Des chercheurs américains ont mis au point une nouvelle façon de produire du biocarburant algal en traitant les algues directement en pleine mer. L'occasion de faire le point sur les biocarburants algaux, souvent dénigrés de ce côté-ci de l'Atlantique.
Dans l’article « Du biocarburant algal utilisant les nanotechnologies » publié le 6 mai dernier, je faisais état des recherches menées par deux laboratoires américains dont le Ames Research Center de la NASA, sur une nouvelle façon de produire du biocarburant algal. Aujourd’hui, un article très complet et passionnant publié le 15 mai 2009 par Cleantech permet d’en savoir beaucoup plus à propos de ce dernier projet, sur lequel j’émettais quelques réserves. Le père de cette nouvelle technologie est en l’occurrence Jonathan Trent, chercheur vedette du Ames Research Center de la Nasa à Moffett Field (USA), dont les travaux sur les nanotechnologies sont rendus publics par la NASA.Que sait-on de plus aujourd’hui ? Et bien qu’en réalité cette nouvelle technologie que Trent déclare tester en ce moment dans l’océan avec des sortes de sacs remplis d’eaux usées combine ses expertises en océanographie, astrobiologie, biologie moléculaire et nanotechnologie dans un projet magnifiquement intitulé « Sustainable Energy for Spaceship Earth » (Énergie renouvelable pour le vaisseau spatial Terre).On apprend aussi que ce projet est financé pour 250.000 dollars par les fondateurs de Google, Larry Page et Sergey Brin, aidés directement par certains utilisateurs de Google eux-mêmes. La découverte de Trent lave littéralement les eaux usées, élimine le dioxyde de carbone de l’air, en extrait une huile carburant tout en conservant d’importants éléments nutritifs.Si la NASA est particulièrement intéressée par la récolte de ce biocarburant algal et par la production d’eau propre, c’est principalement parce que toute son attention se porte désormais sur l’exploitation des systèmes planétaires, et que selon Trent, la « NASA entend désormais puiser dans les systèmes planétaires, uniquement de manière renouvelable ». La grande nouveauté de la technologie de Jonathan Trent, par rapport aux autres, tient dans le fait que, lui, ne rapatrie pas les algues à terre ou ne cherche pas à les cultiver dans des bassins pour en extraire le carburant mais les traite sur place, en pleine mer.Cette technologie fonctionne sur le principe que tout déchet est une ressource. Utilisant des membranes semi-perméables, la technologie intéresse la NASA pour recycler les eaux usées produites par les futures missions spatiales de longue durée. Le prototype, testé par la NASA, se présente sous la forme d’un grand conteneur ou d’une sorte de sac en plastique géant flottant sur la surface de l’océan. Le sac recueille l’énergie solaire pour permettre la croissance des algues par photosynthèse et la production d’oxygène.Les eaux usées présentes dans les sacs agissent comme un engrais pour les algues et leur permettent de croître plus rapidement. Dans cette technologie, les eaux usées sont nettoyées grâce à un processus de type osmotique : les sacs absorbent le dioxyde de carbone de l’air et libèrent de l’oxygène et de l’eau propre. « L’eau qui passe à travers les membranes est propre, déclare Trent, et nous avons retenu au passage tous les éléments nutritifs qui auraient été autrement perdus en mer ». Jonathan Trent et la NASA voient dans cette culture hors bioréacteurs la seule garantie de rentabilité des futurs biocarburants algaux.Cependant, un certain nombre d’entreprises affirment qu’elles ont mis au point des technologies en bioréacteurs rentables, notamment à Naples, où Fla Algenol affirme pouvoir produire à peu de frais, jusqu’à près de 4 milliards de litres de biodiesel algal par an. Aux Etats-Unis, les entreprises Inventure Chemical and Gilbert et Ariz’s Diversified Energy, spécialisées dans la production de produits chimiques ont également axé leur recherche sur la production d’algues en étang.Le géant pétrolier et gazier Royal Dutch Shell a également choisi cette voie en s’associant avec la start up Hawaiienne HR BioPetroleum dans la construction d’une installation pilote de production de biocarburant algal. Au début de l’année, Shell a même fait savoir qu’il renonçait à poursuivre des projets éoliens et solaires, pour se concentrer uniquement sur les biocarburants. L’américain Solazyme associé à Chevron, producteur américain n°2 de pétrole, s’orientent dans le même sens.Alors on peut toujours considérer, comme le font hélas beaucoup en Europe, que tout le monde a tort et que tous se trompent en faisant ce pari. Mais on peut aussi penser que si la NASA, Chevron Cor, Royal Dutch Shell et l’US Army prennent le pari du biocarburant algal c’est qu’il doit y avoir plus d’une bonne raison de le faire !Le projet NASA vient d’ailleurs d’être classé prioritaire par la California Energy Commission pour l’obtention prochaine d’une subvention de 800.000 dollars. Un secteur du ministère de la Défense américain vient par ailleurs de signer pour près de 35 millions de dollars de contrats avec deux entreprises de San Diego pour développer un kérosène algal utilisable par les avions de l’US Air Force aussi bien que par les véhicules de l’Armée de terre. Même si la technologie prototype de la NASA et du Ames laboratory est la plus séduisante commercialement, est-il raisonnable dès lors de continuer à nier que mêm les autres puissent devenir rentables ?Par Francis Rousseau, auteur du site Les énergies de la mer
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