Prise par deux sénateurs et un député russes, cette initiative sur « l’isolement » visait à répondre au « caractère agressif de la stratégie pour la cybersécurité nationale des États-Unis » adoptée en septembre 2018.
Le projet de loi portait principalement sur deux points : le contrôle du système de noms de domaine (DNS, le système d’adressage de l’Internet) et le routage du trafic (transfert des données d’un expéditeur vers des destinataires pour simplifier). Mais mi-mars, 15000 personnes ont manifesté à Moscou.
La « révolte Safran »
Depuis, les autorités ont précisé que le test ne visait pas à couper le cordon ombilical avec l’internet. La nouvelle loi « vise à garantir la survie d’Internet en cas d’éventuelles cyberactions agressives contre notre pays », a indiqué le porte-parole de Vladimir Poutine.
Néanmoins, progressivement, la Russie souhaite contrôler son trafic internet et les données. Depuis 2016, une loi oblige les entreprises traitant des données de citoyens russes à les stocker sur le territoire national.
L’idée de couper le web n’est pas nouvelle. Bloquer les connexions au réseau mondial est en effet possible. Mais sous certaines conditions comme le montrent les deux seuls exemples de blocage total : la Birmanie (au moment de la « révolte Safran » de 2007 menée par les moines bouddhistes) et l’Égypte (fin janvier dernier). Ces coupures ont été facilitées par le fait qu’il y a peu de fournisseurs d’accès à Internet (FAI) et qu’ils ont des liens plus ou moins étroits avec l’État.
Pour éteindre l’Internet, les FAI ont bloqué l’accès aux protocoles DNS (Domain name server, qui aiguille les ordinateurs vers les adresses des sites) et BGP (Border gate protocol, qui indique quelles adresses IP sont utilisées par les fournisseurs d’accès). Impossible aux PC de trouver un chemin permettant d’accéder à la toile.
Couper le fixe, le mobile, le câble…
Techniquement, l’État français pourrait obtenir le même résultat si les principaux FAI bloquaient l’accès à ces deux protocoles. En 24 heures, 90% des Français n’auraient plus Internet. Mais cette décision se heurterait à des obstacles techniques et juridiques et elle aurait de graves répercussions sur l’économie nationale.
Par ailleurs, pour qu’aucun accès au web ne soit possible il faudrait couper à la fois les lignes téléphoniques fixes et mobiles, le câble, la fibre optique et éteindre toutes les bornes Wi-Fi privées et publiques. Inimaginable. C’est comme si un pays fermait tous les axes routiers, des autoroutes jusqu’aux départementales, voire les routes de campagne. Impossible.
Pour revenir à la Russie, l’exercice serait difficile à relever. Contrairement à la Chine qui a pensé et conçu son réseau avec une gouvernance centralisée, la Russie compte plus de 3000 FAI avec de nombreuses connexions physiques et économiques avec l’étranger.
Le test ne se fera peut-être jamais. Il témoigne, en tous les cas, de la volonté de la Russie de limiter sa dépendance technologique et de restreindre sa surface d’attaque.
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