La polémique enflait suite aux révélations du journal Le Monde. Selon ces informations, la France serait le point d’accepter la proposition de critères élaborée par la Commission européenne. Mais Nicolas Hulot, ministre de la transition écologique et solidaire a rapidement réagi. « La santé doit primer sur toutes les autres considérations », a-t-il répondu le 23 juin sur RMC/BFTMV.
Dans ce cadre, il a qualifié le texte en discussion au niveau européen d’« insuffisant ». « La France va rester ferme, car mon rôle est de protéger les Français sur ces empoisonnements que nous distillons depuis des années et des années », a-t-il prévenu. En l’état, il juge les dérogations prévues comme étant « inacceptables ». Et il a entamé des négociations avec l’Allemagne jusqu’au vote prévu le 4 juillet à Bruxelles. La définition de ces critères est d’autant plus importante qu’elle servira ensuite à éliminer les perturbateurs endocriniens présents dans les emballages, les médicaments, les cosmétiques, les meubles…
Des dérogations qui inquiètent
Une nouvelle disposition est apparue dans le texte en décembre 2016. Celle-ci prévoit une dérogation pour les pesticides dont le mode d’action est basé sur la perturbation endocrinienne des organismes jugés nuisibles. Et ce, même s’ils ont des effets sur des invertébrés non ciblés. « C’est complètement inacceptable, puisque cela veut dire que l’on remet l’efficacité en premier et que l’innocuité sur l’environnement, on s’en fiche complètement », s’indigne François Veillerette, porte-parole de Générations Futures. Cette dérogation aurait été introduite pour répondre aux demandes des entreprises allemandes de la chimie.
La Commission a retenu trois critères pour classer une substance de perturbateur endocrinien. Il faut que celle-ci fasse apparaitre des effets indésirables, un mode d’action endocrinien et une corrélation entre les deux. Le débat se cristallise autour du poids de la preuve. À partir de quand, estime-t-on que les preuves scientifiques sont suffisantes ? Les premières propositions excluaient les perturbateurs endocriniens suspectés pour ne retenir que les avérés. Il y a eu des avancées sur ce point. Mais les associations estiment que le niveau de preuve exigé par les critères est encore trop élevé.
Seuls la France, le Danemark et la Suède s’y opposent, constituant une minorité de blocage. Avec un nouveau vote prévu le 4 juillet, les associations et les scientifiques montent au créneau pour appeler la France à voter contre. Car« si la France tombe, il n’y a plus de minorité de blocage », prévient François Veillerette.
ONG et scientifiques s’en mêlent !
Trois sociétés savantes d’endocrinologie ont adressé une lettre le 15 juin dernier aux ministres des Etats membres. Ils les appellent tout simplement à rejeter le projet de la Commission européenne. Selon eux, « les critères manquent de cohérence et ne seront pas efficaces ».
Par la suite, la coalition EDC Free Europe, représentant 70 organisations de la société civile européenne ont adressé une lettre ouverte à Nicolas Hulot. Ils lui demandent de « rejeter cette proposition, pour faire honneur aux engagements présidentiels d’Emmanuel Macron et à l’approche ambitieuse adoptée jusqu’à présente par la France ».
Selon Santé publique France, plusieurs études font état d’une apparition plus précoce des signes de la puberté en France et dans les pays développés, en lien avec ces produits. Et une étude récente évalue les impacts des produits chimiques sur les systèmes de santé européens à au moins 157 milliards d’euros par an, sans prendre en compte les cancers.
Par Matthieu Combe, journaliste scientifique
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