Une croissance exceptionnelle des énergies renouvelables. Selon une étude publiée par l’ONG américaine Global Energy Monitor (GEM), la Chine a démarré en 2023 la construction de l’équivalent de 180 GW (Gigawatt) d’énergie solaire et de 159 GW d’énergie éolienne sur son territoire, soit plus du double de l’ensemble des projets débutés dans le reste du monde. Elle se positionne clairement comme leader mondial dans ce domaine et un autre chiffre illustre à lui seul la nature active de son engagement : le taux de construction. Alors qu’au niveau mondial, 7 % des projets solaires et éoliens à grande échelle programmés sont en cours de construction, la Chine en a démarré un tiers.
D’après l’administration chinoise, la capacité totale des énergies solaires et éoliennes du pays atteindrait 1 120 GW au premier trimestre 2024. De son côté, le GEM estime qu’elle se situe à 758 GW. Malgré ce niveau de développement moins important qu’annoncé, les énergies renouvelables représentent désormais 37 % de la capacité électrique totale du pays, soit une augmentation de 8 % par rapport à 2022. Et elles devraient largement dépasser la capacité du charbon en 2024, dont le niveau se situe actuellement à 39 %.
La capacité de production du solaire a dépassé pour la première fois celle de l’éolien en 2022 et depuis l’écart ne cesse de se creuser. Cette forte attractivité du solaire sur le marché des énergies s’explique par des coûts d’investissement réduits, des facilités d’installation ainsi qu’un fort soutien politique. En 2023, près de la moitié de l’énergie solaire supplémentaire a été installée sur les toits de bâtiments résidentiels.
Grâce à cette forte expansion, la Chine pourrait facilement atteindre 1 200 GW de capacité éolienne et solaire installée d’ici la fin de l’année 2024, soit six ans avant l’engagement pris par le président Xi Jinping et un an plus tôt que les prévisions de GEM annoncées l’année dernière. Même si le pays n’a jamais signé l’engagement de tripler les énergies renouvelables lors de la COP28, le GEM estime que « si les énergies éolienne et solaire continuent d’augmenter au rythme de 200 GW par an, comme l’affirment les autorités chinoises, tripler la capacité du renouvelable d’ici fin 2030, sur la base d’une référence de 934 GW en 2020, est tout à fait à portée de main, et ce même sans aucun nouvel ajout d’énergie hydroélectrique. »
Le pic des émissions de CO2 en Chine a possiblement été atteint en 2023
L’ampleur des capacités potentielles en cours de développement en Chine vient confirmer la prévision selon laquelle les émissions de carbone du secteur de l’électricité pourraient atteindre un sommet plus tôt que le calendrier promis, dont l’échéance était fixée à « avant 2030 ». Selon une étude réalisée par une chercheuse de l’Asia Society Policy Institute et du Centre for Research on Energy and Clean Air, 90 % de la demande supplémentaire en électricité est actuellement compensée par la production éolienne et solaire, ainsi que par la baisse de l’activité de construction de logements. Elle suggère même que : « le pic des émissions de CO2 en Chine a possiblement été atteint en 2023, à condition que la construction de sources d’énergie propres est maintenue aux niveaux records de l’année dernière. »
Cette intense croissance des énergies renouvelables se heurte malgré tout à certaines difficultés, dont l’une concerne l’augmentation des capacités de stockage pour faire face à l’intermittence de la production de ces énergies. Il apparaît que le réseau chinois dépend encore fortement de centrales à charbon pour atténuer les fluctuations de la production d’électricité. « Par exemple, le plan de construction de la deuxième vague de mégabases éoliennes et solaires sur la période 2021 à 2025 prévoit que 30 % de la capacité prévue doit provenir de l’énergie au charbon, dont 28 GW lié à l’ouverture de nouveau site d’extraction, parmi lesquels 10 GW sont déjà en construction », détaille le GEM.
Le transport de l’électricité représente un autre défi pour la Chine puisque les énergies solaire et éolienne sont largement déployées dans les régions du nord et du nord-ouest et dépendent fortement de lignes à ultra haute tension pour fournir l’électricité dans le centre, le sud et l’est du pays. Or, actuellement seules dix lignes de transport sont en cours de construction ou se préparent à l’être, un nombre loin d’être suffisant pour faire face à la montée en puissance des énergies renouvelables. Les retards dans l’achèvement des lignes de transport représentent donc un goulot d’étranglement pour le transport de l’énergie éolienne et solaire.
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