Décryptage

L’avenir du tactile, peut-être dans le rendu des textures ?

Posté le 19 décembre 2011
par La rédaction
dans Environnement

Senseg, une petite entreprise finlandaise, pourrait bien révolutionner l'univers de la technologie tactile, avec la création d'un prototype d'écran tactile permettant de ressentir différentes textures, nouveau jalon dans l'évolution des interfaces intégrant les dernières technologies haptiques. Une tendance forte pour 2012 ?

Toucher son écran tactile du bout des doigts, et sentir… autre chose que le plat de l’écran : ce qui était encore impossible il y a peu est en passe de devenir réalité, grâce à la prouesse des Finlandais de Senseg. La petite entreprise vient de dévoiler une tablette tactile permettant de ressentir différentes textures ou reliefs, tels que la soie, la roche ou encore le plastique, en passant tout simplement le doigt dessus pour l’éprouver. Vous avez bien compris : alors que l’écran affiche une matière d’apparence rugueuse, il suffira de toucher cet écran pour avoir la sensation correspondant à cette texture. Idem pour, par exemple, une matière à l’apparence veloutée ou soyeuse.

Feel Screen

Cette petite révolution n’est pas uniquement liée à l’univers des tablettes tactiles. La technologie développée par Senseg est à même de transformer n’importe quel appareil possédant un écran plat, en ce qu’ils appellent un « Feel Screen », ce fameux écran permettant de reproduire différentes sensations de texture, tout comme le contour ou les bords de l’objet affiché sur l’écran. Ces écrans peuvent être intégrés de manière indifférente à un smartphone, une télévision, une tablette, un écran d’ordinateur, et donc de manière générale à tous les appareils de notre quotidien possédant un écran.

L’haptique

Pour comprendre le fonctionnement de la tablette tactile conçue par Senseg, il faut tout d’abord se pencher un petit peu sur ce qu’est l’haptique. L’haptique correspond à la science du toucher, par analogie avec l’optique ou l’acoustique. Aussi appelée perception tactilo-kinesthésique, la perception haptique est liée à la stimulation de la peau qu’entraine l’exploration active d’un objet, comme en suivant le contour d’un objet pour en apprécier la forme. C’est cette exploration active qui est ici importante, et qui différencie la perception haptique de la simple perception cutanée, la main et la peau répondant à un stimulus ne résultant pas d’une exploration.

La technologie haptique

Si vous êtes familiers des claviers virtuels, vous faites déjà l’expérience de cette technologie à travers les retours haptiques, qui sont ces vibrations permettant de savoir si la touche a effectivement été frappée, souvent couplées à un son et / ou à une indication lumineuse. Les Finlandais de Senseg vont pourtant bien plus loin que cette seule idée de retour haptique.
En effet, leur technologie se base, d’après les concepteurs, sur l’idée d’une illusion… haptique. Cette illusion tactile repose sur le fait que nous puisons tous dans notre mémoire pour reconnaître une texture, tout comme nous puisons dans notre mémoire pour reconnaître une couleur, ou un son. Reconnaître une texture soyeuse, c’est la comparer avec d’autres textures et d’autres matières touchées et éprouvées jusqu’ici, et alors l’identifier comme soyeuse.
Lorsque le « Feel Screen » simule une texture, l’illusion haptique joue à plein son rôle, l’écran tactile créant une sensation normalement identifiable, puisque déjà cataloguée. La zone la plus sensible de la main, à savoir la pulpe du doigt, est la seule partie suffisamment sensible et fine pour pouvoir apprécier les différentes textures, et c’est bien cette zone qui est sollicitée par l’écran de Senseg.

Comment ça marche ?

La sensation ultra-sophistiquée créée par les Finlandais se base sur la loi de Coulomb, en électrostatique, énoncée par le physicien français Charles Augustin de Coulomb de cette manière : « L’intensité de la force électrostatique entre deux charges électriques est proportionnelle au produit des deux charges et est inversement proportionnelle au carré de la distance entre les deux charges. La force est portée par la droite passant par les deux charges. » Se servant de ce principe d’attraction des charges électriques, et en faisant passer un courant électrique très faible à travers le texel (de l’anglais « texture element », plus petit élément d’une texture appliqué à une surface), on crée une petite force d’attraction. C’est en modulant cette force de manière locale qu’un panel de sensations peut être généré.
On en déduit qu’à la différence des effets créés par des vibrations mécaniques ou encore par des solutions piézoélectriques, la technologie développée par Senseg peut se targuer d’être totalement silencieuse.

Le « Tixel » de Senseg

Le « Tixel » est le support de transmission du stimulus électro-vibrant. Il est constitué d’un revêtement ultra-fin et résistant que l’on dispose au-dessus de l’écran ou de la surface choisi, plat ou incurvé, dur ou mou, transparent ou opaque. Le temps de réponse est immédiat, car il n’y a pas d’inertie mécanique. Le module électronique prend en charge l’envoi des signaux électriques vers la surface, le Tixel, et en varie l’intensité localement. Enfin, un logiciel équivalent à un kit pour développeur permet de se familiariser avec la technologie, et de l’intégrer à des applications de manière ludique.

Encore au stade de prototype

Bien qu’encore au stade de prototype, l’utilisation de la technologie haptique par Senseg laisse rêveur, et l’entreprise basée à Espoo (vivier finlandais abritant déjà nombre de sociétés à la pointe de l’innovation technologique telles que Nokia, Tieto ou encore le producteur d’énergie Fortum) estime qu’il lui faudrait moins de deux ans pour améliorer son bijou, et éventuellement le commercialiser. Les débouchés pourraient être innombrables, tant dans le domaine des jeux, que dans celui des applications ludiques ou encore… vers de futures tablettes en braille.
Alors que les tendances fortes nous entrainent vers des appareils au son plus clair, dont l’écran haute-définition supporterait la 3D, les technologies haptiques pourraient bien, elles aussi, tirer leur épingle du jeu.

 

Par R.M
 


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