L’Antarctique pourrait prochainement atteindre plusieurs points de basculement ayant des ramifications mondiales pour l’humanité et la biodiversité. Voici l’alerte lancée par des spécialistes de l’Antarctique de l’Institut polaire du Wilson Center alors que se tient du 14 au 24 juin la réunion consultative du traité sur l’Antarctique (RCTA) à Paris.
« L’Antarctique atteint des seuils critiques et la vie dans le monde entier est directement menacée par les effets en cascade qui pourraient se déclencher », alerte Andrea Capurro, chercheuse invitée à l’université de Boston et co-autrice d’un nouveau rapport du Wilson Center Polar Institute. Intitulé « Changement climatique et résilience de l’océan Austral », ce rapport réunissant des chercheurs d’horizons divers identifie les processus naturels menacés dont la modification aura des impacts régionaux et mondiaux.
Selon les chercheurs, la hausse des températures océaniques conduira à l’effondrement des barrières de glace. La fonte de ces glaciers qui se prolongent sur la mer entraînerait une élévation mondiale du niveau de la mer de plusieurs mètres. En plus, l’océan Austral est le principal puits de carbone de la planète : il séquestre plus ou moins 35 % de CO2 en surplus dans l’atmosphère. Mais l’absorption accrue du dioxyde de carbone entraînera l’acidification de l’océan et pourrait perturber les réseaux trophiques.
La menace de basculements en cascade
L’expédition Swings a récemment étudié la pompe biologique de l’océan Austral. L’évolution de ce cycle marin du carbone impliquant l’atmosphère, les microalgues, l’océan et les animaux modifierait la séquestration régionale du carbone. C’est ainsi la dynamique globale des écosystèmes et des espèces qui serait impactée, « conduisant à une perte de la biodiversité, à une modification des processus biologiques, à une évolution de la répartition géographique des espèces et à des changements dans la dynamique des réseaux trophiques, à l’échelle régionale et mondiale », prévient l’Institut polaire du Wilson Center.
Les auteurs du rapport insistent sur l’importance de créer de nouvelles aires marines protégées en Antarctique. Ils invitent la Commission pour la conservation de la faune et de la flore marines de l’Antarctique (CCAMLR), dans le cadre des réunions du Traité sur l’Antarctique, à intégrer des considérations sur le changement climatique dans les politiques en vigueur de gestion de la pêche. En plus, il s’agirait de développer un programme de travail en réponse au changement climatique afin de renforcer la résilience et d’intégrer le changement climatique dans toutes les mesures de conservation. Enfin, les chercheurs insistent sur la mise en œuvre du principe de précaution afin de prévenir des changements irréversibles pour les espèces qui se trouvent dans ses eaux.
« Jusqu’à présent, les États ont tardé à intégrer le changement climatique au cœur des efforts de conservation de l’Antarctique. Nous demandons aux États membres de la CCAMLR de réécrire notre avenir en établissant un réseau d’aires marines protégées coordonné à l’échelle mondiale autour de cette région polaire sous tension, afin qu’elle puisse renforcer sa résilience face à l’ensemble des menaces climatiques actuelles, et ce pour le bien de toute vie sur Terre », avance Andrea Kavanagh, directrice des efforts de conservation de l’Antarctique et de l’océan Austral de The Pew Charitable Trusts. L’ONG américaine a lancé une pétition pour demander de nouvelles aires marines protégées en Antarctique à la CCAMLR. Elle a déjà récolté près de 200 000 signatures.
Réagissez à cet article
Vous avez déjà un compte ? Connectez-vous et retrouvez plus tard tous vos commentaires dans votre espace personnel.
Inscrivez-vous !
Vous n'avez pas encore de compte ?
CRÉER UN COMPTE