ;
- maximisation des phénomènes de rafraîchissement urbain et d’évapotranspiration pour limiter les îlots de chaleur.
Enfin, afin de permettre la réversibilité des bâtiments, Ingérop a aussi proposé des solutions particulièrement innovantes, comme la mise en place de salles de bains provisoires qui puissent être récupérées à la fin des jeux pour être réutilisées lors d’autres opérations.
Les Jeux olympiques peuvent-ils devenir (enfin) plus durables ?
Ce projet a aussi le mérite de montrer qu’il est possible d’imaginer l’organisation d’événements ponctuels avec une vision sur le long terme, une vision « plus durable ».
On a tous en tête le fiasco environnemental que peuvent représenter certains grands événements sportifs passés ou à venir. C’était particulièrement vrai pour certaines éditions des JO (érosion des sols et neige artificielle en abondance pour les JO de Pékin et de Sotchi). Ça l’est aussi pour d’autres : la future coupe du monde de football 2022 au Qatar et ses stades climatisés devraient ainsi nous coûter entre 3,6 et 20 millions de tonnes de CO2…
Les JO de Tokyo 2020 sembleraient néanmoins avoir amorcé un tournant dans l’organisation de JO plus durables. Paris a en effet l’ambition de faire de Paris 2024 un « modèle » : les prochains jeux d’été deviendraient alors les premiers jeux alignés avec les objectifs de l’Accord de Paris, une ambition qui s’était d’ailleurs concrétisée dès 2016 par un partenariat stratégique entre le WWF France et le comité de candidature Paris 2024.
[1] En partenariat avec le ministère de la Transition écologique, le ministère de la Cohésion des territoires et des Relations avec les collectivités territoriales, le ministère de l’Économie, des Finances et de la Relance, le ministère de l’Éducation nationale et de la jeunesse et Concepteurs d’Avenirs
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