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La majorité des décès liés à l'ozone en Europe s'explique par de la pollution importée

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La majorité des décès liés à l’ozone en Europe s’explique par de la pollution importée

Posté le par Nicolas LOUIS dans Environnement

L'ozone troposphérique est l'une des principales causes de mortalité prématurée liée à la pollution atmosphérique en Europe. Une étude publiée dans Nature Medicine révèle que plus de 88 % de ces décès seraient liés à une exposition à de l'ozone en provenance d'autres pays, qu'ils soient européens ou pas, et seulement près de 12 % à une exposition d'origine nationale.

L’ozone troposphérique est un polluant nocif formé dans la couche basse de l’atmosphère par l’interaction entre la lumière du soleil et des gaz précurseurs, principalement des oxydes d’azote (NOx) et des composés organiques volatils (COV), d’origine naturelle et anthropique. Des niveaux élevés de cet ozone dans l’air ambiant sont néfastes sur la santé, car ils provoquent des problèmes respiratoires qui peuvent conduire dans les cas les plus graves à une hospitalisation et au décès. Pour la première fois, des chercheurs de l’Inserm, de ISGlobal1 et du BSC-CNS2 ont quantifié l’impact de cette exposition à l’échelle du continent européen. Leurs travaux, publiés dans Nature Medicine révèlent que la majeure partie de ce polluant est importée d’autres pays.

Pour suivre les concentrations d’ozone troposphérique et de ses précurseurs (NOx et COV), les scientifiques ont utilisé un système de qualité de l’air, baptisé Caliope, développé au BSC-CNS, et qui retrace ces polluants formés ou émis dans 35 pays européens, ce qui représente la couverture d’une population totale d’environ 530 millions de personnes. Pour obtenir des données en dehors de la zone d’étude, une approche de modélisation a été utilisée et a permis de suivre la dispersion et le transport des polluants atmosphériques sur de longues distances. L’analyse s’est appuyée sur les données de la saison chaude, de mai à septembre, au cours de laquelle les valeurs d’exposition à l’ozone sont les plus élevées. Les données d’Eurostat, l’office statistique de l’Union européenne, ont quant à elles permis d’estimer la mortalité.

L’étude chiffre à près de 115 000 le nombre de décès attribuables à l’ozone entre 2015 et 2017, sur l’ensemble de la zone des 35 pays européens considérés, soit un taux de mortalité de 72 décès annuels pour un million d’habitants. Plus de 88 % de ces décès seraient liés à une exposition à de l’ozone en provenance d’autres pays et seulement près de 12 % à une exposition d’origine nationale. Cette situation s’explique par le fait que contrairement à ses précurseurs tels que le dioxyde d’azote (NO2) qui ont une durée de vie plus courte, l’ozone troposphérique a une capacité à persister sur de longues distances dans la troposphère libre pendant le transport. Dans le détail, 60,2 % de tous les décès observés sont liés à de l’ozone en dehors de l’Europe, 20,9 % a son origine dans les autres pays européens analysés, tandis que les 7,2 % restants sont liés à de l’ozone issu du transport maritime.

Il apparaît également que les pays les plus industrialisés et les plus peuplés sont les principaux contributeurs à la mortalité attribuable à l’ozone transporté au-delà des frontières. Ainsi, l’ozone provenant de la France a provoqué 4 003 décès dans des pays voisins pendant la saison chaude entre 2015 et 2017. Plus précisément, cet ozone a provoqué 32,3 % des décès attribuables à ce polluant au Luxembourg, 29,3 % en Suisse et 24,4 % en Belgique. De son côté, l’ozone provenant d’Allemagne a provoqué 3 260 décès chez ses voisins européens.

Des stratégies de luttes paneuropéennes et mondiales doivent être menées

L’étude souligne également l’importance des vents dominants, notamment ceux venant de l’ouest et se dirigeant vers l’Est, sur le transport de l’ozone et donc sur les décès. Par conséquent, les pays du sud-ouest de l’Europe sont moins touchés par les effets sanitaires du transport transfrontalier d’ozone, et à contrario sont ceux où la mortalité attribuable à la production nationale d’ozone est la plus élevée. Cette dernière représente en Espagne 53,7 % des décès attribuables à l’ozone, 47,1 % en France et 46,2 % au Portugal.

Les résultats de ces travaux soulignent la nécessité de mettre en œuvre des stratégies paneuropéennes et mondiales coordonnées de lutte contre les polluants atmosphériques, tels que l’ozone troposphérique. Des recherches futures devraient affiner cette étude en analysant la contribution à la mortalité des différents secteurs ou activités économiques (énergie, industrie, transport, résidentiel, agriculture…), par pays, du transport transfrontalier d’ozone.

Limiter le réchauffement climatique se révèle aussi une démarche essentielle pour réduire l’impact de l’ozone, comme l’explique Hicham Achebak, chercheur à l’Inserm et à l’ISGlobal : « Le réchauffement climatique renforcera les conditions de formation de l’ozone troposphérique à l’avenir, car les mécanismes photochimiques de formation de l’ozone sont favorisés pendant les vagues de chaleur et les périodes de fort rayonnement solaire. Lutter contre le réchauffement climatique est nécessaire pour améliorer durablement la qualité de l’air. Il sera aussi important de faire d’autres recherches pour identifier aux mieux les sources de pollution qui contribuent le plus à la mortalité, que ce soit l’ozone ou d’autres polluants dont les effets sont tout aussi délétères sur la santé. »

1 ISGlobal : Institute for Global Health de Barcelone

2 BSC-CNS : Barcelona Supercomputing Center – Centro Nacional de Supercomputación

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Posté le par Nicolas LOUIS


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