Jeudi 7 janvier 2021, RTE prévoyait que la consommation nationale atteindrait 88 000 mégawatts (MW) le lendemain. En cause : une baisse des températures prévue entre -4 et -4,5°C sous les normales de saison. Si les moyens de production étaient suffisants (88 200 MW), les marges pour répondre aux aléas météorologiques ou techniques étaient faibles. Le gestionnaire de réseau a donc demandé aux Français de réduire leur consommation sur la tranche horaire 7h-13h avec un signal rouge sur le site Ecowatt, sorte de météo de l’électricité. « Finalement, le lendemain, on était vraiment loin du risque de coupure parce que les entreprises avaient pu réduire leur consommation, la météo était meilleure que prévue et les Français ont fait des écogestes en réduisant leur consommation », indique RTE à Techniques de l’ingénieur.
Des risques de coupure en cas de vague de froid importante
Chaque année, RTE signale que l’hiver peut être tendu pour le réseau électrique en cas de vague de froid importante. RTE confirme que l’hiver 2020-2021 reste placé sous vigilance particulière, principalement à cause de la crise sanitaire. Avec les décalages dans les plannings d’arrêts des réacteurs nucléaires pour maintenance, 13 réacteurs seront à l’arrêt fin février. En février et début mars, le risque de coupure d’électricité sera donc plus important que les années précédentes.
Le risque de coupure se manifesterait principalement en cas de vague de froid importante. En France, la consommation électrique dépend fortement de la température. « À chaque degré sous les normales de saison, on consomme environ 2 400 MW de plus, soit quasiment la consommation de la ville de Paris », avance RTE.
Quels moyens pour faire face à une vague de froid exceptionnel ?
Avant d’organiser des coupures d’électricité, RTE dispose de différents leviers. Il peut d’abord importer de l’électricité et demander aux Français de réduire leur consommation. Si cela ne suffit pas, il peut arrêter la consommation de gros sites industriels. Enfin, il peut baisser la tension sur le réseau de distribution de 5 % pour réduire de 5 % la consommation.
Afin de limiter la consommation des entreprises, RTE dispose de deux solutions : l’effacement et l’interruptibilité. L’interruptibilité est un dispositif hors marché de l’électricité qui lie RTE à des sites industriels gros consommateurs en France. « Ces sites sont rémunérés pour stopper leur consommation d’électricité en cas de besoin », précise RTE. L’effacement consiste à activer des capacités de baisse de consommation à un moment donné. Celles-ci sont mises sur le marché soit par des entreprises, soit par des agrégateurs de consommation de particuliers. « L’interruptibilité a un potentiel d’environ 1 300 MW, l’effacement d’environ 3 000 MW », précise RTE.
La Commission des affaires économiques du Sénat réagit
Face à cette situation, la Commission des affaires économiques du Sénat appelle le Gouvernement à prendre des mesures d’urgence. Elle appelle notamment à intensifier les appels d’offres en matière d’effacements de consommation, à rehausser le chèque énergie à l’attention des ménages en situation de précarité énergétique et à renforcer les dispositifs de soutien à la rénovation énergétique.
En parallèle, la commission juge que la sécurité d’approvisionnement passe par un soutien réaffirmé à la filière nucléaire. Pour Sophie Primas (Les Républicains – Yvelines), présidente de la commission : « La ministre de la transition écologique a indiqué en novembre à notre commission qu’il fallait « diversifier notre mix électrique afin d’être moins à la merci de ce type d’aléas ». Elle se trompe : c’est au contraire l’énergie nucléaire qui constitue le garant de notre sécurité d’approvisionnement. Faute d’un soutien suffisant à cette filière, ce sont aujourd’hui des centrales thermiques, de surcroît étrangères, qui tournent à plein régime, non des panneaux solaires ou des éoliennes, soumis aux aléas météorologiques ! Nous n’avons pas fini d’en payer les conséquences ! Le Gouvernement doit réagir ! ».
RTE n’a pas vocation à réagir à ces propositions de la commission du Sénat. Pour y voir plus clair sur les possibilités de coexistence entre les différents moyens de production, il publiera prochainement un rapport évaluant la sécurité d’approvisionnement d’ici 10 ans. Un autre rapport important sur la faisabilité technique d’un mix électrique à forte proportion d’énergies renouvelables d’ici 2050 est attendu à la fin du mois.
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