La course effrénée à l’espace pendant la guerre froide a poussé la communauté internationale à s’interroger sur le statut juridique de l’espace et des corps célestes, et sur les limites de son utilisation. En 1967, plus d’une centaine de pays signent le Traité de l’espace qui stipule que l’exploration et l’utilisation de l’espace sont libres dès lors qu’elles servent des objectifs pacifiques. Le traité précise aussi qu’aucune nation ne peut s’approprier des territoires extra-terrestres ni par leur utilisation, ni par leur occupation, ni par tout autre moyen. A l’instar du statut de l’Antarctique sur Terre, aucun pays ne peut revendiquer une parcelle de la Lune, de Mars ou d’un astéroïde.
Mais ce traité visait essentiellement à empêcher l’installation d’armes ou d’infrastructures militaires dans l’espace et à laisser le champ libre à l’exploration scientifique. Pour ce qui est de l’exploitation des ressources et de la propriété privée sur celles-ci, il reste relativement flou et laisse la porte ouverte à plusieurs interprétations juridiques dans lesquelles certains se sont déjà engouffrés. Pourtant, un texte complémentaire, clarifiait ces points relatifs à la propriété et l’exploitation des ressources. Il s’agit de l’Accord régissant les activités des États sur la Lune et les autres corps célestes adopté le 5 décembre 1979 et entré en vigueur le 11 juillet 1984 (version française en page 39) qui plaçait l’exploitation des ressources naturelles de la Lune sous une autorité internationale afin d’en avoir une approche durable et équitable et qui stipulait qu’aucune entité ne pouvait s’approprier ces ressources qui appartiennent à l’ensemble de l’humanité. Mais cet accord a été un échec. Il n’a été ratifié que par 15 pays et par aucun grand pays ayant un programme spatial permettant d’aboutir à une installation sur la Lune (donc ni les USA, ni la Russie, ni la Chine, ni l’Inde, ni les principaux pays spatiaux européens – France, Allemagne, Italie, Royaume-Uni etc.).
États-Unis et Luxembourg autorisent l’exploitation
En novembre 2015, les États-Unis ont adopté une loi qui reconnaît le droit de propriété des entreprises du secteur privé américaines sur les ressources obtenues dans l’espace. Un peu comme l’équivalent du droit maritime international qui accorde le droit de propriété aux ressources pêchées en haute mer par le premier qui met la main dessus. Sauf que ce texte précise néanmoins que les ressources doivent être « abiotiques ». Aussi, en cas de découverte du vivant, celui-ci ne pourrait pas être privatisé. Cette interprétation du traité de 1967 ne fait pas consensus, pour d’autres, cette loi américaine ne peut être valide, puisque les Etats-Unis ne peuvent transférer un droit qu’ils ne possèdent pas. En effet, le traité stipule que l’exploration et l’utilisation de l’espace doivent se faire pour le bien de tous : la question est donc ouverte. Est-ce qu’une activité minière privée sur un astéroïde ou sur la Lune bénéficie à tous ? Si oui, comment l’encadrer, quelles limites lui donner etc. Des thématiques débattues mais loin d’être tranchées au sein de la communauté internationale.
En Europe, c’est le Luxembourg qui a dégainé le premier sur le sujet. En effet, en juillet 2017, le Grand-Duché a adopté une loi autorisant l’exploration et l’utilisation des ressources de l’espace.
Avec ce cadre, toute société établie au Luxembourg, y compris une société étrangère, peut extraire et s’approprier des ressources minières (métaux, hydrocarbures) ou de l’eau dans le but d’en faire commerce sur Terre ou de les utiliser pour une colonie humaine ou une base spatiale. Cependant, le Luxembourg a prévu un encadrement de cette exploitation via la mise en place d’un régulateur qui délivrerait des licences d’utilisation des matériaux.
Que ce soit le cas des États-Unis ou du Luxembourg, ces initiatives pour légiférer sur la propriété privée spatiale de manière unilatérale et de manière assez préventive – on est encore loin d’une exploitation effective et massive des ressources lunaires ou d’astéroïdes – ont surtout rassuré les investisseurs et les entreprises qui commencent à s’intéresser à ce secteur d’activité tels que les américains Planetary Resources et Deep Space Industries ou encore le japonais ispace. Elles ont aussi permis de relancer la réflexion au niveau international en vue d’aboutir à un cadre réglementaire assurant que cette exploitation ne se fasse pas au détriment de certaines populations, de l’environnement ou du patrimoine culturel de l’humanité et ne se fasse pas sous la forme d’une nouvelle ruée vers l’or.
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