Techniques de l’Ingénieur : Depuis quand la tribologie existe-t-elle ?
La tribologie existe depuis toujours. À l’âge de pierre, l’homme des cavernes frottait déjà des silex pour se fabriquer des outils et faire du feu. Le terme « tribologie », date lui, de 1966. Il a été proposé par Peter Jost, actuellement président de l’ITC (International Tribology Council) et construit à partir de deux termes grecs : « tribos » qui signifie « frottement », et « logos » qui signifie « lois». Mais en réalité, le mot semble avoir déjà été évoqué par Leonard de Vinci dans l’un de ses carnets récemment découvert. De Vinci dessinait des schémas de mécanisme et aurait constaté qu’il pouvait y avoir des résistances mécaniques, des frottements.
Quelles sont les causes de détérioration les plus fréquentes des matériaux en tribologie ?
L’usure, dont il existe plusieurs familles : l’usure par adhésion, lorsqu’il y a collage et arrachement des matériaux ; l’usure par abrasion, lorsqu’il y a une particule intrusive qui s’introduit entre les matériaux et qui va enlever de la matière ; l’usure par érosion, où des particules viennent agresser les surfaces ; l’usure par fatigue, dont l’action répétée de contraintes à la surface va fatiguer le matériau et provoquer une émission de particules ou la rupture des composants ; et l’usure par tribocorrosion où la corrosion s’ajoute à l’usure par exemple.
Comment mesure-t-on l’usure d’un matériau ?
Par la perte de dimensions du matériau, la perte de masse, ou la perte de matière.
À quelles disciplines scientifiques la tribologie fait-elle appel ?
À la mécanique des solides et des fluides, à la connaissance des matériaux, à la physique, à la chimie, car il y a beaucoup d’actions physico-chimiques en surface.
Dans quels secteurs industriels la tribologie se révèle-t-elle utile ?
Dans tous les domaines d’activité, dès que des solides ou des fluides sont mis en contact. On en trouve aussi bien en mécanique qu’en transport, qu’en biomécanique (usure des dents, des articulations)…
Quelles solutions existent pour remédier aux phénomènes d’usure et de frottement ?
Les solutions les plus classiques consistent à éviter ou limiter le contact des matériaux en introduisant un lubrifiant entre les surfaces, il s’agit alors de lubrification hydrodynamique, hydrostatique, élastohydrodynamique… D’autres solutions consistent à utiliser des matériaux résistants aux différents types d’usure. On joue sur la structure des matériaux, leurs caractéristiques mécaniques et physico-chimiques pour limiter l’usure. Troisième solution : on introduit des matériaux à structure spécifique entre les solides. On peut, par exemple, utiliser des lubrifiants de type solide, certains composés lamellaires (graphite, bisulfure de molybdène…), qui abaissent les frottements et limitent l’usure. On peut aussi, dans le cas d’engins de travaux publics ou de matériels agricoles, mettre en œuvre des techniques de rechargements avec des métaux durs pour limiter l’abrasion des outils par les particules dures contenues dans le sol.
Quelles sont les techniques les moins classiques ?
Les techniques qui consistent, par champ magnétique, à faire une sustentation magnétique. Ce sont des techniques utilisées dans des circonstances très particulières.
Les nanotechnologies peuvent-elles servir à la tribologie ?
Effectivement, on peut utiliser les nanotechnologies pour limiter l’usure dans certaines circonstances. Par exemple, en renforçant les matériaux par des nanoparticules, que l’on disperse dans une matrice pour former un composite plus résistant. C’est actuellement l’application la plus courante des nanotechnologies dans la tribologie. Inversement, les connaissances en nanotribologie permettent de mieux comprendre certains phénomènes de tribologie tels que l’établissement des liaisons, qui se produisent par exemple dans le cas d’usure adhésive. Ainsi, les modèles de nanotribologie permettent de mieux analyser les phénomènes mis en jeu.
La tribologie peut-elle contribuer à la protection de l’environnement ?
Oui. Prenons l’exemple d’un moteur de voiture. Dans un moteur, une partie importante de l’énergie est dissipée par frottement. Si l’on abaisse les frottements, on optimise l’énergie dissipée, on réduit les pertes et on améliore par conséquent le rendement du moteur. Autre exemple : si l’on conçoit un pneumatique qui dure deux fois plus longtemps qu’un pneumatique classique, on limite l’apparition de particules d’usure. On économise ainsi de la matière, de l’énergie et on réduit la présence de particules polluantes dans l’environnement.
Propos recueillis par Carole Hamon
Pour aller plus loin :
Découvrez la base documentaire Techniques de l’Ingénieur : Tribologie