Le Fonds monétaire international estime que le PIB mondial s’élevait à près de 85 000 milliards de dollars en 2018. Les évaluations économiques varient mais s’accordent à dire que la lutte contre le réchauffement climatique demande des investissements équivalent à plusieurs points de PIB chaque année dans la finance verte. La finance verte comprend l’ensemble des activités financières en lien avec la transition écologique et énergétique. La finance internationale choisit d’ailleurs son slogan : «shifting the trilions», «faire basculer les milliers de milliards de dollars» vers la finance verte.
Des milliers de milliards de dollars ?
Il faudrait sortir de la vision classique qui réduit le discours à un montant d’investissement nécessaire face au réchauffement climatique. «Ce qu’on oublie souvent lorsque l’on parle de ces masses globales, c’est qu’il ne faut pas uniquement des milliers de milliards d’euros dans l’économie verte, mais aussi que les milliers de milliards d’euros qui financent actuellement l’économie non verte soient réduits à la plus faible portion», prévient Maxime Combes, économiste et porte-parole d’Attac.
L’économiste préfère d’ailleurs focaliser son attention sur un autre indicateur. «Le bon indicateur pour comprendre le verdissement du système monétaire est de regarder le marché obligataire mondial, l’ensemble de la dette émise par les Etats et les très grandes entreprises pour financer leurs activités opérationnelles au quotidien, note Maxime Combes. Le stock des obligations en circulation s’élève à environ 100 000 milliards de dollars». Face à ce marché obligataire mondial, un marché de l’obligation verte se développe. «Le stock émis reste encore inférieur à 1 000 milliards de dollars, soit 1% du marché», complète-t-il.
Un manque de contrôle de la finance verte
«La finance verte est encore minuscule et pas assez régulée et organisée pour s’assurer que ce qui est financé est réellement vert», prévient en plus Maxime Combes. Dans un rapport paru en 2017, Attac dénonçait déjà le manque de contrôle des projets financés. Il prenait alors pour exemples les financements du nouvel aéroport de Mexico par le Mexique, celui d’un méga-barrage par Engie et le financement par la compagnie pétrolière Repsol de l’efficacité énergétique de ses raffineries et usines chimiques en Espagne et au Portugal.
Depuis, l’Union européenne a travaillé sur la question. La Commission se veut motrice et vient de mettre sur pied une «taxonomie de la finance verte» dans le cadre de son nouveau Pacte Vert. Elle dresse ainsi un inventaire de toutes les activités qui peuvent entrer dans le cadre de la finance verte. Pour être considérée comme durable, une activité doit contribuer significativement à au moins l’un de ces 6 critères, sans causer de préjudice significatif aux autres : l’atténuation du changement climatique, l’adaptation au changement climatique, l’utilisation durable et la protection des ressources hydrologiques et marines, la transition vers une économie circulaire et la prévention et le recyclage des déchets, la prévention et le contrôle de la pollution, et la protection des écosystèmes sains. Le compromis obtenu en décembre n’exclut pas le gaz et le nucléaire des activités vertes. Si elles ne peuvent pas être incluses dans la catégorie des investissements «purement verts», ces activités peuvent potentiellement être qualifiées de «sources transitoires» d’énergie. «Cela ne va pas vraiment dans le bon sens», regrette Maxime Combes.
Sans même parler de la finance internationale, la France compte environ 22 millions de livrets de développement durable et solidaires (LDDS). La réalité est qu’ils n’offrent aucune garantie que cette épargne collectée finance la transition écologique. «Nous avions fait une proposition de loi pour exiger que les Français soient certains que chaque euro placé sur un LDDS finance bien la transition écologique, mais cela n’a pas été voté», se rappelle Maxime Combes. La finance verte semble finalement bien manquer de vert.
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