Le GNL, gaz naturel liquéfié, est constitué à plus de 95% de méthane. Ce dernier, à l’instar du CO2, est un gaz à effet de serre. Molécule pour molécule, le méthane est un GES beaucoup plus puissant que le CO2, de l’ordre de 80 fois. Cependant, la comparaison ne s’arrête pas là. Ainsi, le méthane persiste beaucoup moins longtemps dans l’atmosphère – une dizaine d’années – que le CO2 – plus d’un siècle -. En terme de potentiel de réchauffement global (PRG), le méthane est tout de même, à l’échelle d’un siècle, 25 fois plus puissant que le CO2.
Voilà pour l’impact atmosphérique. Mais ce n’est pas tout, car l’obtention du GNL est également très énergivore et alourdit son cycle de vie. En effet, pour obtenir du GNL, il faut liquéfier le gaz, à pression atmosphérique, jusqu’à -163°C, ce qui nécessite une grande quantité d’énergie. Sous forme liquide, le gaz peut être transporté sur de grandes distances et en grande quantité, puisqu’un mètre cube de GNL contient pas moins de 600 mètres cube de gaz.
Ce coût énergétique de production est à l’origine de controverses récentes, notamment au sujet du transport maritime, qui utilise de plus en plus le GNL pour remplacer le fioul. Ainsi, le navire de croisière Euribia, entièrement propulsé au GNL, affirme que ce type de propulsion (ajouté à d’autres technologies comme par exemple un revêtement innovant enduisant la coque) lui permet de réduire de 20% ses émissions de gaz à effet de serre.
Il est vrai que le GNL émet moins de gaz à effet de serre que le fioul lors de sa combustion. Et aussi moins de gaz polluants, comme les oxydes de soufre, d’azote, et des particules, tous considérés comme dangereux pour la santé.
En ce qui concerne les émissions de CO2, s’il est juste de dire que la combustion de GNL est moins émettrice que celle du fioul, cette affirmation semble ne pas tenir compte du cycle de vie du GNL et de toutes les émissions liées à sa production et son stockage.
Tout d’abord, le GNL est une énergie fossile, il faut donc aller la chercher en profondeur, dans la roche. Aux Etats-Unis, principal fournisseur de l’hexagone, le méthane qui sera liquéfié pour produire du GNL transportable est extrait des roches de schistes par forage et fracturation hydrauliques, deux procédés qui peuvent se révéler extrêmement polluants, notamment car ils entraînent d’importantes fuites de méthane. Pour rappel, la fracturation hydraulique est interdite en France.
Après extraction, la liquéfaction du gaz est également un procédé énergivore. Enfin, l’utilisation du GNL, pour le transport maritime également, n’est pas neutre, même si difficile à quantifier. Concrètement, le GNL utilisé dans les moteurs des navires par exemple n’est pas entièrement brûlé à cause de nombreuses fuites.
En résumé, les fuites de méthane, lors de son extraction et de sa combustion dans les moteurs, plombent le bilan du GNL. Rendant même ce bilan parfois pire que celui du fioul. Bien sûr, le transport maritime ne concentre pas tous les usages du GNL.
Selon la feuille de route de décarbonation de la filière maritime, publiée en janvier 2023, le GNL pourrait, dans le domaine maritime, permettre de baisser les émissions de 17% au maximum. Selon le type de motorisation et l’origine du GNL, l’efficacité du GNL comparée à celle du fioul irait de 17% de baisse des émissions à 6% de hausse. Une efficacité donc toute relative.
La production de bio-GNL pourrait, à terme, remplacer celle de GNL, avec une empreinte moindre au niveau écologique. Cependant, la compétition pour son utilisation, notamment avec le secteur aérien, laisse penser que la quantité de bio-GNL disponible sera probablement insuffisante au vu des besoins potentiels pour les usages liés à la mobilité.
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