L’enquête Sumer révèle que seul un salarié sur deux bénéficie d’un comité d’hygiène, de sécurité et des conditions de travail.
2400 médecins du travail et de prévention ont participé à une grande enquête baptisée Sumer. Pendant plus d’un an, ils se sont transformés en enquêteurs pour dresser un état des lieux de la prévention des risques en France. Et le bilan n’est pas très glorieux.
Tout d’abord, à peine la moitié des salariés seraient concernés par un comité d’hygiène, de sécurité et des conditions de travail (CHSCT). Pire, dans les établissements de plus de 50 salariés pour lesquels un CHSCT est pourtant obligatoire, 15% n’en disposeraient pas. L’enquête prouve que l’existence d’un CHSCT est souvent liée à une forte implication syndicale. En effet, 87% des salariés des établissements comptant un délégué syndical bénéficient d’un tel dispositif. Un chiffre qui chute à 3% pour les salariés non représentés !
Autre lacune. Un document unique d’évaluation des risques professionnels doit être rédigé et mis à jour chaque année dans toutes les entreprises. Or, d’après les médecins du travail, seuls 51% des entreprises s’y tiennent. Une donnée à modérer puisqu’ils sont 29% à déclarer ne pas savoir si ce document existe ou s’il a été mis à jour. Or, le médecin du travail est censé être une référence dans l’entreprise à ce sujet. Si lui-même ne sait pas, comment les salariés peuvent être informés ?
Sumer a permis de dresser une carte des CHSCT. Il ressort clairement que plus l’établissement est important, plus l’existence d’un CHSCT est certaine. Seulement 16% des salariés d’une entreprise de moins de 10 salariés sont couverts contre 95% pour les établissements de plus de 500 salariés. Ce n’est pas la seule inégalité à laquelle doivent faire face les salariés puisque les fonctionnaires sont mieux couverts. Le secteur d’activité joue lui aussi un rôle important dans la mise en place ou non d’un CHSCT. Ainsi, la construction et l’industrie manufacturière ont plus fréquemment créées un CHSCT.
Plus logiquement, c’est dans les entreprises présentant des risques identifiés ou des conditions de travail reconnues pénibles que l’on retrouve une bonne couverture des salariés. Ainsi, lorsque les salariés sont postés, soumis à un bruit intense, à des radiations, exposés à des risques chimiques ou biologiques, alors les CHSCT sont plus présents.
Les oubliés de ces dispositifs de préventions sont les salariés au travail pénible sur un plan physique, les risques liés aux TMS restent sous-estimés. De même, les employés qui travaillent plus souvent à l’extérieur qu’ au bureau, soit parce qu’ils sont en télétravail soit de part leurs déplacements chez le client, sont moins bien protégés.
Finalement, l’enquête Sumer met à jour de nombreuses inégalités suivant les salariés selon qu’ils appartiennent au privé ou au public, à de grosses ou petites structures. Mais cela impacte-t-il leur condition de travail ? Sur un plan organisationnel, il semble que non ! CHSCT ou pas, le médecin du travail exprime un jugement tout aussi positif avec 78% des salariés non couverts avec un poste de travail de bonne ou très bonne qualité au regard des risques organisationnels contre 80% de salariés bénéficiant d’un CHST.
En revanche, pour les risques physiques, chimiques et biologiques, le CHSCT joue bien son rôle protecteur. A titre d’exemple, d’après ce rapport, 51% des salariés exposés aux risques chimiques et couverts par un CHSCT profitent d’une protection collective de type ventilation générale, aspiration à la source. Des mesures de précautions qui ne concernent que 38% des salariés ne bénéficiant pas de CHSCT.
Toutefois, alors que l’objectif du CHSCT est de protéger le salarié, son existence peut être source de stress pour ce dernier qui prend ainsi conscience que son travail est à risque : « […] le rapport de chances que le salarié juge son travail mauvais pour sa santé plutôt que le contraire est accru de 10% en présence d’un CHSCT. »
En cartographiant l’exposition des salariés aux principaux risques professionnels en France, la direction générale du travail (DGT) et la direction de l’animation de la recherche, études et des statistiques (DARES) souhaitent désormais définir des actions de prévention prioritaires.
Par Audrey Loubens, journaliste scientifique
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