Les écosystèmes fournissent aux entreprises, ainsi qu’aux populations et aux collectivités, une large gamme de biens et de services. Voyons quelle est la palette de ces écosystèmes et l'étendue des "services" qu'ils rendent aux entreprises.
À titre d’exemples, les forêts fournissent du bois d’oeuvre et des fibres, régulent le climat en absorbant le gaz carbonique et produisent des ressources génétiques utilisées pour les médicaments. Les récifs de corail attirent des touristes, servent de viviers à des espèces de poissons commercialisables et protègent les zones littorales des vagues de tempête. Les systèmes fluviaux offrent de l’eau douce et de l’énergie. Les zones humides filtrent les eaux usées, atténuent les inondations et purifient l’eau.
Tous ces bénéfices, et bien d’autres encore, tirés de la nature
sont qualifiés de «services écosystémiques».
Catégories de services écosystémiques
L’Évaluation des Écosystèmes du Millénaire (Millennium Ecosystem Assessment) a mis en évidence l’importance des services écosystémiques pour le bien-être humain et le développement économique. Cette évaluation a consisté en un audit international des écosystèmes de la planète réalisé sur une durée de 4 ans, impliquant plus de 1 360 scientifiques, économistes, professionnels et autres experts originaires de 95 pays. Ses conclusions représentent la première évaluation scientifique de pointe sur l’état et l’évolution des écosystèmes de la planète et des services qu’ils rendent, en même temps qu’un fondement scientifique à des actions concrètes visant à les préserver et à les exploiter de manière écologiquement durable. L’Évaluation du Millénaire définit quatre catégories de services écosystémiques :
- Services d’approvisionnement : biens ou produits tirés des écosystèmes, de type nourriture, eau douce, bois d’oeuvre ou fibre de bois.
- Services de régulation : bénéfices tirés de la régulation par l’écosystème de processus naturels tels que le climat, les pathologies, l’érosion, les flux hydriques ou la pollinisation, ainsi que la protection contre les risques naturels. Par «régulation» dans ce contexte, on entend le contrôle de phénomènes naturels ; le terme ne doit pas être confondu avec celui de «réglementation» en matière de politiques ou de législation.
- Services culturels : bénéfices intangibles tirés des écosystèmes de type loisirs récréatifs, valeurs spirituelles ou plaisir esthétique.
- Services de soutien : processus naturels comme le cycle des nutriments ou la production primaire qui servent de support aux autres services.
On retrouve les bénéficiaires de ces services à différents niveaux, local, régional et/ou mondial, et ceux-ci peuvent s’étendre aux générations futures. Par exemple, une forêt pourra approvisionner la population locale en nourriture, en fibres naturelles ou en bois de chauffe. À l’échelle régionale, elle peut éviter les glissements de terrain, filtrer les eaux et offrir des loisirs aux habitants de la ville proche. Au niveau mondial, cette même forêt peut en outre séquestrer du dioxyde de carbone, permettant ainsi de réguler les concentrations en gaz à effet de serre dans l’atmosphère, et peut par ailleurs héberger une plante rare dont les propriétés pharmacologiques bénéficieront aux populations du monde entier.
Tendances pour les services écosystémiques
Même si la dégradation des écosystèmes peut être en partie compensée par la culture et la technologie, toutes les populations et toutes les entreprises dépendent fondamentalement du flux des services écosystémiques. Pourtant, la capacité des écosystèmes à continuer de fournir ces services à un niveau satisfaisant est aujourd’hui en péril. L’Évaluation des écosystèmes pour le Millénaire (Millennium Ecosystem Assessment) a mis en évidence une modification des écosystèmes causée par l’homme plus rapide et plus intense depuis ces 50 dernières années qu’à n’importe quelle autre période de l’histoire de l’humanité.
Quelques exemples
- La superficie de terres mises en culture entre 1950 et 1980 est supérieure à celle des terres converties en terrains agricoles en l’espace de 150 ans entre 1700 et 1850. Désormais, avec un quart de la superficie terrestre de la planète exploitée par les cultures ou l’élevage, toute augmentation du rendement agricole devra vraisemblablement provenir d’une conduite plus intensive des zones de culture existantes.
- Plus de la moitié des engrais synthétiques azotés utilisés depuis tous temps l’ont été sur les deux dernières décennies, contribuant au risque de voir augmenter le nombre de cours d’eau se transformant par eutrophisation en «zones mortes» pour les pêcheries commerciales.
- Le prélèvement d’eau dans les fleuves, rivières et lacs a doublé depuis 1960, avec des répercussions à long terme sur la disponibilité et les débits d’eau douce dans certaines régions.
- Vingt pour cent des récifs de corail de la planète et pratiquement un quart de ses forêts de mangrove ont disparu depuis 1980 environ, en même temps que leur capacité à amortir les ondes de tempêtes le long du littoral.
- Les prises de poissons sauvages en milieu marin ont atteint un pic dans les années 1980 et sont restées statiques depuis lors, avec des conséquences majeures pour tous ceux qui dépendent des ressources marines pour leur survie.
Ces modifications ont conduit à une détérioration quantitative et/ou qualitative de nombreux services écosystémiques. L’Évaluation du Millénaire a mis en évidence que 60%, c’est-à-dire 15 des 24 services écosystémiques étudiés, s’étaient dégradés sur les 50 dernières années. Cinq services sont classés en catégorie «moyen,» dénotant une augmentation de l’approvisionnement ou de la qualité dans certaines régions du monde, mais accompagnée d’une diminution dans d’autres régions. Trois services d’approvisionnement – cultures, élevage et aquaculture – sont notés «améliorés», reflétant les efforts consacrés à une bonne gestion de ces écosystèmes pour alimenter la population en croissance. Malgré cela, les actions engagées pour optimiser ces 3 services d’approvisionnement ont conduit par inadvertance à une dégradation de nombreux services de régulation et services culturels, dont la plupart ne présentent aucune valeur marchande… jusqu’à leur disparition. En d’autres termes, il se produit fréquemment des arbitrages ou compromis entre les différents services écosystémiques.
Il manque un point important : si l’on comptait les apports de la nature ou les dommages infligés à celle-ci dans les bilans économiques et financiers (actuellement, elle est réputée gratuite) et dans les PIB, la gestion des sociétés humaines serait tout autre.
Réagissez à cet article
Vous avez déjà un compte ? Connectez-vous et retrouvez plus tard tous vos commentaires dans votre espace personnel.
Inscrivez-vous !
Vous n'avez pas encore de compte ?
CRÉER UN COMPTE