Google est en surchauffe. Dans son rapport annuel sur l’environnement, publié le 2 juillet, sa maison mère Alphabet Inc. a indiqué que ses émissions de gaz à effet de serre ont augmenté de 48 % par rapport à la base de référence de 2019, pour un total de 14,3 millions de tonnes de dioxyde de carbone. Avec une hausse de 13 % en 2023 par rapport à 2022, ses émissions n’ont ainsi fait que progresser, alors que le géant américain s’était fixé un objectif climatique « ambitieux » de réduction.
Plus précisément, le rapport indique qu’en 2023, « les centres de données de Google ont consommé 24 TWh d’électricité, soit 7 à 10 % des 240-340 TWh estimés consommés par les centres de données dans le monde, et moins de 0,1 % des 25 000 TWh estimés de l’électricité mondiale totale ».
Google n’est pas le seul à voir ses émissions de GES exploser. Dans un rapport sur le développement durable publié en mai dernier, Microsoft Corp a indiqué que ses émissions ont augmenté de 29 % par rapport à la base de référence de 2020.
Des gloutons en énergie
Ce rapport intervient alors que l’Agence internationale de l’énergie (AIE) a prévu que la demande d’électricité pourrait doubler d’ici 2026 en raison de la croissance exponentielle de la charge des datacenters.
L’Administration américaine d’information sur l’énergie, qui a lancé un projet pilote de suivi des centres de données en 2018, a montré que les datacenters utilisent 10 à 40 fois plus d’énergie par mètre carré que l’immeuble de bureaux typique et représentent près de 2 % de la consommation d’électricité aux États-Unis.
De façon globale, l’AIE estime que la consommation mondiale d’électricité des centres de données est de 240 à 340 TWh, soit environ 1 à 1,3 % de la demande finale mondiale d’électricité (environ 25 000 TWh).
L’augmentation des émissions a mis en évidence « le défi de réduire les émissions alors que l’intensité de calcul augmente et que nous augmentons nos investissements dans l’infrastructure technique pour soutenir cette transition de l’IA », peut-on lire dans le rapport d’Alphabet Inc.
Pour illustrer à quel point les modèles d’IA sont plus exigeants que les systèmes informatiques traditionnels, l’AIE estime qu’une recherche sur Google nécessite en moyenne 0,3 wattheure d’électricité, alors qu’une requête sur ChatGPT consomme généralement environ 2,9 wattheures.
Explosion du trafic Internet
Selon une étude publiée en octobre dernier par le chercheur néerlandais Alex de Vries (fondateur de Digiconomist et doctorant à la Vrije Universiteit Amsterdam), les systèmes d’IA de Google pourraient, dans le pire des cas, consommer chaque année autant d’électricité que l’Irlande, dans l’hypothèse d’une adoption à grande échelle de l’IA dans leur matériel et leurs systèmes informatiques actuels.
Or la situation ne semble pas aller vers une amélioration. D’après les dernières analyses du conseil international en immobilier Savills, la puissance installée des datacenters européens devrait atteindre les 13 100 MW en 2027, soit une hausse de 21 % par rapport à la puissance actuelle.
Le trafic Internet en Europe devrait connaître un taux de croissance annuel cumulé de 31 % d’ici 2030. Le marché européen de l’IA devrait connaître une croissance rapide de 15,9 % par an et jouer un rôle moteur dans la hausse de la demande en datacenters.
Comment répondre à cette explosion des usages (dont l’efficacité reste encore à prouver) et limiter considérablement les émissions de GES ? Pour l’instant, les géants de la tech sont focalisés sur la réponse à cette demande.
« Pour Google, la réduction de la consommation de ses datacenters n’est pas sa priorité. Il n’investit pas dans ce domaine, car il a d’autres priorités et parce qu’aucune législation ne freine son expansion en interdisant la construction d’un datacenter consommant tant ou tant d’énergie », explique Ophélie Coelho, chercheuse indépendante, spécialiste en géopolitique du numérique.
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