Depuis le 1er janvier 2016, des centaines de milliers de sites professionnels ont dû quitter les tarifs réglementés de l’électricité et de gaz pour une offre de marché. Une obligation inscrite dans la loi Nome (Nouvelle Organisation du Marché de l’Electricité), votée en 2010, visant à libéraliser un marché énergétique dominé par les acteurs historiques que sont EDF et Engie (ex-GDFSuez).
Nome
La loi Nome répond à une exigence de Bruxelles de libéraliser le marché français de l’énergie. Un sujet sensible dans l’Hexagone et qui a abouti à protéger encore sous le parapluie des tarifs réglementés les particuliers. Tous les clients non-domestiques dont la puissance souscrite est supérieure à 36 kVA, devaient basculer, le 31 décembre 2015 au plus tard, sur une offre de marché. Selon la Commission de régulation de l’énergie (CRE), au 21 décembre 2015, environ 145 000 sites sur un total de 468 000 étaient encore aux tarifs réglementés d’électricité. Pour le gaz, environ 33 600 sites n’avaient pas encore souscrit d’offre de marché sur un total de 108 000. Le régulateur du secteur rappelle que, depuis le 1er janvier 2016, les contrats de fourniture de ces récalcitrants sont passés en « offres transitoires », dont les tarifs sont en moyenne supérieurs de 5 % aux tarifs réglementés de vente d’électricité. Une aberration au regard des économies réalisées par certains consommateurs.
Rabais de 15%
C’est le cas des 3 000 personnes publiques qui ont bénéficié de l’énorme appel d’offres (3 300 GWh) organisé en 2015 par l’UGAP, une centrale d’achat public. Les résultats ont été annoncés fin janvier et les lots ont été attribués. L’écart par rapport aux derniers tarifs réglementés est d’environ 43 millions d’euros par an pour la totalité des marchés, soit un gain moyen de 15%. Par ailleurs, les offres devaient favoriser le développement d’énergies propres en contenant des garanties selon le choix de chaque bénéficiaire (mix énergétique standard, 50%, 75% et 100% d’électricité renouvelable).
Le même jour, le groupe gestionnaire de copropriétés Foncia, annonçait avoir choisi Engie pour la fourniture des 120 GWh/an d’électricité destinés à ses 950 copropriétés en France, elles aussi concernées par la loi Nome. « Grâce à ce contrat de fourniture d’électricité, les immeubles concernés par cet appel d’offres vont bénéficier, en moyenne, d’une économie potentielle de l’ordre de 13% par rapport aux tarifs réglementés de vente », s’est félicité Foncia.
Libéralisation en demi-teinte
La libéralisation de ce pan du marché français de l’énergie ne s’est pas traduite par une hausse des prix, ce qui est assez rare pour être souligné. Au contraire, les clients ont bénéficié assez largement de l’ouverture du marché. D’aucuns pourraient penser qu’il s’agit de la saine concurrence qui s’est instauré dans l’Hexagone et qui a tiré les tarifs vers le bas, mais il n’en n’est rien. Les vainqueurs de l’appel d’offres de l’UGAP sont en effet les leaders historiques du secteur EDF et ENGIE, accompagnés d’Energies Strasbourg et Gaz Electricité de Grenoble, dont ils sont respectivement actionnaires… Aucun nouvel entrant. Ces offres compétitives résultent davantage d’un contexte de prix mondiaux de l’énergie (électricité, pétrole, gaz, charbon) très bas. Reste à savoir combien de temps les prix demeureront à ce niveau, et comment impactera leur inéluctable remontée sur la facture des professionnels.
Romain Chicheportiche