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La renaissance de la consigne des bouteilles en verre

Posté le 21 février 2024
par Aliye Karasu
dans Matériaux

Après Carrefour qui a ouvert la voie en décembre dernier, les enseignes U et E. Leclerc s'engouffrent dans la brèche pour lancer leur propre système de consigne des bouteilles en verre. Le premier jalon est posé avant un déploiement progressif sur l'ensemble du territoire national.

Retourner les bouteilles en verre après usage contre une petite somme d’argent : c’est ce que proposent les distributeurs Système U et E. Leclerc depuis le mercredi 7 février dernier. Ils ont accepté de s’associer pour former un consortium avec des grandes marques de l’industrie des boissons comme Coca-Cola®, Nestlé Waters[1], LorinaTM, Eckes GraniniTM ou la bière MétéorTM. Concrètement, la consigne du verre sera proposée dans une sélection de 14 points de vente situés en Île-de-France au sein de neuf magasins Système U et cinq E. Leclerc.

Cette expérimentation, portée par Hugues Pelletier, le PDG de Petrel[2], s’inscrit dans la continuité des annonces faites par le gouvernement en juin dernier visant à mettre en place une consigne sur les emballages en verre d’ici à deux ans.

En décembre dernier déjà, le groupe Carrefour a introduit un système similaire dans 150 magasins Carrefour City à Paris avec les marques Coca-Cola® ou Heineken®.

Une pratique tombée en désuétude et remise au goût du jour

La consigne des bouteilles ravive des souvenirs pour les moins jeunes d’entre nous qui effectuaient ce geste quotidiennement avant que ces habitudes ne soient délaissées, à partir des années 1970, avec l’avènement des emballages à usage unique. Des pratiques conservées en Alsace et qui ont été perpétuées dans d’autres pays à l’instar de l’Allemagne ou de la Belgique.

En pratique, une fois le produit consommé, les clients pourront à nouveau rapporter les bouteilles en magasin et les insérer dans des grandes machines de déconsignation de la marque Lemon tri. Ces collecteurs récupéreront les contenants et rembourseront la consigne sous forme de bons d’achat. Le montant de la consigne dépend de la taille de la bouteille : 10 centimes pour une petite bouteille de 33 cl ou 20 centimes pour celles de 75 cl ou de 1 L.

Précisons qu’il s’agit de réemploi et non de recyclage. En effet, les bouteilles récupérées ne seront pas fondues à 1 500°C pendant 24 heures pour donner naissance à une nouvelle bouteille, mais elles seront lavées et réutilisées par les industriels. Cette mesure permet de réemployer jusqu’à 50 fois la même bouteille tout en réduisant l’énergie utilisée puisque la fabrication du verre consomme 15 fois plus d’énergie que le lavage d’une bouteille.

Du greenwashing ?

Alors que la loi AGEC[3] prévoit d’atteindre 10 % d’emballages réemployés à l’horizon 2027, ce taux reste aujourd’hui très inférieur à 1 % en France. Dans ce contexte, la décision de faire reposer la participation sur la base du volontariat provoque le mécontentement des associations qui pointent le manque d’ambition du gouvernement pour mettre en œuvre une logistique à l’échelle nationale.

Le succès du projet pourrait également être freiné par le coût plus élevé de la bouteille et l’obligation d’utiliser le bon d’achat de la consigne dans le même magasin. Cette contrainte pourrait cacher une manœuvre de la part de ces enseignes pour fidéliser le client. Un soupçon de cynisme plane également sur certaines marques qui pourraient profiter de cette opportunité pour redorer leur blason et retrouver un prestige perdu. Citons le groupe Nestlé Waters qui récidive en étant de nouveau au cœur d’un scandale pour le traitement interdit de son eau ou Coca-Cola® qui a gagné pour la sixième année le prix du premier pollueur plastique mondial


[1] Propriétaire des marques Perrier® et Vittel®

[2] Entreprise spécialisée dans la création de boucles de réemploi d’emballages

[3] Loi anti-gaspillage pour une économie circulaire adoptée en 2020


Pour aller plus loin