Observation de la Terre, géolocalisation, télécommunications... Les équipes techniques du CNES mettent les données et technologies spatiales au service du développement de solutions pour la mobilité, la santé et l’environnement. Lumière sur les solutions pour la transition agroécologique et numérique avec Thierry Chapuis.
Le programme Connect by CNES vise à promouvoir les technologies et données spatiales auprès d’entreprises, start-up et institutions dans le domaine de la mobilité, de la santé et de l’environnement dans le but de développer des produits et des services. Pour le monde agricole, cela passe par l’imagerie spatiale, les données météorologiques, la géolocalisation, ainsi que les télécoms par satellite. L’accompagnement se fait à tous les stades : idéation, incubation, accélération, expertise technique, financement, formation et promotion. Thierry Chapuis, expert en applications spatiales à la Direction de l’Innovation, des Applications et de la Science du CNES, explique les apports du spatial pour l’agriculture.
Techniques de l’Ingénieur : Quels sont les différents types de projets proposés par Connect by CNES pour l’agriculture ?
Thierry Chapuis : Que cela concerne l’observation la Terre, la géolocalisation ou encore les télécommunications, les technologies spatiales participent à l’essor de l’agriculture de précision et de l’agroécologie. Concrètement, l’agriculture utilise quatre types de données spatiales : l’observation satellitaire, les données météorologiques, la géolocalisation par satellite, et les applications de communication par satellite au service de capteurs fournissant des données in situ.
Le plus gros volet concerne l’observation satellitaire grâce au programme européen Copernicus, plus particulièrement les satellites Sentinel 1 et 2. Toutes les images sont mises à disposition gratuitement. Avec un satellite optique et un satellite radar d’une résolution de 10 m x 10 m, la solution est particulièrement intéressante pour les grandes cultures. Le traitement des images délivrées par les capteurs optiques des satellites permet de mesurer et de suivre l’évolution de paramètres tels que le taux de chlorophylle des plantes, l’indice de végétation, la biomasse ou le stress hydrique. Les données radar apportent une information sur le taux d’humidité du sol ou la hauteur des plantes. De façon opérationnelle, cela permet de contrôler de manière régulière l’avancement de la végétation, d’avoir une meilleure connaissance de l’occupation des champs et de moduler l’irrigation, l’usage des produits phytosanitaires et des engrais.
Dans le cadre de la réduction des émissions de gaz à effet de serre, nous travaillons aussi avec l’INRAE sur une augmentation du stockage du carbone dans les sols agricoles avec la mise en œuvre des « couverts intermédiaires » pour éviter de laisser le sol nu. Nous souhaitons estimer au mieux l’impact de ces pratiques culturales sur le bilan carbone.
Pouvez-vous nous donner des exemples concrets de projets accompagnés ?
Une douzaine de start-up se sont récemment créées en France en utilisant les images satellitaires. Nous pouvons citer la société TerraNIS qui commercialise le service WAGO afin d’optimiser le pilotage de l’irrigation des cultures. Il y a aussi SpaceSense qui veut rendre le plus simple possible l’utilisation des images satellites [et qui a levé un million d’euros en octobre 2020, ndlr]. La société Kermap a développé l’application Nimbo de classification des cultures à l’échelle européenne.
Nous pouvons également citer MyEasyFarm qui consolide l’ensemble des données collectées par satellites, drones ou capteurs embarqués sur les matériels agricoles. La solution fournit des cartes de modulation chargées à bord des tracteurs pour adapter la dose d’intrant en fonction de la géolocalisation. Dans le domaine de la robotique agricole, nous pouvons citer les robots autonomes de désherbage et de travail du sol basé sur la géolocalisation de Naïo Technologies.
Enfin, les assurances sont très intéressées par les images satellitaires qui permettent de réaliser de premières estimations suite à des catastrophes naturelles. À partir du moment où les images permettent d’avoir une idée de la vigueur des plantes, dans le cadre d’un gel ou épisode de sécheresse marqué, cela aide les assureurs à recenser sur place les dégâts et estimer les coûts.
Comment avoir accès à ces données ?
Le CNES a mis en place son propre service d’accès aux données Copernicus : la plateforme Peps. Ce service permet d’accéder aux images et d’avoir accès à une bibliothèque de logiciels de traitement d’image. Pour le reste, nous accompagnons les start-up sur les financements et nous pouvons mettre en œuvre des conventions de partenariat pour certains projets de plus longue durée.
L’un de nos objectifs est que les données ou signaux fournis par les satellites se retrouvent dans le maximum d’applications et créent de la valeur ajoutée économique ou sociétale. Les programmes européens Copernicus et Galileo s’inscrivant dans la durée contribuent fortement au développement de services ou produits opérationnels.
Dès Landsat, et en France SPOT1 lancé par Ariane, les agronomes ont utilisé les données satellitaires pour suivre la végétation et spécialement les cultures.
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